L'INTERVIEW AUGMENTÉE DE BENOÎT HAMON - PRÉSIDENTIELLE 2017 - YouTube (1)
*musique*
Salut c'est Hugo, j'espère que vous allez bien.
Je vous souhaite une excellente année 2017, puisque c'est la première vidéo pour la chaîne cette année.
Exceptionnellement, pour des raisons d'agenda, on a dû changer de lieu en dernière minute
mais on sera au Tank pour les prochaines interviews.
Bonjour Benoît Hamon - Bonjour
On sait quoi vous souhaiter pour 2017, évidemment.
Merci d'avoir accepté cette interview. Vous êtes le premier candidat à la primaire citoyenne
ou de la primaire de la gauche, je ne sais pas comment on doit l'appeler,
à venir sur la chaîne pour répondre à mes questions
Une petite présentation pour débuter, pour ceux qui ne vous connaissent peut-être pas encore.
Dans les grandes lignes, vous avez un gros parcours politique.
Vous avez été député européen et surtout, vous avez été ministre durant le quinquennat de François Hollande.
Dès son élection en 2012, vous êtes chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation
Et puis en 2014, vous êtes devenu ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur
mais après seulement 4 mois, vous quittez le gouvernement suite à des désaccords sur la ligne politique,
que vous ne jugez pas assez à gauche, pour faire simple, on va en parler.
et aujourd'hui donc, vous êtes député des Yvelines et conseiller régional d'Île-de-France.
J'ai l'impression, et je pense que ce n'est pas qu'une impression d'ailleurs, que les divergences entre les candidats
de cette primaire de la gauche sont beaucoup plus importantes que celles entre les candidats de la primaire de la droite.
Entre vous et un candidat comme Manuel Valls, il y a quand même un fossé qui s'est creusé ces dernières années.
C'est quoi pour vous la gauche aujourd'hui ? Quelle gauche voulez-vous incarner pour cette élection ?
Déjà pas la gauche du siècle passé en matière de solutions.
Les valeurs restent les mêmes : la justice sociale, l'égalité, la fraternité.
Et à mes yeux, elles ne se déclinent pas de la même manière aujourd'hui
qu'il y a 10, 15, 20 ou à fortiori 30 ou 40 ans.
Je prends un exemple : c'est largement la gauche qui inspire le Conseil National de la Résistance
quand on créa la Sécurité Sociale en 1945.
Pour autant, aujourd'hui, ce qui m'importe, si on veut protéger nos compatriotes, notamment les plus jeunes
qui vont avoir des carrières beaucoup plus hachées que leurs parents ou leurs grands-parents,
Il s'agit de penser la protection sociale qui correspond à ce que va être l'impact de la révolution sur le travail.
On sait que la révolution numérique, c'est une formidable opportunité au sens où
grâce aux progrès des technologies, tout ce dont l'humanité à besoin
en services, en biens, nécessitera moins de travail humain
C'est génial, c'est une très bonne nouvelle, mais ça veut dire aussi que le travail va se raréfier.
Et bien, penser la protection sociale, penser un système qui permet à chacun d'entre nous
d'être protéger contre le risque de la maladie, de pouvoir avoir une retraite,
de pouvoir être protéger s'il y a un accident du travail ou une maladie professionnelle;
ça suppose d'être adapté aux réalités du monde dans lequel on va vivre,
et pas simplement aux schémas qui étaient ceux du 20ème siècle.
Donc voilà, j'essaie de penser les transitions.
Et parmi ces transitions, il y a la question du rapport au travail lié à la révolution numérique,
et l'autre transition qui paraît être la plus importante d'ailleurs, c'est celle de notre système économique.
On a un système économique qui s'accommode de la destruction de l'environnement,
qui s'accommode de continuer à prélever des ressources qui sont de plus en plus rares
et qui pour autant vont devenir de plus en plus précieuses,
qui s'accommode de bousiller l'atmosphère, de nous faire respirer des particules fines
et de provoquer des maladies chroniques, elles explosent en France notamment sous forme de cancers,
Moi je pense que ce n'est plus supportable et acceptable.
Alors, on va parler maintenant de votre programme.
Une première mesure déjà, assez forte de votre côté, qui concerne votre façon de gouverner.
Vous proposez, ce qu'on appelle, enfin ce que vous appelez plutôt, un 49.3 citoyen.
Alors concrètement, ça permet à 1% du corps électoral, soit environ 400 à 500 000 personnes, si j'ai bien compris
- 450 000
- 450 000, à chaque fois par le billet d'une pétition de faire deux choses :
soit d'imposer au Parlement d'examiner une proposition de loi,
soit de suspendre l'application d'une loi adoptée par le Gouvernement avant de la soumettre au référendum.
Ma question elle est très simple. N'y a-t-il pas un risque de bloc et d'impossibilité de mener des réformes,
si à chaque fois 450 000 personnes peuvent suspendre une loi et la soumettre au référendum de cette façon.
- Alors ça se serait croire que 450 000 signatures c'est facile à obtenir.
Ça n'est pas facile.
- Loi travail, il y a eu plus d'un million de signatures.
- Oui mais sur internet. Là,
on parle de pétitions
qui serait aussi sur internet mais où ...
encadrées par des règles strictes
où il faudrait laisser son nom, son prénom, son adresse.
On est donc dans une démarche qui est une démarche plus officielle,
première chose. Cela étant dit, je pense
que sur la loi travail, c'est le bon exemple,
il y aurait probablement eu 450 000 personnes à exiger
que cette loi votée par le Parlement
soit soumise à référendum.
Était-ce illégitime ?
Non, tant la mobilisation était forte
contre cette loi.
Non, tant cette loi était contraire aux engagements pris par le Président de la République lors des élections.
Donc, là oui, c'est exactement à cela que je pense,
à la possibilité pour les citoyens de faire irruption
dans les processus politiques pour dire
entre deux élections
"Vous n'avez pas le droit de faire n'importe quoi".
Moi, je ne me satisfais pas d'un discours qui consiste à dire :
"donnons tous les pouvoirs à une personne
jugée providentielle
et elle nous sauvera du chômage de masse ...
- Pour autant, on peut penser que justement 450 000,
malgré la procédure officielle de votre pétition, ça peut être
assez peu pour faire un référendum.
- Écoutez, moi, je ne le pense pas.
Si au bout du compte,
on devait dans la concertation qui sera celle qu'on aura pendant
le débat démocratique que j'aurais avec les citoyens français,
il apparaît qu'il faille monter le seuil parce qu'il est
de quelques dizaines de milliers de signatures,
pourquoi pas.
Mais ça me semble être correct 1% du corps électoral.
Mais vous verrez, il n'y aura pas tant que ça de textes.
Moi, je n'anticipe pas plus de 3/4 textes et encore au mieux
par quinquennat qui soit soumis par référendum.
- Alors, on va parler d'éducation maintenant. L'université en France est ouverte à tous
mais elle rencontre parfois des difficultés,
notamment les taux d'échec importants en première année de licence.
Selon une note ministérielle qui été publiée là à l'été 2015
seulement 27% des étudiants inscrits en première année, en L1
décrochent leur diplôme 3 ans plus tard.
Est-ce que c'est un problème que vous souhaiterez résoudre ? Et si oui, comment ?
- D'abord là, c'est un problème d'orientation post-bac
À l'évidence, on a un problème d'orientation en fin de 3ème,
on a un problème d'orientation post-bac
et on a un problème d'organisation de notre système universitaire dès lors que
je vais prendre un exemple, les bacs pro sont censés
en poursuite d'études aller vers les BTS
les bacs techno aller vers les IUT.
C'est le cas ? Marginalement.
Et nous sommes aujourd'hui dans un système où nous avons pensé
des poursuites d'études dans l'enseignement supérieur en fonction
de l'organisation de notre système éducatif :
filière technologique, filière professionnelle, filière générale.
Et dans les faits, l'orientation ne fonctionne pas comme celle là.
Ça c'est la première chose. Donc nous avons un problème d'orientation post-bac.
- Par rapport justement aux choix des filières
et à l'orientation des élèves aux lycées,
est-ce que vous proposez un changement du lycée ?
Ou vous le gardez tel qu'il est avec les filières qu'on connaît actuellement ?
- Je pense qu'il faut continuer à avoir une filière technologique, une filière professionnelle et une filière générale.
Mais on va se parler franchement. Au moment où les parents sont amenés à faire un choix,
entre un excellent philosophe ou une excellente auxiliaire de vie.
Ils diront quoi ? Il faut mieux être excellent philosophe que excellente auxiliaire de vie.
Pourquoi ? Parce qu'on n'a pas le même respect à l'égard de l'enseignement professionnel
qu'on l'a vis-à-vis de l'enseignement général.
Et tout notre système éducatif est pensé pour trier
les générations et faire en sorte que l'élite de l'élite
finalement choisisse ces filières générales puis ensuite les grandes écoles
puis ensuite l'agrégation, l'ENA, etc ...
Moi, je pense que ce modèle là est un modèle dangereux.
Pourquoi ? Parce qu'aux inégalités sociales, on rajoute les inégalités scolaires
et les inégalités scolaires renforcent les inégalités sociales.
Donc, moi je veux que ces trois filières qui restent pertinentes
aboutissent à de l'excellence et que cette excellence bénéficie de la même reconnaissance,
de la même gratification.
- Sur votre proposition du revenu universel,
moi j'avais reçu il y a quelques semaines en interview Nathalie Kosciusko-Morizet qui est elle
aussi favorable à un revenu universel
mais un revenu universel qui remplace toutes les aides sociales existantes.
De votre côté justement, qu'en est-il ? Quel montant ? Quelles modalités ?
Personnellement, j'ai 19 ans aujourd'hui.
Si vous êtes élu en mai,
concrètement qu'est-ce que ça voudra dire le revenu universel pour moi ?
- Vous avez plutôt de la chance parce que vous allez vous le percevoir dès l'année 2018.
Moi, je préconise que le revenu universel d'existence qui
vise à être versé à tous les Français au terme du quinquennat,
commence dès le budget 2018, c'est-à-dire dès
l'année 2017 où nous voterons,
à être versé aux 18-25 ans
soit apprentis, travailleurs, étudiants,
en formation ou au chômage,
que le revenu universel qui sera d'un montant de 600 euros
les concerne. Le but c'est quoi ?
C'est qu'on est le pays en Europe probablement qui est le plus dur
à l'égard de sa jeunesse.
Vous êtes jeune et vous n'avez pas d'emploi, vous ne pouvez pas toucher le chômage parce que vous n'avez pas déjà travaillé.
Vous êtes jeune, vous ne pouvez pas avoir accès aux minima sociaux parce qu'on considère
qu'en France, on y est éligible qu'à partir de 25 ans.
Au nom de quoi ?
Il y a que nous qui le disons en France.
Le but du revenu universel ce n'est pas qu'il vienne se substituer, par exemple, à l'assurance maladie.
Vous êtes aujourd'hui remboursé/e/ d'une grippe. Il y a un remboursement sécurité sociale.
Si vous avez une complémentaire, une mutuelle elle vient compléter votre remboursement.
Ça c'est la base. Ça ça restera.
De la même manière, l'objectif du revenu universel c'est
pas qu'il complète toutes vos indemnités chômage.
C'est qu'il vous donne la possibilité d'être plus autonome que vous ne l'êtes aujourd'hui
dans votre vie et notamment autonome par rapport au travail.
Mon objectif c'est quoi ?
Mon objectif c'est de prendre ... En tout cas, d'abord, il y a un constat.
Moi je fais partie de ceux ; il y a ceux qui disent non, ceux qui disent oui ;
moi, je pense que le travail va se raréfier
à raison du fait que la révolution numérique
est en train justement de nous amener à constater que
même dans les métiers de services, même dans les métiers de direction, d'exécution extrêmement pointus,
des algorithmes, des robots, des machines se substituent
ou aux bras des Hommes ou aux cerveaux des Hommes.
Et donc, le travail va se raréfier.
Bonne nouvelle, on va pouvoir être beaucoup plus autonome par rapport au travail,
à la seule condition qu'on ait les moyens d'être autonome
c'est-à-dire qu'on puisse choisir de travailler moins,
qu'on puisse choisir de passer à temps partiel.
Le revenu universel, qu'est-ce que concrètement il va changer ?
Prenez une mère célibataire
qui a un travail, je parlais tout à l'heure, auxiliaire de vie,
elle va gagner 1300 euros par mois.
Elle a à sa charge des enfants, elle a un peu d'allocations familiales,
ça ne lui permet aujourd'hui correctement de
consacrer du temps à l'éducation