×

Wir verwenden Cookies, um LingQ zu verbessern. Mit dem Besuch der Seite erklärst du dich einverstanden mit unseren Cookie-Richtlinien.


image

"LE NEZ D'UN NOTAIRE" - Edmond About, Chapter 6 (pt A)

Chapter 6 (pt A)

VI. HISTOIRE D'UNE PAIRE DE LUNETTES ET CONSÉQUENCES D'UN RHUME DE CERVEAU

(-Part A-)

Jamais aucun prédicateur, jamais Bossuet ou Fénelon, jamais Massillon ou Fléchier, jamais M. Mermilliod lui-même ne dépensa dans sa chaire une éloquence plus forte et plus onctueuse à la fois que M. Alfred L'Ambert au chevet de Romagné. Il s'adressa d'abord à la raison, puis à la conscience, et finalement au cœur de son malade. Il mit en œuvre le profane et le sacré, cita les textes saints et les philosophes.il fut puissant et doux, sévère et paternel, logique, caressant et même plaisant. Il lui prouva que le suicide est le plus honteux de tous les crimes, et qu'il faut être bien lâche pour affronter volontairement la mort. Il risqua même une métaphore aussi nouvelle que hardie en comparant le suicidé au déserteur qui abandonne son poste sans la permission du caporal.

L'Auvergnat, qui n'avait rien pris depuis vingt-quatre heures, paraissait buté à son idée. Il se tenait immobile et têtu devant la mort comme un âne devant un pont. Aux arguments les plus serrés, il répondait avec une douceur impassible:

— Ch'est pas la peine, mouchu L'Àmbert; y a trop de migère en che monde.

— Eh! mon ami, mon pauvre ami! la misère est d'institution divine. Elle est créée tout exprès pour exciter la charité chez les riches et la résignation chez les pauvres.

— Les riches? J'ai demandé de l'ouvrage, et tout le monde m'en a refugé. J'ai demandé la charité, on m'a menaché du chargent de ville!

— Que ne vous adressiez-vous à vos amis? A moi, par exemple! à moi qui vous veux du bien! à moi qui ai de votre sang dans les veines!

— Ch'est cha ! pour que vous me fâchiez encore flanquer à la porte!

— Ma porte vous sera toujours ouverte, comme ma bourse, comme mon cœur! — Chi vous m'aviez cheulement donné chinquante francs pour racheter un tonneau d'occagion!

— Mais, animal!... cher animal, veux-je dire... permets-moi de te rudoyer un peu, comme dans les temps où tu partageais mon lit et ma table ! ce n'est pas cinquante francs que je te donnerai, c'est mille, deux mille, dix mille! c'est ma fortune entière que je veux partager avec toi... au prorata de nos besoins respectifs. Il faut que tu vives! il faut que tu sois heureux ! Voici le printemps qui revient, avec son cortège de fleurs et la douce musique des oiseaux dans les branches. Aurais-tu bien le cœur d'abandonner tout cela? Songe à la douleur de tes braves parents, de ton vieux père, qui t'attend au pays; de tes frères et de tes sœurs! Songe à ta mère, mon ami ! Celle-là ne te survivrait pas.' Tu les reverras tous ! Ou plutôt non : tu dois rester à Paris, sous mes yeux, dans mon intimité la plus étroite. Je. veux te voir heureux, marié à une bonne petite femme, père de deux ou trois jolis enfants. Tu souris! Prends ce potage.

— Merchi bien, mouchu L'Ambert.Gardez la choupe; il n'en faut plus. Y a trop de migère en che monde!

— Mais quand je te jure que tes mauvais jours sont finis! quand je me charge de ton avenir, foi de notaire! Si tu consens à vivre, tu ne souffriras plus, tu ne travailleras plus, tes années se composeront de trois cent soixantecinq dimanches!

— Et pas de lundis?

— De lundis, si tu le préfères. Tu mangeras, tu boiras, tu fumeras des cabanas à trente sous pièce! Tu seras mon commensal, mon inséparable, un autre moi-même. Veux-tu vivre, Romagné, pour être un autre moi-même?

— Non! tant pis. Pichque j'ai commenché à mourir, autant finir tout de chuite.

— Ah! c'est ainsi! Eh bien, je te dirai, triple brute! à quel destin tu te condamnes! Il ne s'agit pas seulement des peines éternelles que chaque minute de ton obstination rapproche de toi. Mais, en ce monde, ici même, demain, aujourd'hui peut-être, avant d'aller pourrir dans la fosse commune, tu seras porté à l'amphithéâtre On te jettera sur une table de pierre, on découpera ton corps en morceaux. Un carabin fendra à coups de hache ta grosse tête de mulet; un autre fouillera ta poitrine à grands coups de scalpel pour vérifier s'il y a un cœur dans cette stupide enveloppe; un autre...

— Gràche; grâche, inouchu L'Ambert! je ne veux pas être coupé en morcheaux! j'aime mieux manger la choupe!

Trois jours de soupe et la force de sa constitution le tirèrent de ce mauvais pas. On put le transporter en voiture jusqu'à l'hôtel de la rue de Verneuil.M. L'Ambert l'y installa lui-même, avec des attentions maternelles. Il lui donna le logement de son propre valet de chambre, pour l'avoir plus près de lui. Durant un mois, il remplit les fonctions de garde-malade et passa même plusieurs nuits.

Ces fatigues, au lieu d'altérer sa santé, rendirent la fraîcheur et l'éclat à son visage. Plus il s'exténuait à soigner le pauvre diable, plus son nez reprenait de couleur et de force. Sa vie se partageait entre l'étude, l'Auvergnat et le miroir. C'est dans cette période qu'il écrivit un jour par distraction sur le brouillon d'un acte de vente: « II est doux de faire le bien! » Maxime un peu vieille en elle-même, mais tout à fait nouvelle pour lui.

Lorsque Romagné fut décidément en convalescence, son hôte et son sauveur, qui lui avait taillé tant de mouillettes et découpé tant de biftecks, lui dit:

— A partir d'aujourd'hui, nous dînerons tous les jours ensemble. Si pourtant tu préférais manger à l'office, tu y serais aussi bien nourri, et tu t'amuserais davantage.

Romagné, en homme de bon sens, opta pour l'office.

II y prit ses habitudes et s'y conduisit de façon à gagner tous les cœurs. Au lieu de se prévaloir de l'amitié du maître, il fut plus modeste et plus doux que le petit marmiton. C'était un domestique que M. L'Ambert avait donné à ses gens. Tout le monde usait de lui, raillait son accent, et lui allongeait des tapes amicales: personne ne songeait à lui payer des gages. M. L'Àmbert le surprit quelquefois tirant de l'eau, déplaçant de gros meubles ou frottant les parquets. Dans ces occasions, ce bon maître lui tirait l'oreille et lui disait:

— Amuse-toi, j'y consens; mais ne te fatigue pas trop!

Le pauvre garçon était confus de tant de bontés et se retirait dans sa chambre pour pleurer de tendresse.

Il ne put la garder longtemps, cette cham brette propre et commode qui touchait à l'appartement du maître. M. L'Ambert fit entendre délicatement que son valet de chambre lui manquait beaucoup, et Romagné demanda luimême la permission de loger sous les combles. On s'empressa de faire droit à sa requête; il obtint un chenil dont les filles de cuisine n'avaient jamais voulu.

Un sage a dit: « Heureux les peuples qui n'ont pas d'histoire! » Sébastien Romagné fut heureux trois mois. C'est au commencement de juin qu'il eut une histoire. Son cœur, longtemps invulnérable, fut entamé par les flèches de l'Amour. L'ancien porteur d'eau se livra pieds et poings liés au dieu qui perdit Troie. Il s'aperçut, en épluchant des légumes, que la cuisinière avait de beaux petits yeux gris avec de belles grosses joués écarlates. Un soupir à renverser les tables fut le premier symptôme de son mal. Il voulut s'expliquer; la parole lui mourut dans la gorge. A peine s'il osa prendre sa Dulcinée par la taille et l'embrasser sur les lèvres, tant sa timidité était excessive.

On le comprit à demi-mot. La cuisinière était une personne capable, plus âgée que lui de sept à huit ans, et moins dépaysée sur la carte du Tendre.

— Je vois ce que c'est, lui dit-elle: vous avez envie de vous marier avec moi. Eh bien,, mon garçon, nous pouvons nous entendre, si vous avez quelque chose devant vous.

Il répondit naïvement qu'il avait devant lui tout ce qu'on peut demander à un homme, c'est à-dire deux bras robustes et accoutumés au travail. Demoiselle Jeannette lui rit au nez et parla plus clairement; il éclata de rire à son tour et dit avec la plus aimable confiance:

— Ch'est de l'argent qu'il faut pour cha? Vous auriez dû le dire tout de chuite. J'en ai gros comme moi, de l'argent! Combien ch'est-il que vous en voulez? Dites la chomme. Par eggemple, la moitié de la fortune de mouchu L'Ambert, cha cherait-il chuffigeant?

— Moitié de la fortune de monsieur?

— Chertainement. Il me l'a dit plus de chent fois. J'ai la moitié de cha fortune, mais nous n'avons pas encore partagé l'argent: il me le garde.

— Des bêtises!

— Des bétiges? Tenez, le voichi qui rentre. Je vas lui demander mon compte, et je vous apporte les gros chous à la cuigine.

Pauvre innocent! il obtint de son maître une bonne leçon de haute grammaire sociale. M. L'Ambert lui enseigna que promettre et tenir ne sont point synonymes; il daigna lui expliquer (car il était en belle humeur) les mérites et les dangers de la figure appelée hyperbole. Finalement, il lui dit avec une douceur ferme et qui n'admettait point de réplique:

— Romagné, j'ai beaucoup fait pour vous; je veux faire davantage encore en vous éloignant de cet hôtel. Le simple bon sens vous dit que vous n'y êtes pas en qualité de maître; j'ai trop de bonté pour admettre que vous y restiez comme valet; enfin, je croirais vous rendre un mauvais service en vous maintenant dans une situation mal définie qui pervertirait vos habitudes et fausserait votre esprit. Encore une année de cette vie oisive et parasite, et vous perdrez le goût du travail. Yous deviendrez un déclassé. Or, je dois vous dire que les déclassés sont le fléau de notre époque. Mettez la main sur votre conscience, et dites-moi si vous consentiriez à devenir le fléau de votre époque ? Pauvre malheureux! N'avez-vous pas regretté plus d'une fois le titre d'ouvrier, votre noblesse à vous? Car vous êtes de ceux que Dieu a créés pour s'ennoblir par les sueurs utiles; vous appartenez à l'aristocratie du travail. Travaillez donc; non plus comme autrefois, dans les privntions et le doute, mais dans une sécurité que je garantis et dans une abondance proportionnée à vos modestes besoins. C'est moi qui fournirai aux dépenses du premier établissement, c'est moi qui vous procurerai de l'ouvrage. Si, par impossible, les moyens d'existence venaient à vous manquer, vous trouveriez des ressources chez moi. Mais renoncez à l'absurde projet d'épouser ma cuisinière, car vous ne devez pas lier votre sort au sort d'une servante, et je ne veux pas d'enfants dans la maison!

L'infortuné pleura de tous ses yeux et se répandit en actions de grâces. Je dois dire, à la décharge de M. L'Ambert, qu'il fit les choses assez proprement. Il habilla Romagné tout à neuf, meubla pour lui une chambre au cinquième, dans une vieille maison de la rue du Cherche-Midi, et lui donna cinq cents francs pour vivre en attendant l'ouvrage. Et huit jours ne s'étaient pas écoulés, qu'il le fit entrer comme manœuvre chez un fort miroitier de la rue de Sèvres.

Il se passa longtemps, six mois peut-être, sans que le nez du notaire donnât aucune nouvelle de son fournisseur. Mais, un jour que l'officier ministériel, en compagnie de son maître clerc, déchiffrait les parchemins d'une noble et riche famille, ses lunettes d'or se brisèrent par le milieu et tombèrent sur la table.

Ce petit accident le dérangea fort peu. Il prit un pince-nez à ressort d'acier et fit changer les lunettes sur le quai des Orfèvres. Son opticien ordinaire, M. Luna, s'empressa d'envoyer mille excuses, avec une paire de lunettes neuves qui se brisèrent au même endroit, dans les vingtquatre heures.

Une troisième paire eut le même sort; une quatrième vint ensuite et se brisa pareillement. L'opticien ne savait plus quelle formule d'excuse il devait prendre. Dans le fond de son âme, il était persuadé que M. L'Ambert avait tort. Il disait à sa femme, en lui montrant le dégât des quatre journées:

— Ce jeune homme n'est pas raisonnable; il porte des verres n°4, qui sont forcément trèslourds; il veut, par coquetterie, une monture mince comme un fil, et je suis sûr qu'il brutalise ses lunettes comme si elles étaient de fer battu. Si je lui fais une observation, il se fâchera; mais je vais lui envoyer quelque chose le plus fort en monture.

Madame Luna trouva l'idée excellente; mais la cinquième paire de lunettes eut le sort des quatre premières. Cette t'ois, M. L'Ambert se lacha tout rouge, quoiqu'on ne lui eût fait aucune observation, et transporta sa clientèle à une maison rivale.

Mais on aurait dit que tous les opticiens de Paris s'étaient donné le mot pour casser leurs lunettes sur le nez du pauvre millionnaire. Une douzaine de paires y passa. Et le plus merveilleux de l'affaire, c'est que le pince-nez à ressort d'acier qui remplissait les interrègnes se maintint ferme et vigoureux.

Vous savez que la patience n'était pas la vertu favorite de M. Alfred L'Ambert. Il trépignait un jour sur une paire de lunettes, qu'il écrasait à coups de talon, quand le docteur Dernier se fil annoncer chez lui.

Parbleu! s'écria le notaire, vous arrivez à point. Je suis ensorcelé, le diable m'emporte. Les regards du docteur se portèrent naturellement sur le nez de son malade. L'objet lui parut sain, de bonne mine, et frais comme une rose.

— Il me semble, dit-il, que nous allons tout à fait bien.

— Moi? Sans doute; mais ces maudites lunettes ne veulent pas aller!

Il conta son histoire, et M. Bernier devint lèveur.

— Il y a de l'Auvergnat dans votre affaire Avez-vous ici une monture brisée?

— En voici une sous mes pieds.

M. Bernier la ramassa, l'examina à la loupe et crut voir que l'or était comme argenté aux environs de la cassure.

— Diable! dit-il. Est-ce que Romagné aurait fait des sottises?

— Quelles sottises voulez-vous qu'il fasse?

— Il est toujours chez vous?

— Non; le drôle m'a quitté. Il travaille en ville.

— J'espère que, cette fois, vous avez pris son adresse.

— Sans doute. Voulez-vous le voir?

— Le plus tôt sera le mieux.

— Il y a donc péril en la demeure? Cependant je me porte bien!

— Allons d'abord chez Romagné.

Un quart d'heure après, ces messieurs descendirent à la porte de MM. Taillade et C rue clé Sèvres. Une grande enseigne découpée dans des morceaux de glace indiquait le genre d'industrie pratiqué dans la maison.

— Nous y voici, dit le notaire.

— Quoi! votre homme est-il donc employé là dedans?

— Sans doute. C'est moi qui l'y ai fait Centrer.

— Allons, il y a moins de mal que je ne pensais. Mais, c'est égal, vous avez commis une fière imprudence!

— Que voulez-vous dire?

— Entrons d'abord.

Le premier individu qu'ils rencontrèrent dans l'atelier fut l'Auvergnat en bras de chemise, manches retroussées, étamant une glace.

— La! dit le docteur, je l'avais bien prévu.

— Mais quoi donc?

— On étame les glaces avec une couche do mercure emprisonnée sous une feuille d'étain. Comprenez-vous?

— Pas encore.

— Votre animal est fourré là dedans jusqu'aux coudes. Que dis-je! il e.n a bien jusqu'aux aisselles.

— Je ne vois pas la liaison...

— Vous ne voyez pas que votre nez étant une fraction de son bras, et l'or ayan^une tendance déplorable à s'amalgamer avec le mercure, il vous sera toujours impossible de garder vos lunettes?

— Sapristi!

— Mais vous avez la ressource de porter des lunettes d'acier.

— Je n'y tiens pas.

— A ce prix, vous ne risquez rien, sauf peutêtre quelques accidents mercuriels.

— Ah, mais non! J'aime mieux que Romagné fasse autre chose. Ici, Romagné! Laisse-moi ta besogne et viens-t'en vite avec nous! Mais veux-tu hien finir, animal. Tu ne sais pas à quoi tu m'exposes!

Chapter 6 (pt A) Chapter 6 (pt A)

VI. HISTOIRE D’UNE PAIRE DE LUNETTES ET CONSÉQUENCES D’UN RHUME DE CERVEAU

(-Part A-)

Jamais aucun prédicateur, jamais Bossuet ou Fénelon, jamais Massillon ou Fléchier, jamais M. Mermilliod lui-même ne dépensa dans sa chaire une éloquence plus forte et plus onctueuse à la fois que M. Alfred L’Ambert au chevet de Romagné. Never did any preacher, never did Bossuet or Fénelon, never did Massillon or Fléchier, never did M. Mermilliod himself expend a stronger and smoother eloquence from the pulpit than M. Alfred L'Ambert at Romagné's bedside. Il s’adressa d’abord à la raison, puis à la conscience, et finalement au cœur de son malade. First he addressed his patient's reason, then his conscience, and finally his heart. Il mit en œuvre le profane et le sacré, cita les textes saints et les philosophes.il fut puissant et doux, sévère et paternel, logique, caressant et même plaisant. He was powerful and gentle, stern and paternal, logical, caressing and even pleasant. Il lui prouva que le suicide est le plus honteux de tous les crimes, et qu’il faut être bien lâche pour affronter volontairement la mort. He proved to her that suicide is the most shameful of all crimes, and that it takes a coward to willingly face death. Il risqua même une métaphore aussi nouvelle que hardie en comparant le suicidé au déserteur qui abandonne son poste sans la permission du caporal. He even ventured a bold new metaphor, comparing the suicide victim to the deserter who abandons his post without the corporal's permission.

L’Auvergnat, qui n’avait rien pris depuis vingt-quatre heures, paraissait buté à son idée. The Auvergnat, who hadn't taken anything in twenty-four hours, seemed stubborn about his idea. Il se tenait immobile et têtu devant la mort comme un âne devant un pont. He stood motionless and stubborn before death like a donkey before a bridge. Aux arguments les plus serrés, il répondait avec une douceur impassible: To the tightest arguments, he responded with impassive gentleness:

— Ch’est pas la peine, mouchu L’Àmbert; y a trop de migère en che monde. - Ch'est pas la peine, mouchu L'Àmbert; y a trop de migère en che monde.

— Eh! mon ami, mon pauvre ami! la misère est d’institution divine. misery is a divine institution. Elle est créée tout exprès pour exciter la charité chez les riches et la résignation chez les pauvres. It has been created expressly to encourage charity among the rich and resignation among the poor.

— Les riches? J’ai demandé de l’ouvrage, et tout le monde m’en a refugé. I asked for work, and everyone refused. J’ai demandé la charité, on m’a menaché du chargent de ville! I asked for charity, and they gave me the city charger!

— Que ne vous adressiez-vous à vos amis? - Why don't you talk to your friends? A moi, par exemple! Take me, for example! à moi qui vous veux du bien! à moi qui ai de votre sang dans les veines!

— Ch’est cha ! pour que vous me fâchiez encore flanquer à la porte! so you can get me angry and throw me out again!

— Ma porte vous sera toujours ouverte, comme ma bourse, comme mon cœur! - My door will always be open to you, like my purse, like my heart! — Chi vous m’aviez cheulement donné chinquante francs pour racheter un tonneau d’occagion!

— Mais, animal!... - But, you animal... cher animal, veux-je dire... permets-moi de te rudoyer un peu, comme dans les temps où tu partageais mon lit et ma table ! dear animal, I mean... allow me to bully you a little, like in the days when you shared my bed and table! ce n’est pas cinquante francs que je te donnerai, c’est mille, deux mille, dix mille! it's not fifty francs I'll give you, it's a thousand, two thousand, ten thousand! c’est ma fortune entière que je veux partager avec toi... au prorata de nos besoins respectifs. it's my entire fortune that I want to share with you... in proportion to our respective needs. Il faut que tu vives! You have to live! il faut que tu sois heureux ! Voici le printemps qui revient, avec son cortège de fleurs et la douce musique des oiseaux dans les branches. Aurais-tu bien le cœur d’abandonner tout cela? Songe à la douleur de tes braves parents, de ton vieux père, qui t’attend au pays; de tes frères et de tes sœurs! Songe à ta mère, mon ami ! Celle-là ne te survivrait pas.' This one wouldn't survive you.' Tu les reverras tous ! Ou plutôt non : tu dois rester à Paris, sous mes yeux, dans mon intimité la plus étroite. Je. veux te voir heureux, marié à une bonne petite femme, père de deux ou trois jolis enfants. Tu souris! Prends ce potage.

— Merchi bien, mouchu L’Ambert.Gardez la choupe; il n’en faut plus. - Merchi bien, mouchu L'Ambert.garder la choupe; il n'faut plus. Y a trop de migère en che monde!

— Mais quand je te jure que tes mauvais jours sont finis! quand je me charge de ton avenir, foi de notaire! Si tu consens à vivre, tu ne souffriras plus, tu ne travailleras plus, tes années se composeront de trois cent soixantecinq dimanches!

— Et pas de lundis?

— De lundis, si tu le préfères. Tu mangeras, tu boiras, tu fumeras des cabanas à trente sous pièce! Tu seras mon commensal, mon inséparable, un autre moi-même. Veux-tu vivre, Romagné, pour être un autre moi-même?

— Non! tant pis. Pichque j’ai commenché à mourir, autant finir tout de chuite. Since I've started to die, I might as well finish right away.

— Ah! c’est ainsi! Eh bien, je te dirai, triple brute! à quel destin tu te condamnes! Il ne s’agit pas seulement des peines éternelles que chaque minute de ton obstination rapproche de toi. Mais, en ce monde, ici même, demain, aujourd’hui peut-être, avant d’aller pourrir dans la fosse commune, tu seras porté à l’amphithéâtre On te jettera sur une table de pierre, on découpera ton corps en morceaux. Un carabin fendra à coups de hache ta grosse tête de mulet; un autre fouillera ta poitrine à grands coups de scalpel pour vérifier s’il y a un cœur dans cette stupide enveloppe; un autre... One rifleman will split your big mule's head open with an axe; another will take a scalpel to your chest to see if there's a heart in that stupid envelope; another...

— Gràche; grâche, inouchu L’Ambert! - Gràche; grâche, inouchu L'Ambert! je ne veux pas être coupé en morcheaux! j’aime mieux manger la choupe!

Trois jours de soupe et la force de sa constitution le tirèrent de ce mauvais pas. On put le transporter en voiture jusqu’à l’hôtel de la rue de Verneuil.M. L’Ambert l’y installa lui-même, avec des attentions maternelles. Il lui donna le logement de son propre valet de chambre, pour l’avoir plus près de lui. Durant un mois, il remplit les fonctions de garde-malade et passa même plusieurs nuits. For a month, he worked as a nurse and even spent several nights there.

Ces fatigues, au lieu d’altérer sa santé, rendirent la fraîcheur et l’éclat à son visage. Instead of spoiling his health, these fatigues made his face look fresh and radiant. Plus il s’exténuait à soigner le pauvre diable, plus son nez reprenait de couleur et de force. Sa vie se partageait entre l’étude, l’Auvergnat et le miroir. His life was divided between study, the Auvergnat and the mirror. C’est dans cette période qu’il écrivit un jour par distraction sur le brouillon d’un acte de vente: « II est doux de faire le bien! » Maxime un peu vieille en elle-même, mais tout à fait nouvelle pour lui.

Lorsque Romagné fut décidément en convalescence, son hôte et son sauveur, qui lui avait taillé tant de mouillettes et découpé tant de biftecks, lui dit: When Romagné was decidedly convalescent, his host and savior, who had carved him so many mouillettes and cut up so many steaks, said to him:

— A partir d’aujourd’hui, nous dînerons tous les jours ensemble. Si pourtant tu préférais manger à l’office, tu y serais aussi bien nourri, et tu t’amuserais davantage. If you'd rather eat in the pantry, you'd be just as well fed, and you'd have more fun.

Romagné, en homme de bon sens, opta pour l’office.

II y prit ses habitudes et s’y conduisit de façon à gagner tous les cœurs. Au lieu de se prévaloir de l’amitié du maître, il fut plus modeste et plus doux que le petit marmiton. C’était un domestique que M. L’Ambert avait donné à ses gens. It was a servant that Mr. L'Ambert had given to his people. Tout le monde usait de lui, raillait son accent, et lui allongeait des tapes amicales: personne ne songeait à lui payer des gages. Everyone used him, mocked his accent and patted him on the back: nobody thought of paying him a salary. M. L’Àmbert le surprit quelquefois tirant de l’eau, déplaçant de gros meubles ou frottant les parquets. Mr. L'Àmbert sometimes caught him hauling water, moving large pieces of furniture or scrubbing wooden floors. Dans ces occasions, ce bon maître lui tirait l’oreille et lui disait:

— Amuse-toi, j’y consens; mais ne te fatigue pas trop!

Le pauvre garçon était confus de tant de bontés et se retirait dans sa chambre pour pleurer de tendresse. The poor boy was overwhelmed by such kindness, and would retire to his room to weep with tenderness.

Il ne put la garder longtemps, cette cham brette propre et commode qui touchait à l’appartement du maître. He couldn't keep it long, this clean, convenient cham brette that adjoined the master's apartment. M. L’Ambert fit entendre délicatement que son valet de chambre lui manquait beaucoup, et Romagné demanda luimême la permission de loger sous les combles. Mr. L'Ambert delicately made it clear that he missed his valet very much, and Romagné himself asked for permission to stay in the attic. On s’empressa de faire droit à sa requête; il obtint un chenil dont les filles de cuisine n’avaient jamais voulu. His request was quickly granted, and he was given a kennel that the kitchen girls had never wanted.

Un sage a dit: « Heureux les peuples qui n’ont pas d’histoire! A wise man once said: "Happy are the people who have no history! » Sébastien Romagné fut heureux trois mois. C’est au commencement de juin qu’il eut une histoire. Son cœur, longtemps invulnérable, fut entamé par les flèches de l’Amour. L’ancien porteur d’eau se livra pieds et poings liés au dieu qui perdit Troie. The ancient water-carrier surrendered bound hand and foot to the god who lost Troy. Il s’aperçut, en épluchant des légumes, que la cuisinière avait de beaux petits yeux gris avec de belles grosses joués écarlates. As he peeled vegetables, he noticed that the cook had beautiful little grey eyes with big scarlet cheeks. Un soupir à renverser les tables fut le premier symptôme de son mal. A table-turning sigh was the first symptom of his ailment. Il voulut s’expliquer; la parole lui mourut dans la gorge. He wanted to explain, but his words died in his throat. A peine s’il osa prendre sa Dulcinée par la taille et l’embrasser sur les lèvres, tant sa timidité était excessive. He hardly dared take his Dulcinea by the waist and kiss her on the lips, so excessive was his shyness.

On le comprit à demi-mot. We understood him half-heartedly. La cuisinière était une personne capable, plus âgée que lui de sept à huit ans, et moins dépaysée sur la carte du Tendre. The cook was a capable person, seven or eight years older than him, and less out of place on the carte du Tendre.

— Je vois ce que c’est, lui dit-elle: vous avez envie de vous marier avec moi. - I see what it is," she said, "you want to marry me. Eh bien,, mon garçon, nous pouvons nous entendre, si vous avez quelque chose devant vous.

Il répondit naïvement qu’il avait devant lui tout ce qu’on peut demander à un homme, c’est à-dire deux bras robustes et accoutumés au travail. Demoiselle Jeannette lui rit au nez et parla plus clairement; il éclata de rire à son tour et dit avec la plus aimable confiance: Demoiselle Jeannette laughed in his face and spoke more clearly; he in turn burst out laughing and said with the most amiable confidence:

— Ch’est de l’argent qu’il faut pour cha? - Ch'est de l'argent qu'il faut pour cha? Vous auriez dû le dire tout de chuite. J’en ai gros comme moi, de l’argent! I've got money as big as me! Combien ch’est-il que vous en voulez? How much do you want? Dites la chomme. Say the man. Par eggemple, la moitié de la fortune de mouchu L’Ambert, cha cherait-il chuffigeant?

— Moitié de la fortune de monsieur?

— Chertainement. Il me l’a dit plus de chent fois. J’ai la moitié de cha fortune, mais nous n’avons pas encore partagé l’argent: il me le garde.

— Des bêtises!

— Des bétiges? Tenez, le voichi qui rentre. Here's the voichi coming home. Je vas lui demander mon compte, et je vous apporte les gros chous à la cuigine. I'm going to ask him for my account, and I'll bring you the big cabbages à la cuigine.

Pauvre innocent! il obtint de son maître une bonne leçon de haute grammaire sociale. M. L’Ambert lui enseigna que promettre et tenir ne sont point synonymes; il daigna lui expliquer (car il était en belle humeur) les mérites et les dangers de la figure appelée hyperbole. Mr. L'Ambert taught him that to promise and to keep are not synonymous; he deigned to explain to him (for he was in a good mood) the merits and dangers of the figure called hyperbole. Finalement, il lui dit avec une douceur ferme et qui n’admettait point de réplique:

— Romagné, j’ai beaucoup fait pour vous; je veux faire davantage encore en vous éloignant de cet hôtel. - Romagné, I've done a lot for you; I want to do even more by taking you away from this hotel. Le simple bon sens vous dit que vous n’y êtes pas en qualité de maître; j’ai trop de bonté pour admettre que vous y restiez comme valet; enfin, je croirais vous rendre un mauvais service en vous maintenant dans une situation mal définie qui pervertirait vos habitudes et fausserait votre esprit. Common sense tells you that you're not there as a master; I'm too kind to admit that you're there as a valet; finally, I'd be doing you a disservice by keeping you in an ill-defined situation that would pervert your habits and distort your mind. Encore une année de cette vie oisive et parasite, et vous perdrez le goût du travail. Yous deviendrez un déclassé. Or, je dois vous dire que les déclassés sont le fléau de notre époque. Mettez la main sur votre conscience, et dites-moi si vous consentiriez à devenir le fléau de votre époque ? Put your hand on your conscience, and tell me if you would consent to become the scourge of your time? Pauvre malheureux! N’avez-vous pas regretté plus d’une fois le titre d’ouvrier, votre noblesse à vous? Haven't you more than once regretted the title of worker, your own nobility? Car vous êtes de ceux que Dieu a créés pour s’ennoblir par les sueurs utiles; vous appartenez à l’aristocratie du travail. Travaillez donc; non plus comme autrefois, dans les privntions et le doute, mais dans une sécurité que je garantis et dans une abondance proportionnée à vos modestes besoins. C’est moi qui fournirai aux dépenses du premier établissement, c’est moi qui vous procurerai de l’ouvrage. Si, par impossible, les moyens d’existence venaient à vous manquer, vous trouveriez des ressources chez moi. Mais renoncez à l’absurde projet d’épouser ma cuisinière, car vous ne devez pas lier votre sort au sort d’une servante, et je ne veux pas d’enfants dans la maison!

L’infortuné pleura de tous ses yeux et se répandit en actions de grâces. The unfortunate man wept with all his eyes and poured out his thanks. Je dois dire, à la décharge de M. L’Ambert, qu’il fit les choses assez proprement. I must say, in Mr. L'Ambert's defense, that he did things rather neatly. Il habilla Romagné tout à neuf, meubla pour lui une chambre au cinquième, dans une vieille maison de la rue du Cherche-Midi, et lui donna cinq cents francs pour vivre en attendant l’ouvrage. Et huit jours ne s’étaient pas écoulés, qu’il le fit entrer comme manœuvre chez un fort miroitier de la rue de Sèvres. And before eight days had passed, he had him working as a laborer for a leading mirror-maker in the Rue de Sèvres.

Il se passa longtemps, six mois peut-être, sans que le nez du notaire donnât aucune nouvelle de son fournisseur. A long time passed, perhaps six months, without any news from the notary's nose. Mais, un jour que l’officier ministériel, en compagnie de son maître clerc, déchiffrait les parchemins d’une noble et riche famille, ses lunettes d’or se brisèrent par le milieu et tombèrent sur la table.

Ce petit accident le dérangea fort peu. Il prit un pince-nez à ressort d’acier et fit changer les lunettes sur le quai des Orfèvres. He took a steel spring nose clip and had the glasses changed on the Quai des Orfèvres. Son opticien ordinaire, M. Luna, s’empressa d’envoyer mille excuses, avec une paire de lunettes neuves qui se brisèrent au même endroit, dans les vingtquatre heures.

Une troisième paire eut le même sort; une quatrième vint ensuite et se brisa pareillement. L’opticien ne savait plus quelle formule d’excuse il devait prendre. Dans le fond de son âme, il était persuadé que M. L’Ambert avait tort. Il disait à sa femme, en lui montrant le dégât des quatre journées:

— Ce jeune homme n’est pas raisonnable; il porte des verres n°4, qui sont forcément trèslourds; il veut, par coquetterie, une monture mince comme un fil, et je suis sûr qu’il brutalise ses lunettes comme si elles étaient de fer battu. Si je lui fais une observation, il se fâchera; mais je vais lui envoyer quelque chose le plus fort en monture.

Madame Luna trouva l’idée excellente; mais la cinquième paire de lunettes eut le sort des quatre premières. Madame Luna thought it was an excellent idea, but the fifth pair of glasses suffered the same fate as the first four. Cette t’ois, M. L’Ambert se lacha tout rouge, quoiqu’on ne lui eût fait aucune observation, et transporta sa clientèle à une maison rivale. This time, Mr. L'Ambert got red in the face, even though no one had made any comment, and transferred his clientele to a rival firm.

Mais on aurait dit que tous les opticiens de Paris s’étaient donné le mot pour casser leurs lunettes sur le nez du pauvre millionnaire. But it was as if every optician in Paris had taken it upon themselves to break their glasses on the poor millionaire's nose. Une douzaine de paires y passa. A dozen pairs passed through. Et le plus merveilleux de l’affaire, c’est que le pince-nez à ressort d’acier qui remplissait les interrègnes se maintint ferme et vigoureux. And the most marvellous thing of all was that the spring-steel nose-clip that filled the interregnum remained firm and vigorous.

Vous savez que la patience n’était pas la vertu favorite de M. Alfred L’Ambert. Il trépignait un jour sur une paire de lunettes, qu’il écrasait à coups de talon, quand le docteur Dernier se fil annoncer chez lui.

Parbleu! By Jove! s’écria le notaire, vous arrivez à point. Je suis ensorcelé, le diable m’emporte. I'm bewitched, the devil takes me away. Les regards du docteur se portèrent naturellement sur le nez de son malade. L’objet lui parut sain, de bonne mine, et frais comme une rose.

— Il me semble, dit-il, que nous allons tout à fait bien.

— Moi? Sans doute; mais ces maudites lunettes ne veulent pas aller!

Il conta son histoire, et M. Bernier devint lèveur. He told his story, and Mr. Bernier became a lip-smacker.

— Il y a de l’Auvergnat dans votre affaire Avez-vous ici une monture brisée? - There's some Auvergne in your case Do you have a broken frame here?

— En voici une sous mes pieds.

M. Bernier la ramassa, l’examina à la loupe et crut voir que l’or était comme argenté aux environs de la cassure. Mr. Bernier picked it up, examined it with a magnifying glass and thought he saw that the gold was silvery around the break.

— Diable! dit-il. Est-ce que Romagné aurait fait des sottises?

— Quelles sottises voulez-vous qu’il fasse?

— Il est toujours chez vous?

— Non; le drôle m’a quitté. Il travaille en ville.

— J’espère que, cette fois, vous avez pris son adresse.

— Sans doute. Voulez-vous le voir?

— Le plus tôt sera le mieux.

— Il y a donc péril en la demeure? - So there's danger in the house? Cependant je me porte bien! But I'm doing fine!

— Allons d’abord chez Romagné.

Un quart d’heure après, ces messieurs descendirent à la porte de MM. Taillade et C rue clé Sèvres. Une grande enseigne découpée dans des morceaux de glace indiquait le genre d’industrie pratiqué dans la maison. A large sign cut out of pieces of ice indicated the type of industry practiced in the house.

— Nous y voici, dit le notaire.

— Quoi! votre homme est-il donc employé là dedans?

— Sans doute. C’est moi qui l’y ai fait Centrer. I'm the one who got it centered there.

— Allons, il y a moins de mal que je ne pensais. - Come on, there's less harm than I thought. Mais, c’est égal, vous avez commis une fière imprudence! But, all the same, you've made a proud imprudence!

— Que voulez-vous dire?

— Entrons d’abord.

Le premier individu qu’ils rencontrèrent dans l’atelier fut l’Auvergnat en bras de chemise, manches retroussées, étamant une glace. The first person they met in the workshop was the Auvergnat in a shirt-sleeve, sleeves rolled up, tinning a mirror.

— La! dit le docteur, je l’avais bien prévu. says the doctor, "I had foreseen it.

— Mais quoi donc?

— On étame les glaces avec une couche do mercure emprisonnée sous une feuille d’étain. - Ice is tinned with a layer of mercury trapped under a sheet of tin. Comprenez-vous?

— Pas encore.

— Votre animal est fourré là dedans jusqu’aux coudes. - Your pet is up to its elbows in it. Que dis-je! il e.n a bien jusqu’aux aisselles. he's up to his armpits in it.

— Je ne vois pas la liaison... - I don't see the connection...

— Vous ne voyez pas que votre nez étant une fraction de son bras, et l’or ayan^une tendance déplorable à s’amalgamer avec le mercure, il vous sera toujours impossible de garder vos lunettes? - Can't you see that since your nose is a fraction of your arm, and gold has a deplorable tendency to amalgamate with mercury, you'll never be able to keep your glasses on?

— Sapristi!

— Mais vous avez la ressource de porter des lunettes d’acier. - But you have the resource of wearing steel goggles.

— Je n’y tiens pas. - I don't want it.

— A ce prix, vous ne risquez rien, sauf peutêtre quelques accidents mercuriels. - At this price, you risk nothing, except perhaps a few mercurial accidents.

— Ah, mais non! J’aime mieux que Romagné fasse autre chose. Ici, Romagné! Laisse-moi ta besogne et viens-t’en vite avec nous! Mais veux-tu hien finir, animal. Tu ne sais pas à quoi tu m’exposes!