Chapter 6 (pt B)
VI. HISTOIRE D'UNE PAIRE DE LUNETTES ET CONSÉQUENCES D'UN RHUME DE CERVEAU
(-Part B-)
Le patron de l'atelier était accouru au bruit. M. L'Ambert se nomma d'un ton d'importance et rappela qu'il avait recommandé cet homme par l'entremise de son tapissier. M. Taillade répondit qu'il s'en souvenait parfaitement. C'était même pour se rendre agréable à M. L'Ambert et mériter sa bienveillance, qu'il avait promu son manœuvre au grade d'étameur.
— Depuis quinze jours? s'écria L'Ambert.
— Oui, monsieur. Tous le saviez donc?
— Je ne le sais que trop! Ah! monsieur, comment peut-on jouer avec des choses si sacrées?
— J'ai...?
— Non, rien. Mais, dans mon intérêt, dans le vôtre, dans l'intérêt de la société tout entière, remettez-le où il était! ou plutôt, non; rendez-le-moi, que je l'emmène. Je payerai ce qu'il faudra, mais le temps presse. Ordonnance du médecin!... Romagné, mon ami, il faut me suivre. Votre fortune est faite; tout ce que j'ai vous appartient!... Non! Mais venez quand même; je vous jure que vous serez content de moi!
Il lui laissa à peine le temps de se vêtir et l'entraîna comme une proie. M. Taillade et ses ouvriers le prirent pour un fou. Le bon Romagné levait les yeux au ciel et se demandait, tout en marchant, ce qu'on voulail encore de lui.
Son destin fut débattu dans la voiture, tandis qu'il gobait les mouches auprès du cocher.
— Mon cher malade, disait le docteur au millionnaire, il faut garder à vue ce garçon-là. Je comprends que vous l'ayez renvoyé de chez vous, car il n'est pas d'un commerce trèsagréable; mais il ne fallait pas le placer si loin, ni rester si longtemps sans faire prendre de ses nouvelles. Logez-le rue de Beaune ou rue de l'Université, à proximité de votre hôtel. Donnezlui un état moins dangereux pour vous, ou plutôt, si vous voulez bien faire, servez-lui une petite pension sans lui donner aucun état: s'il travaille, il se fatigue, il s'expose; je ne connais pas de métier où l'homme ne risque sa peau; un accident est si ite arrivé! Donnez-lu de quoi vivre sans rien faire. Toutefois, gardez-vous bien de le mettre trop à l'aise! Il boirait encore, et vooi savez ce qui vous en revient. Une centaine de francs par mois, le loyer payé, voilà ce qu'il lui faut.
— C'est peut-être beaucoup...: non pour la somme; mais je voudrais lui donner de quoi manger sans lui donner de quoi boire.
— Va donc pour quatre louis, payables en quatre fois, le mardi de chaque semaine.
On offrit à Romagné une pension de quatrevingts francs par mois; mais, pour le coup, il so fit tirer l'oreille.
— Tout cha? dit-il avec mépris. C'hétait pas la peine de m'ôter de la rue de Chèvres; j'avais trois francs dix chous par jour et j'envoyais de l'argent à ma famille. Laichez-moi travailler dans les glaches, ou donnez-moi trois francs dix chous!
Il fallut bien en passer par là, puisqu'il était le maître de la situation.
M. L'Ambert s'aperçut bientôt qu'il avait pris le bon parti. L'année s'écoula sans accident d'aucune sorte. On payait Romagné toutes les semaines et on le surveillait tous les jours. Il vivait honnêtement, doucement, sans autre passion que le jeu de quilles. Et les beaux yeux de mademoiselle Irma Steimbourg se reposaient avec une complaisance visible sur le nez rose et blanc de l'heureux millionnaire.
Ces deux jeunes gens dansèrent ensemble tous les cotillons de l'hiver. Aussi le monde les mariait. Un soir, à la sortie du Théâtre-Italien, le vieux marquis de Villemaurin arrêta L'Am< bert sous le péristyle: — Eh bien, lui dit-il, à quand la noce?
— Mais, monsieur le marquis, je n'ai encore ouï parler de rien.
— Attendez-vous donc qu'on vous demande en mariage? C'est à l'homme à parler, morbleu! Le petit duc de Lignant, un vrai gentilhomme et un bon, n'a pas attendu que je lui offrisse ma fille, lui ! Il est venu, il a plu, c'est conclu. D'aujourd'hui en huit, nous signons le contrat. Vous savez, mon cher garçon, que cette affaire vous regarde. Laissez-moi mettre ces dames en voiture et nous irons jusqu'au cercle en causant. Mais couvrez-vous donc, que diable ! Je ne voyais pas que vous teniez votre chapeau à la main. Il y a de quoi s'enrhumer vingt fois pour une!
Le vieillard et le jeune homme cheminèrent côte à côte jusqu'au boulevard, l'un parlant, l'autre écoutant. Et L'Ambert rentra chez lui pour rédiger de mémoire le contrat de mademoiselle Charlotte-Auguste de Villemaurin. Mais il s'était bel et bien enrhumé; il n'y avait plus à s'en dédire. L'acte fut minuté par le maître clerc, revu par les hommes d'affaires des deux flan cés et transcrit définitivement sur un beau cahier de papier timbré où il ne manquait plus que les signatures.
Au jour dit, M. L'Ambert, esclave du devoir, se transporta an personne à l'hôtel de Villemaurin, malgré un coryza persistant qui lui faisait sortir les yeux de la tête. Il se moucha une dernière fois dans l'antichambre, et les laquais tressaillirent sur leurs banquettes, comme s'ils avaient entendu la trompette du jugement dernier.
On annonça M. L'Ambert. Il avait ses lunettes d'or et souriait gravement, comme il sied en pareille occurrence.
Bien cravaté, ganté juste, chaussé d'escarpins comme un danseur, le chapeau sous le bras gauche, le contrat dans la main droite, il vint rendre ses devoirs à la marquise, fendit modestement le cercle dont elle était environnée, s'inclina devant elle et lui dit :
— Madame la marquige, j'apporte le contrat de vochtre damigelle.
Madame de Yillemaurin leva sur lui deux grands yeux ébahis. Un léger murmure circula dans l'auditoire. M. L'Ambert salua de nouveau et reprit:
— Chaprichti! madame la marquige, ch'est cha qui va-t-être un beau jour pour la june perchonne!
Une main vigoureuse le saisit par le bras gauche et le fit pirouetter sur lui-même. A cette pantomime, il reconnut la vigueur du marquis.
— Mon cher notaire, lui dit le vieillard en le traînant dans un coin, le carnaval permet sans doute bien des choses; mais rappelez-vous chez qui vous êtes et changez de ton, s'il vous plait.
— Mais, mouchu le marquis...
— Encore!... Vous voyez que je suis patient; n'abusez pas. Allez faire vos excuses à la mar-< quise, lisez-nous votre contrat, et bonsoir. — Pourquoi des échecuges, et pourquoi le bonchoir? On dirait que j'ai fait des bêtiges, fouchtra!
Le marquis ne répondit rien, mais il fit un signe aux valets qui circulaient dans le salon. La porte d'entrée s'ouvrit, et l'on entendit une voix qui criait dans l'antichambre
— Les gens de M. L'Ambert!
Étourdi, confus, hors de lui, le pauvre millionnaire sortit en faisant des révérences et se trouva bientôt dans sa voiture, sans savoir pourquoi ni comment. Il se frappait le front, s'arrachait les cheveux et se pinçait les bras pour s'éveiller luimême, dans le cas assez probable où il aurait été le jouet d'un mauvais rêve. Mais non ! il ne dormait pas; il voyait l'heure à sa montre, il lisait le nom des rues à la clarté du gaz, il reconnaissait l'enseigne des boutiques. Qu'avait-il dit? qu'avait-il fait? quelles convenances avait-il violées? quelle maladresse ou quelle sottise avait pu lui attirer ce traitement? Car enfin le doute n'était pas possible : on l'avait bien mis à la porte de chez M. de Villemaurin. Et le contrat de mariage était là, dans sa main! ce contrat, rédigé avec tant de soin, en si bon style, et dont on n'avait pas entendu la lecture!
Il était dans sa cour avant d'avoir trouvé la solution de ce problème. La figure de son concierge lui inspira une idée lumineuse:
— Chinguet! cria-t-il.
Le petit Singuet maigre accourut.
— Chinguet, chent francs pour toi chi tut me dit chinchèrement la vérité; chent coups de pied au derrière chi tu me caches quelquechose!
Singuet le regarda avec surprise et souril timidement.
— Tu chouris, chans cœur! pourquoi chouris-tu? Réponds-moi tout de cliuite!
— Mon Dieu! monsieur, dit le pauvre diable! je me suis permis... Monsieur m'excusera... mais monsieur imite si bien l'accent de fiomagné!
— L'acchent de Romagné! moi, je parle comme Romagné, comme un Oubrgenat?
— Monsieur le sait bien* Voilà huit jours que cela dure.
— Mais non, fouchtra! je ne le chais pas.
Singuet leva les yeux au ciel. Il pensa que son maître était devenu fou. Mais M. L'Ambert, à part ce maudit accent, jouissait de la plénitude de ses facultés. Il questionna ses gens les uns après les autres, et se persuada de son malheur.
— Ah! schélératde porteur d'eau! s'écria-t-il, je chuis chùr qu'il aura fait quelque chotlise! Qu'on le trouve! Ou plutôt non, ch'est moi qui vais le checouer moi-même!
Il courut à pied jusque chez son pensionnaire, grimpa les cinq étages, frappa sans l'éveiller, fit rage, et, en désespoir'de cause, jeta la porte en dedans.
— Mouchu L'Ambert! s'écria Romagné.
— Chacripant d'Oubergnat! répondit le notaire.
— Fouchtra!
— Fouchtra!
Ils étaient à deux de jeu pour écorcher la langue française. Leur discussion se prolongea un bon quart d'heure, dans le plus pur charabia, sans éclaircir le mystère. L'un se plaignait amèrement comme une victime; l'autre se défendait avec éloquence comme un innocent.
— Attends-moi ichi, dit M. L'Ambert pour conclure. Mouchu Bernier, le médecin, me dira, che choir même, che que tu as fait.
Il éveilla M. Bernier et lui conta, dans le style que vous savez, l'emploi de sa soirée. Le docteur se mit à rire et lui dit:
— Voilà bien du bruit pour une bagatelle. Romagné est innocent; ne vous en prenez qu'à vous-même. Vous êtes resté nu-tête à la sortie des Italiens; tout le mal vient de là. Vous êtes enrhumé du cerveau; donc, vous parlez du nezdonc, vous parlez auvergnat. C'est logique. Rentrez chez vous, aspirez de l'aconit, tenezvous les pieds chauds et la tête couverte, et prenez vos précautions contre le coryza; car vous savez désormais ce qui vous pend au nez.
Le malheureux revint a son nôtel en maugréant comme un beau diable.
— Ainchi donc, disait-il tout haut, mes pré-eauchions chont inutiles! J'ai beau loger, nourrir et churveiller che chavoyard de porteur d'eau, il me fera toujours des farches et je cherai cha victime chans pouvoir l'accuger de rien; alors pourquoi tant de dépenches? Ma foi, ta; pis! J'économige cha penchion!
Aussitôt dit, aussitôt fait. Le lendemain, quand le pauvre Romagné, encore tout ahuri, vint pour toucher l'argent de sa semaine, Singuet le mit à la porte et lui annonça qu'on ne voulait plus rien faire, pour lui. Il leva philosophiquement les épaules, en homme qui, sans avoir lu les épîtres d'Horace, pratique par instinct le Nil admirari. Singuet, qui lui voulait du bien, lui demanda ce qu'il comptait faire. Il répondit qu'il allait chercher de l'ouvrage. Aussi bien, cette oisiveté forcée lui pesait depuis longtemps.
M. L'Ambert guérit de son coryza et s'applaudit d'avoir effacé au budget l'article Romagné. Aucun accident ne vint plus interrompre le cours de son bonheur. Il fit la paix avec le marquis de Villemaurin et avec toute sa clientèle du faubourg, qu'il avait un peu scandalisée. Libre de tout souci, il put se livrer sans contrainte au doux penchant qui l'attirait vers la dot de mademoiselle Steimbourg. Heureux L'Ambert! il ou> vrit son cœur à deux battants et montra les sentiments chastes et légitimes dont il était rempli. La belle et savante jeune fille lui tendit la main à l'anglaise, et lui dit:
— C'est une affaire faite. Mes parents sont d'accord avec moi; je vous donnerai mes instructions pour la corbeille. Tâchons d'abréger les formalités pour aller en Italie avant la fin de l'hiver.
L'amour lui prêta des ailes. Il acheta la corbeille sans marchander, livra aux tapissiers l'appartement de madame, commanda une voiture neuve, choisit deux chevaux alezans de la plus rare beauté, et hâta la publication des bans. Le dîner d'adieu qu'il offrit à ses amis est inscrit dans les fastes du café Anglais. Ses maîtresses reçurent ses adieux et ses bracelets avec une émotion contenue.
Les lettres de part annonçaient que la bénédiction nuptiale serait donnée à Saint-Thomasd'Aquin, le 3 mars, à une heure précise. Inutile de dire qu'on avait le maître-autel et toute la mise en scène des mariages de première classe.
Le 3 mars, à huit heures du matin, M. L'Ambert s'éveilla de lui-même, sourit aux premiers rayons d'un beau jour, prit un mouchoir sous son oreiller et le porta à son nez, afin de s'éclaircir les idées. Mais son nez n'était plus là, et le mouchoir de batiste ne rencontra que le vide.
En un bond, le notaire fut devant une glace. Horreur et malédiction comme on dit dans les romans de la vieille école! Il se vit aussi défiguré que s'il revenait encore de Parthenay. Courir à son lit, fouiller les draps et les couver. turcs, explorer la ruelle, sonder les matelas et le sommier, secouer les meubles voisins et mettre toute la chambre en l'air, fut pour lui une affaire de deux minutes.
Rien! rien!
rien!
Il se pendit aux cordons de sonnette, appela ses gens à la rescousse et jura de les chasser tous comme des chiens si ce nez ne se retrouvait . pas.
Inutile menace ! Le nez était plus introuvable que la Chambre de 1810.
Deux heures se passèrent dans l'agitation, le désordre et le bruit. Cependant, le père Steimbourg endossait son habit bleu à boutons d'or; mada'jie Steimbourg, en toilette de gala, surveillait deux femmes de chambre et trois couturières allant, venant, tournant autour de la belle Irma. La blanche fiancée, barbouillée de poudre de riz comme un goujon avant la friture, piétinait d'impatience et malmenait tout le monde avec" une admirable impartialité. Et le maire du dixième arrondissement, sanglé de son écharpe, se promenait dans une grande salle nue en préparant une petite improvisation. E les mendiants privilégiés de Saint-Thomas-d'Aquin donnaient la chasse à deux ou trois intrigants venus on ne sait d'où pour leur disputer la bonne aubaine. Et M. Henri Steimbourg, qui mâchait un cigare depuis une demi-heure dans le fumoir de son père, s'étonnait que le cher Alfred ne fût pas encore au rendez-vous.
Il perdit patience à la fin, courut à la rue de Sartine et trouva son beau-frère futur dans le désespoir et dans les larmes. Que pouvait-il lui dire pour le consoler d'un tel malheur? Il se promena longtemps autour de lui en répétant le mot gacrebleu! Il se fit conter deux fois le fatal événement, et sema la conversation de quelques sentences philosophiques.
Et ce maudit chirurgien qui ne venait pas! Dn l'avait mandé d'urgence; on avait envoyé chez lui, à son hôpital et partout. Il arriva pourtant, et comprit à première vue que Romagné était mort.
— Je m'en doutais, dit le notaire avec un redoublement de larmes. Animal coquin de Romagné!
Ce fut l'oraison funèbre du malheureux Au vergnat.
— Et maintenant, docteur, qu'allons-nous faire?
— On peut trouver un nouveau Romagné et recommencer l'expérience; mais vous avez éprouvé les inconvénients de ce système, et, si vous m'en croyez, nous reviendrons à la méthode indienne.
— La peau du front? Jamais! Mieux vaut encore un nez d'argent.
— On en fait aujourd'hui de bien élégants, dit le docteur.
— Reste à savoir si mademoiselle Irma Steimbourg consentirait à épouser un invalide au nez d'argent? Henri, mon bien bon! que vous en semble?
Henri Steimbourg hochait la tête et ne répondait point. Il alla porter la nouvelle à sa famille et prendre les ordres de mademoiselle Irma. Cette aimable personne eut un mouvement héroïque lorsqu'elle apprit le malheur de son fiancé.
— Croyez-vous donc, s'écria-t-elle, que je l'épouse pour sa figure? A ce compte, j'aurais pris mon cousin Rodrigue, le maître des requêtes: Rodrigue était moins riche, mais beaucoup mieux que lui! J'ai donné ma main à M. L'Ambert parce qu'il est un galant homme, admirablement posé dans le monde, parce que son caractère, son hôtel, ses chevaux, son esprit, son tailleur, tout en lui me plaît et m'enchante. D'ailleurs, ma toilette est faite, et ce mariage manqué me perdrait de réputation. Courons chez lui, ma mère; je le prends tel qu'il est!
Mais, lorsqu'elle fut en présence du mutilé, ce bel enthousiasme ne tint pas. Elle s'évanouit; on la força de revenir à elle, mais ce fut pour fondre en larmes. Au milieu de ses sanglots, on entendit un cri qui semblait partir de l'âme:
— Rodrigue! disait-elle; j'ai été bien injuste envers vous!
M. L'Ambert resta garçon. Il se fit faire un nez d'argent émaillé, et céda son étude au maître clerc. Une petite maison de modeste apparence Hait à vendre auprès des Invalides; il l'acheta. Quelques amis, bons vivants, égayèrent sa retraite. Fl se fît une cave de choix et se consola comme il put. Les plus fines bouteilles du Chàteau-Yquem, les meilleures années du clos Yougeot sont pour lui. Il dit quelquefois en plaisantant:
— J'ai un privilège sur les autres hommes: je puis boire à discrétion sans me rougir le nez!
Il est resté fidèle à sa foi politique, il lit les bons journaux et fait des vœux pour le succès de Chiavone; mais il ne lui envoie pas d'argent. Le plaisir d'entasser des écus lui procure une ivresse assez douce. Il vit entre deux vins et eutre deux millions.
Un soir de la semaine dernière, comme il cheminait doucement, la canne à la main, sur le trottoir de la rue Ëblé, il poussa un cri de surprise. L'ombre de Romagné en costume de velours bleu s'était dressée devant lui!
Était-ce bien réellement une ombre ? Les ombres ne portent rien, et celle-là portait une malle sur des crochets.
— Romagné ! s'écria le notaire.
L'autre leva les yeux et répondit de sa voix lourde et tranquille:
— Bonchoir, mouchu L'Ambert.
— Tu parles! donc, tu vis!
— Chertainement que je vis.
— Misérable!... Mais alors qu'as-tu fait de mon nez?
Tout en parlant ainsi, il l'avait saisi au collet et le secouait d'importance. L'Auvergnat se dégagea non sans peine, et lui dit:
— Laichez-moi donc tranquille! Est-chèque je peux me défendre, fouchtra! Vous voyez bien que je chuis manchot? Quand vous m'avez chupprimé ma penchion, je chuis entré chez un mécanichien, et j'ai eu le bras pinché dans un engrenage.
FIN