1939 - Seconde guerre mondiale tome 1 | L'Histoire nous le dira (1)
Aujourd'hui j'entame le premier épisode d'une nouvelle série consacrée à l'histoire
de la seconde Guerre mondiale.
Comme je l'ai fait durant la série dédiée à la Grande Guerre de 1914-1918, juste ici,
je vais explorer les tenants et les aboutissants d'un conflit qui est, malheureusement, l'épouvantable
suite logique d'une boucherie dont on peut se demander si elle s'est bel et bien terminée
en 1918.
En effet, la question est légitime, car la paix signée à Versailles en 1919 n'est
qu'éphémère. Sans jamais réellement régler les problèmes politiques, économiques
et sociaux des États européens, on prétend même qu'elle contient les ingrédients
pour alimenter une autre guerre d'une ampleur encore inégalée.
Et comme vous avez été nombreux à avoir suivi et commenté ma série sur 14-18, je
vous propose cette fois d'explorer la Seconde Guerre mondiale sur un modèle semblable,
c'est-à-dire année après année et dans l'ensemble des théâtres d'opérations.
Que ce soit sur terre, sur mer, dans les airs, que ce soit dans les usines, dans les rues
des villes, dans les territoires occupés et même dans les camps de la mort, rien ne
doit nous échapper afin de mieux comprendre ce qui s'est réellement passé.
Allez! Aujourd'hui, à l'Histoire nous le dira, la Seconde guerre mondiale avec,
en premier lieu, l'année 1939.
La Seconde Guerre mondiale est un conflit à l'échelle planétaire qui dure officiellement
de septembre 1939 à septembre 1945. La grande majorité des États du monde de l'époque
y participent à l'intérieur de deux grandes alliances opposées : les forces de l'Axe
contre celles des Alliés.
Mais pourquoi le monde s'embrase-t-il de nouveau en 1939 ? N'a-t-il pas retenu les
terribles leçons de la guerre de 1914-1918 ? Les dizaines de millions de soldats et de
civils qui y ont trouvé la mort n'ont-ils pas convaincu l'humanité d'arrêter ces
tragédies ? non ?
Pour bien comprendre les événements qui nous intéressent en 1939, il est impératif
de faire quelques pas de recul dans le temps, c'est-à-dire retourner vingt ans en arrière.
Rappelez-vous : les canons de la Grande Guerre cessent de tonner le 11 novembre 1918. Les
Puissances centrales, avec l'Allemagne en tête, évacuent les territoires ennemis qu'elles
occupent depuis 1914. On parle alors d'un armistice qui est alors
un cessez-le-feu, le temps qu'une paix durable soit négociée. Mais l'avenir semble déjà incertain.
Tandis que s'ouvre en janvier 1919 la conférence de paix de Paris censée mettre un terme au
conflit, le même mois, l'Allemagne entre en pleine révolution spartakiste.
Le kaiser Guillaume II est contraint d'abdiquer son trône et la nouvelle République de Weimar,
dont les représentants négocient la paix avec les Alliés, tente d'établir son autorité
au milieu des différentes factions qui alimentent le brasier de la révolution.
Pire encore! Au-delà des troubles révolutionnaires en Allemagne, on peut même dire que la guerre
en Europe se poursuit. Le bruit des canons se fait toujours entendre. Mais où ? Et pourquoi ?
D'abord, le début de l'année 1919 voit la Pologne entièrement indépendante se faire
attaquer par la Russie en pleine révolution bolchevique, dans une guerre qui ne s'achève
qu'en 1921 avec la victoire Polonaise. Toujours en 1919, au mois de mars, est fondée
à Moscou la IIIe Internationale communiste, qui cherche à rallier au nouveau régime
Soviétique les différents partis communistes en Russie comme ailleurs dans le monde.
Toutefois, durant l'été, alors que l'on négocie depuis des mois, on parvient enfin
à signer un accord de paix avec l'Allemagne par la conclusion du Traité de Versailles.
Et malgré que l'on se batte ailleurs en Europe, disons que ce traité met officiellement
fin à la Grande Guerre de 1914. Je dis bien « officiellement », le mot est important.
Les forces alliées de l'époque remportent donc une victoire qui modifie radicalement
la carte du monde et la dynamique des relations internationales.
Mais, avec la paix de Versailles, peut-on vraiment dire que l'Europe et le monde peuvent aspirer
à quelque répit ? On peut raisonnablement en douter, malheureusement.
Il y a par exemple de nombreuses révolutions localisées à certains pays ou régions dans
les dernières semaines de la Grande Guerre et au début des années 1920.
Ces révolutions, politiquement plus à gauche, se déroulent en Allemagne – comme on vient
de le voir –, mais également en Pologne, en Finlande, en Espagne, en Hongrie et en
Autriche, pour ne citer que quelques exemples.
La plupart de ces mouvements révolutionnaires échouent, mais le cas de la Russie dans les
années 1920 est particulier, puisque le communisme parvient à s'y implanter.
Notons aussi que la fin de la Grande Guerre amène par conséquent la création de nouveaux
États – surtout en Europe de l'Est –, dont certains constituaient autrefois des provinces
d'empires déchus.
Des conflits font donc rage en Europe de l'Est, mais également dans les colonies des empires
Britannique et Français, où les populations aspirent à plus de reconnaissance de la part
des métropoles en regard de leur participation à la Grande Guerre.
La fin des hostilités marque aussi des changements d'importance aux plans sociaux, économiques
et financiers. La guerre plombe littéralement les finances publiques des anciennes grandes puissances.
La Grande-Bretagne, par exemple, ne parvient pas dans l'immédiat à rembourser aux États-Unis
les emprunts de guerre souscrits, tout comme les coffres sont vides dans une Allemagne
qui doit payer les réparations imposées par le Traité de Versailles.
D'ailleurs, nombreux sont les Allemands qui trouvent la situation inacceptable, si
bien qu'ils refusent carrément de payer. Qui plus est - comme si la situation n'était
pas suffisamment assez grave -, l'Allemagne connaît au début des années 1920 une période
d'hyperinflation. L'argent perd tellement de sa valeur qu'il faut quasiment être
millionnaire pour s'acheter ne serait-ce qu'un café!
Mais si certains Allemands optent pour une voie de résistance passive, d'autres, plus
extrémistes, n'hésitent carrément pas à prendre les armes.
Le cas le plus notoire demeure celui du putsch raté orchestré par des membres du parti
Nazi en novembre 1923 à Munich : le fameux Beer All Putsch.
À cette occasion, des membres influents du parti Nazi, dont Adolf Hitler et le général
Erich Ludendorff, un ancien commandant durant la Première Guerre mondiale, provoquent un
coup d'État visant à prendre le pouvoir à Munich, en Bavière.
Les affrontements entre les forces de l'ordre et les Nazis se soldent par la mort d'une
vingtaine d'entre eux, mais les événements donnent au parti Nazi et à Hitler une publicité
sans précédent.
Malgré tout, le début des années 1920 marque une relative prospérité économique dans
les pays déjà industrialisés, notamment en Europe de l'Ouest et en Amérique du
Nord. La classe moyenne poursuit son ascension et
des technologies connues avant la guerre finissent par être plus accessibles, comme le téléphone,
l'automobile et la radio.
Il suffit aussi de s'attarder au style vestimentaire des gens de l'époque, notamment chez les
femmes qui, désormais, s'habillent avec des vêtements plus courts et décontractés.
Dans certains pays, d'ailleurs, les femmes obtiennent le droit de vote dans le contexte
de la fin des hostilités, ce qui constitue une importante avancée sur le plan social.
Toutefois, dans l'imaginaire populaire, ces années « folles », et plus ou moins
glorieuses, que sont les années 20, finissent brutalement en octobre 1929 lorsque la bourse
de Wall Street à New-York « crash » complètement - vous allez voir, on a fait une vidéo
là-dessus -
Dans les faits, cette cassure dans l'économie mondiale ne constitue que la première étape,
sinon la première phase de ce qui devient une longue dépression économique qui caractérise
essentiellement les années 1930.
La crise débute aux États-Unis, mais se répand aussi rapidement pour atteindre un
sommet mondial vers 1933. À peu près aucun État du monde n'est épargné. Le commerce
international chute dramatiquement, amenant du coup certains États à vivre dans une
quasi-autarcie économique.
Donc, la fin de la Grande Guerre amène son lot de défis et de questionnements pour l'avenir.
On peut penser à l'influence de plus en plus importante des États-Unis dans les affaires
internationales, comme aux espoirs légitimes vis-à-vis le travail de la nouvelle Société
des Nations, la SDN.
Justement : cette fameuse SDN, sera-t-elle capable d'amener les États à régler leurs
différends de manière pacifique, sinon à normaliser leurs relations internationales,
sans pour autant recourir systématiquement à la force des armes ? On peut en douter.
Rappelons que cette organisation est née en 1920 et qu'elle cherche à prévenir
les futurs conflits en mettant l'accent sur les principes de la sécurité collective,
du désarmement et surtout de la négociation.
La SDN cherche tant bien que mal à résoudre certains conflits et à ramener un semblant
de paix, surtout dans ce qui apparaît comme une normalisation nécessaire des relations
internationales au lendemain de la Grande Guerre.
Toutefois, l'organisation internationale ne parvient pas à empêcher le déclenchement
de certaines des guerres dans les années 1930, ni de bloquer la route aux visées expansionnistes
des régimes fascistes.
Mais la SDN est impliquée dans la conclusion des accords de Locarno de 1925 qui permettent
de régulariser les relations entre les vieux ennemis de la Grande Guerre qu'étaient
la France et l'Allemagne, en plus de stabiliser leurs frontières.
La SDN peut également servir d'outil de promotion de ce que l'on peut appeler l'«
illégalité de la guerre ». En clair, il faut concevoir la paix et la guerre sous d'autres
angles, des angles assurément plus audacieux et innovateurs.
Et faire en sorte que la guerre devienne illégale, voilà un élément qui puisse paraître audacieux.
À défaut, il faut minimalement contraindre les futurs belligérants à prioriser la négociation,
puis à ne plus recourir à certaines armes prohibées, comme celle des gaz de combat
qui ont traumatisé les vétérans de la Grande Guerre.
La SDN s'inscrit également dans une ère où l'on souhaite mettre fin à ce qu'on
peut qualifier dorénavant de « diplomatie secrète », c'est-à-dire cette diplomatie
qui caractérisait les relations internationales d'avant 1914. On devrait dorénavant miser
sur la négociation collective et publique. Malheureusement pour la SDN, son principal
handicap est que, contrairement à l'Organisation des Nations-Unis, elle n'est pas dotée
d'un outil militaire lui permettant d'appliquer concrètement ses résolutions.
De plus, la SDN ne parvient que partiellement à promouvoir l'idée d'un désarmement
collectif. Cette question du désarmement est particulièrement centrale durant l'entre-deux-guerres.
Par-dessus tout, les États aux visées expansionnistes comme l'Allemagne, l'Italie, le Japon
et l'URSS n'ont que faire de voir les potentiels conflits s'apaiser par les discussions
diplomatiques, et encore moins de rester dans une attitude passive concernant la question
du désarmement et de la démilitarisation.
De plus, il faut bien l'avouer, la situation internationale est passablement anarchique
pour y imposer la paix. Le cas de la Russie est particulièrement flagrant en ce sens.
Depuis 1917, le pays baigne en pleine guerre civile et le nouveau pouvoir bolchevique qui
finit par s'imposer vers 1922 suscite les plus hautes suspicions parmi les pays démocratiques.
La Russie devient alors l'Union Soviétique, l'URSS, et la dictature communiste, ou plutôt
stalinienne, est désormais une réalité. Le nouveau régime politique se fait remarquer
par sa brutalité et par un culte de la personnalité du dictateur.
Et là, vous me voyez probablement venir. Qui dit « crise » dit « portes ouvertes
» aux idéologies politiques totalitaires, qui mettent à mal la stabilité politique
des démocraties libérales chancelantes. Justement : les démocraties de ce monde peuvent-elles
survivre face à la montée et à une certaine popularité des idéologies totalitaires tels
le communisme et le fascisme?
Peuvent-elles survivre aux crises économiques et financières, dont celle de 1929 s'avère
de loin la plus terrible et qui remettent en cause les foncements mêmes du capitalisme ?
En pleine crise économique, qui fait encore
confiance aux gouvernements démocratiques légitimement élus ? Qui ?
Ne faudrait-il pas plutôt mettre en place des gouvernements à la poigne de fer, comme
c'est le cas en URSS ? Des gouvernements qui sauront, par des voies plus expéditives
et brutales, apporter des solutions simples à des problèmes complexes ?
À l'opposé de la voie communiste, certains États apportent des réponses politiques
beaucoup plus nationalistes et idéologiquement conservatrices sur le fond, mais tout aussi
autoritaires et brutales quant à la forme. Parce que si le monde peut croire qu'une