4 habitudes étranges, POURQUOI on fait ça ? - Nota Bene
Vous vous demandez comment j'ai remporté cette victoire ? Et bien, dans Warpath,
les cartes sont basées sur de véritables champs de batailles. Lorsque le tank Tiger est arrivé côté
Est, j'ai positionné quinze de mes hommes avec leurs fusils M1 40 ! Cinq, ont rampé, pour avoir
un meilleur point de vue ! Et dix, ont flanqué le tank, pour tirer dessus et faire diversion !
Et c'est là que les alliés ont envoyé leurs tanks A43 ! Pour le prendre à revers ! Ils ont
aligné leurs canons et là... BOOM ! Ennemi terrassé. Une bataille de gagnée,
beaucoup d'autres à venir. Revivez l'Histoire avec Warpath. Vos soldats attendent vos ordres.
Mes chers camarades bien le bonjour,
Dans la vie de tous les jours, on a des petites habitudes, des gestes, des comportements sociaux
que l'on fait sans même y penser ! C'est tellement ancré dans nous, dans notre culture,
dans nos coutumes, qu'on a oublié pourquoi on le fait ! Pourquoi on se serre la main ? Je veux dire
quand on n'est pas en pleine épidémie. Pourquoi on trinque ? Pourquoi on se dit merde pour se
souhaiter bonne chance ? Je vous propose aujourd'hui de répondre à ces questions,
comme ça la prochaine fois que vous retournerez dans un concert, vous pourrez faire chier votre
voisin en lui expliquant pourquoi tout le monde applaudit à la fin de la chanson !
Pourquoi trinque-t-on ?
Vous êtes avec Robert quand Georges se pointe et vous annonce qu'il a gagné au Kéno ! Ni une,
ni deux, Georges paie sa tournée et après avoir rempli vos verres de coca sans sucre,
vous levez glorieusement votre pinte vers celle des autres. Les verres s'entrechoquent,
vous vous regardez droit dans les yeux et vous balancez fièrement un petit “A
la tienne Etienne!”. Ce qui est étrange parce qu'il n'y a que
Georges et Robert...bref...d'où vient cette tradition bizarre ?
Selon des dizaines de pages sur internet, au Moyen Âge les seigneurs avides de pouvoir
pouvaient chercher à s'assassiner. Le plus pratique pour ça c'était
de verser du poison dans le verre de sa victime. Par crainte d'un empoisonnement,
les cibles potentielles frappaient les verres l'un contre l'autre, bien fort pour que leurs contenus
se mélangent un peu. Pas besoin de renouveler la vaisselle car c'est bien connu, à l'époque,
les verres étaient très durs, en fer ou en bois. On en profite pour regarder l'autre dans les yeux,
afin d'y déceler éventuellement la peur s'il est venu avec de mauvaises intentions.
Ça c'est la version que l'on trouve vraiment partout. Mais désolé si vous avez déjà utilisé
cette histoire pour vous la péter en soirée après avoir trinqué parce que...C'est n'importe quoi
! Pour commencer les verres de l'époque n'étaient pas de rudes ustensiles de bois ou de métal. Je
vous mets en lien le site de l'association Le Verre Historique, vous verrez que Gallo-romain,
Viking, Mérovingien ou Franc, c'est pareil : quand on est riche, on a les moyens de s'acheter des
verres en verre, très fins et travaillés. Il y a aussi des coupes en métal ouvragées, ou en verre
serti dans un écrin de métal précieux. Mais dans tous les cas, on ne va pas s'amuser à les frapper
comme des bourrins ! Concernant l'arme du crime, le poison, il requiert une certaine dose pour
être fatal. Si vous empoisonnez le verre de votre ennemi mais qu'il vous en fait boire une infime
partie...lui il meurt, et vous vous en sortez en étant malade quelques jours dans le pire des cas.
Donc
• 1. on est riche, avec des raisons politiques d'empoisonner quelqu'un,
mais les verres sont trop précieux ; • 2. on est moins fortuné, on a la
grosse coupe en bois qu'il faut mais...pourquoi tuer le voisin, qui est aussi pauvre que moi ?
• 3. Si on ne mélange pas les verres à 50/50, ça ne change rien.
En réalité, la tradition de trinquer remonte probablement à l'Antiquité. La libation,
c'est le fait de répandre un liquide pour faire une offrande à une divinité. De même qu'on offre
aux dieux les premiers fruits ou les premières céréales pour garantir l'abondance des champs,
on verse un peu de son vin, en l'honneur des dieux ou en hommage au mort.
C'est aussi une façon de marquer le coup ! Donc quand on trinque,
on marque surtout le coup pour un événement exceptionnel ! A croire que pour certains,
chaque jour est exceptionnel mais après tout, on ne va pas leur reprocher de s'amuser !
Pourquoi serre-t-on la main ?
On reste dans les idées reçues : si on se sert la main, cela viendrait de l'antiquité,
une époque barbare où les gens se faisaient tout le temps la guerre. Les rares fois où
ils n'étaient pas chauds pour s'étriper, ils avançaient main vide, voire se prenaient les
mains pour bien signifier qu'ils n'avaient pas d'arme, et donc pas d'intention mauvaise.
Alors attention, cette hypothèse n'est pas à rejeter mais...on a rien qui le prouve !
En effet, on trouve bien les premières représentations de poignées de mains sur
des stèles de l'Antiquité grecque, 500 ans avant notre ère. Mais c'est un geste très fort, voire
politique : on scelle ainsi une alliance, ou on prête allégeance à quelqu'un. Il y a donc un lien
qui se crée, ce n'est pas du tout la neutralité du “je ne te veux pas de mal, je ne suis pas armé”.
En fait, c'est bien plus positif : “je te veux du bien, je serais ton allié, ton chef ou ton
serviteur”. Pour le sociologue Emmanuel Désveaux, on se met d'égal à égal. Avec la poignée de main,
on est entre la distance et le contact : on ne va pas s'embrasser, se serrer dans les bras, ni se
regarder de loin. On établit un point de contact, suffisamment poli et franc : au cœur de la paume.
Et le fait de créer ce lien, certains n'hésitent pas à le faire remonter très
loin. C'est le cas par exemple de Noam Sobel, du Weizmann Institute of Science,
qui le lierait à un mélange des odeurs corporelles comme le pratiquent de nombreux mammifères. En
partageant son odeur, on s'identifie à un même groupe, à une même “meute”.
Pourquoi pas ! Reste à expliquer pourquoi, si tous les hommes procédaient ainsi,
ce qui n'est pas le cas, certaines civilisations ont cessé d'utiliser la poignée de main. Au
Japon par exemple, on pratique l'Ojigi, une courbette respectueuse, sans contact physique.
Et après l'année 2020, c'est surement un truc qui va se répandre en Europe...
Pourquoi applaudit-on à la fin d'un numéro ?
Aujourd'hui, l'applaudissement c'est plutôt un truc répandu : on l'emploie une fois
qu'une œuvre est achevée, qu'il s'agisse d'une pièce de théâtre, d'un discours,
voire même de l'atterrissage d'un avion parce que quand même,
c'était pas gagné avec un pilote qui a pas réussi à éviter deux turbulences.
En musique classique, ce n'est qu'au 19e siècle que Richard Wagner
a imposé le silence dans ses concerts. Et c'était le premier à le faire ! Même là,
la mode ne s'est pas imposée partout. Par exemple, à l'Opéra il n'est pas considéré
comme grossier d'applaudir entre chaque morceau du concert. Et dans toute la musique non-classique,
c'est aussi le cas. Certains applaudissements continuent, parfois, d'interrompre une pièce de
théâtre, voire de rythmer littéralement chaque phrase d'un meeting politique.
Pour comprendre comment on en est arrivé là, il faut remonter à l'antiquité gréco-romaine.
A cette époque, l'applaudissement se déploie dans deux domaines bien précis.
D'abord, dans le théâtre grec. A la fin d'une pièce, durant l'épilogue,
le cantor s'adresse directement au public : “Vos valete, et plaudite, cives !” . Traduction : “
Allez en paix, et applaudissez, citoyens !” Plaudite est l'équivalent du The End,
ou La Fin, qu'on peut voir dans certains films du cinéma. C'est un repère pour le spectateur.
Ensuite, on voit aussi ces applaudissements dans la politique romaine quand la coutume
arrive à Rome, avec par exemple des poètes comme Térence,
les politiciens saisissent très vite son intérêt. Les applaudissements deviennent
un véritable outil pour mesurer l'assentiment d'un public. Pour l'historien Gregory Aldrete,
"On pourrait presque y voir une version antique du sondage. C'est le moyen d'évaluer les gens,
de sonder leurs sentiments". L'homme politique devient un véritable applaudimètre vivant,
capable de sentir l'humeur de la foule et d'adapter son programme en fonction.
Si personne applaudit, c'est que visiblement tu as dis une connerie.
Et si ça continue durant toute ta carrière, c'est probablement que tu es Manuel Valls !
On trouve aussi de nombreuses références à cette manifestation de joie dans l'Ancien Testament,
sous la forme du verbe taqà, qui signifie souffler ou sonner dans une trompe, applaudir, frapper,
enfoncer, donner un coup, aussi bien sur les mains que sur un clou ou une arme.
Finalement c'est faire toutes sortes de bruit qui traduisent spontanément la joie. Dans le domaine,
la Bible est très forte, puisqu'elle parle même d'arbres et de fleuves qui “battent des mains”.
Autant dans Pokémon je visualise le truc, autant là…
Dans de nombreuses autres cultures, on bat du pied en rythme, ou on frappe les tables du poing
ou du plat de la main. L'applaudissement peut également accompagner la danse,
le chant et la musique. Mais avant tout ça et bien... on ne sait pas.
Et non, je ne suis pas parvenu à trouver une base solidement sourcée et finalement
ce n'est pas très grave, ça montre qu'en Histoire, on ne peut pas tout
savoir non plus. Mais une interprétation assez répandue c'est que c'est une forme
très spontanée, animale et communautaire, de manifestation de l'enthousiasme, de la joie.
Encore une fois : je n'ai pas trouvé de source solide pour confirmer ça. Cela dit,
cherchez quelques vidéos de singes qui battent des mains en cadences,
et même de mammifères dépourvus de mains, comme les chiens, vaches,
moutons, qui sautent et bondissent de joie...ça paraît assez plausible.
Pourquoi dire "Merde" pour souhaiter bonne chance ?
Pour cette dernière coutume, on reste dans le monde du spectacle, pour une explication
beaucoup plus facile. C'est une tradition récente : pour souhaiter bonne chance,
on dit parfois “merde”. Merde pour ton bac, tes exams, ton entretien d'embauche,
merde pour que cette vidéo fasse 10 millions de vues et que toi qui regarde, tu t'abonnes !
Pour le coup, l'explication de cette expression est plutôt connue : avant,
elle ne s'appliquait qu'au monde du théâtre. Pour souhaiter bonne chance à un comédien
ou à un metteur en scène, on lui souhaitait “beaucoup de merde”. En effet à l'époque les
personnes aisées se rendaient à la comédie en calèche. Durant toute la représentation,
les chevaux attendaient dehors, et crottaient sur la chaussée. Du coup à la fin de la pièce,
s'il y avait beaucoup d'excréments, c'est que beaucoup de calèches
étaient venues : le public était donc au rendez-vous, et la pièce était un succès.
L'expression s'est raccourcie en “merde!” et puis elle s'est banalisée dans tous les
domaines de la vie professionnelle, ce qui n'a aucun sens. Ou alors,
il faudrait aller passer son bac en calèche. Je suis plutôt pour !
Pour votre information sachez que nos voisins anglais ne disent pas “merde” pour souhaiter
bonne chance, mais “break a leg”, littérallement : “casse-toi une jambe”. Sympa vous me direz
mais là aussi ça vient du théâtre, et ça a exactement le même sens : une des hypothèses
est qu'à la fin de la représentation, le comédien salue son public par une
révérence. Si le succès est immense, il salue beaucoup, au point de se casser la jambe !
Molière, le jackass du XVIIe siècle, on l'avait pas vu venir !
Conclusion - I
Évidemment il y a plein d'autres coutumes que l'on pourrait examiner à la loupe et un autre
épisode dans la même veine va suivre. On a déjà notre petite sélection mais si vous voulez qu'on
fasse des recherches, n'hésitez pas à balancer vos propositions en commentaire. En attendant,
on peut déjà faire une première conclusion : si on trinque, ce n'est pas par peur de
l'empoisonnement. Si on se serre la main, ce n'est pas qu'on craint d'être attaqué. De même qu'on
applaudit pas parce qu'on nous y oblige, et on ne souhaite pas de la merde à l'autre par méchanceté.
Cette première fournée d'explications nous montre plutôt que, derrière chacun de ces gestes,
il y a souvent des valeurs et des coutumes bienveillantes : de confiance, de convivialité,
de joie. Et je trouve ça plutôt réconfortant de se dire que finalement, très tôt dans notre histoire,
et même notre préhistoire, on mettait en scène des gestes pour signifier l'appartenance à
quelque chose de commun...et de positif ! Sur ce, merci à tous d'avoir suivi l'épisode,
n'oubliez pas le petit pouce qui fait plaisir. Merci à Jean de Boisséson avec
qui j'ai préparé l'émission et à très vite sur Nota Bene pour de nouveaux épisodes ! Salut !