Retraites : circulez, il n'y a plus rien à voir ! (1)
Il y a une contestation sociale qui existe sur une réforme,
mais çe ne veut pas dire que tout doit s'arrêter.
C'est le début de la fin pour Emmanuel Macron.
Il faut mettre, on appelle ça sur pause,
il faut mettre en suspens la mesure des 64 ans.
Que s'est-il passé à gauche pour qu'on confonde casseurs et policiers ?
Macron qui parle aux petits enfants et fait des ronds sur l'eau,
Borne qui va recevoir l'intersyndicale, le congrès houleux de la CGT
et la gauche accusée de préférer les casseurs à la police.
C'est le sommaire du numéro 35 du Bourbon de Serge
Quand j'étais gamin, j'étais un lecteur assidu de Pif magazine,
un hebdo pour les enfants.
Parce que dedans, il y avait un gadget.
Et puis surtout, une bande dessinée formidable :
Rahan, le fils des âges farouches.
Un homme préhistorique aux allures de Spartacus avant l'heure.
C'était un peu normal.
Pif, à l'époque, était publié par le Parti communiste.
Aujourd'hui il appartient à un ancien ministre de Nicolas Sarkozy.
Imaginez donc mon impatience à l'idée de découvrir l'interview d'Emmanuel Macron
dans ce magazine.
Je voyais déjà le président de la République en slip panthère,
bodybuildé à souhait comme mon héros des cavernes,
pousser son cri de ralliement :
49-3 !
Celui qui a mis en déroute le mammouth laineux de la Nupes.
Surtout, je me demandais si, comme son avatar de papier,
Emmanuel Macron allait faire tourner son coutelas d'ivoire
à la façon d'une roulette de casino pour choisir sa prochaine aventure :
le retrait de la réforme, le référendum ou bien un nouveau projet de loi.
Je dois avouer que j'ai été déçu.
Avec son petit costume étriqué, Emmanuel Macron aurait dû choisir Picsou magazine.
Encore un rêve de gosse brisé.
Dans l'interview, le chef de l'État répond donc aux questions des enfants.
Ce qui à tout prendre est moins dangereux que d'échanger avec un piquet de grève.
"Pouvez-vous quitter votre poste en plein mandat,
et comment ça se passerait si vous le quittiez ?", lui demande la petite Mélina
qui remplacerait avantageusement certains journalistes du 13 heures.
"Si tu le quittes, c'est qu'il peut y avoir une énorme crise et que tu es empêché",
répond Emmanuel Macron.
"À ce moment-là, tu remets ton mandat aux Français, et le peuple vote à nouveau".
En voilà une idée qu'elle est bonne.
Mais visiblement, Emmanuel Macron n'en est pas encore parvenu à ce niveau de réflexion.
Il était aujourd'hui à Savines-le-Lac, dans les Hautes-Alpes.
Pour parler de l'eau.
La commune est en effet à deux pas du lac de Serre-Ponçon.
Oui, alors, le comité d'accueil, là,
a commencé de nouveau à taper sur les voitures,
à se faire entendre.
Il y a une contestation sociale qui existe sur une réforme
mais ça ne veut pas dire que tout doit s'arrêter.
J'ai le sentiment qu'il y a eu un moment de clarification politique
qui a donné lieu à un vote à l'Assemblée nationale.
Après qu'il y ait des commentaires, c'est une chose,
mais… ça a été clarifié au moment du vote sur la motion de censure.
Si vous n'avez pas compris le message de ce double exercice de communication,
je vous le décrypte : le président de la République est passé à autre chose.
La séquence des retraites, c'est fini.
Au moins pour lui.
Mais voilà, jusqu'au 14 avril, le suspense demeure.
C'est à cette date que le Conseil constitutionnel rendra sa décision
sur la réforme des retraites.
Peut-être trouvera-t-on la porte de sortie
d'une situation politique qui se dégrade de jour en jour.
La mobilisation, elle, ne faiblit pas.
Selon les syndicats, les cortèges de mardi
n'ont rassemblé que deux millions de manifestants.
Soit un million et demi de personnes en moins que le 23 mars.
Mais ce chiffre reste dans la moyenne des journées de mobilisation.
Il est par exemple supérieur aux deux journées de manifestations
qui ont précédé le 23 mars.
Conclure à un reflux du mouvement est par conséquent prématuré.
Hier matin, à l'Assemblée, on croyait toujours à la victoire.
C'est le début de la fin pour Emmanuel Macron
parce que jusque-là il n'a pas voulu répondre
mais il continue de foncer tête baissée, droit dans le mur.
Et plus ça va, plus il s'en rapproche.
On n'a jamais été aussi proche de la fin.
Ce que je constate c'est que les gens restent tout aussi mobilisés
et que, au contraire, l'intensité de l'opposition augmente chaque semaine.
Pour l'instant ils n'ont pas réussi leur objectif au niveau du gouvernement
et les syndicats, leur unité a contribué quand même
a entretenir un degré de mobilisation exceptionnel,
qu'on n'avait jamais vu depuis 50 ans dans le pays.
Cette unité syndicale pourrait toutefois connaître des soubresauts.
Depuis lundi, la CGT est en congrès à Clermont-Ferrand.
Et d'emblée, Philippe Martinez, qui ne se représente pas au poste de secrétaire général,
a essuyé un revers.
Les délégués ont rejeté le rapport d'activité de la direction sortante
par 50,32 % des suffrages exprimés.
Qui plus est, la candidate poussée par Philippe Martinez pour lui succéder, Marie Buisson,
est maintenant menacée par deux autres candidatures plus radicales.
Enfin, Philippe Martinez a été vivement critiqué
pour avoir soutenu la proposition de médiation formulée par Laurent Berger.
Il faut mettre, on appelle ça sur pause,
il faut mettre en suspens la mesure des 64 ans.
Est-ce qu'il faut prendre un mois, un mois et demi,
pour demander à une, deux, trois personnes
de faire de la médiation, de la conciliation,
d'aller voir les différentes parties en disant : “Vous voulez quoi ?
Vous voulez quoi pour le travail ?”.
Et ensuite on se met autour de la table
et on regarde sur la question du travail, des retraites,
sur quoi il peut y avoir, ou pas, un compromis.
Cette proposition a été immédiatement rejetée par Olivier Véran,
le porte-parole du gouvernement.
On n'a pas forcément besoin de médiation pour se parler.
On peut se parler directement.
le président de la République l'a dit, il est prêt à recevoir l'intersyndicale
dès lors, parce que nous respectons nos institutions,
que le Conseil constitutionnel se sera prononcé
sur la conformité de notre texte de loi.
Ensuite la Première ministre se tient à disposition des syndicats
pour les recevoir très directement pour pouvoir parler.
Hier soir, on a appris qu'Élisabeth Borne devrait recevoir l'intersyndicale mercredi prochain.
La veille de la nouvelle journée de manifestations.
De quoi vont parler l'intersyndicale et la Première ministre ?
Si l'idée c'est de réécrire un texte de loi qui a été adopté au Parlement,
je ne crois pas que ce soit l'objectif.
Mais dans les conditions d'application de la réforme, il y a plein de choses.
Il y a des discussions de branches,
il y a des modalités d'application par décret de la réforme de retraites
qui doivent être discutées.
Ça, c'est la version de l'exécutif.
À gauche, on doute que l'échange s'en tienne à ce cadre.
Le gouvernement, aujourd'hui, essaie de prendre des initiatives.
On voit que la semaine prochaine il y aura peut-être des propositions de rencontre.
Alors pourquoi pas dans un conflit social,
mais honnêtement à ce stade,
si les rencontres ont pour seule ambition de mettre une scène qu'il y a une rencontre
mais que ce qui est dit c'est : “on peut parler de tout
sauf de ce qui est le point nodal de la mobilisation”,
j'ai peur du cocktail un peu détonnant quoi.
Je ne vois pas une organisation syndicale dire :
“Ah bah écoutez finalement, après 11 semaines de mobilisation,
un pays en état de haute turbulence, un déni démocratique,
bah finalement on cède.”
Ca je ne crois pas que ce soit possible.
En attendant, c'est la guerre de tranchées.
Mardi, la séance des questions au gouvernement a tourné au duel d'artillerie.
Après avoir annoncé qu'il allait proposer la dissolution
du réseau associatif “Les soulèvements de la terre”,
organisateur du rassemblement de Sainte-Soline,
Gérald Darmanin a instruit le procès de la gauche.
Que s'est-il passé à gauche pour qu'on confonde casseurs et policiers ?
Que s'est-il passé à gauche pour qu'on ne respecte plus l'uniforme de la République ?
Que s'est-il passé à gauche, madame la députée,
pour qu'on oublie à ce point Clémenceau, Chevènement,
Cazeneuve, Valls, Mitterrand,
Badinter ?
Badinter n'a jamais été ministre de l'Intérieur.
Quant à Cazeneuve ou Valls, on se demande s'ils ont été un jour de gauche.
Enfin, le ministre de l'Intérieur François Mitterrand
a laissé un souvenir contrasté.
Le futur président était alors partisan de l'Algérie française.
Devenu Garde des sceaux, François Mitterrand fut l'un de ceux
qui envoyèrent le militant communiste Fernand Iveton à l'échafaud.
Alors même que celui-ci n'avait pas de sang sur les mains.
Bien sûr, lors de cette séance de questions au gouvernement,
on a évoqué les dérapages des forces de l'ordre.
Ces dernières s'illustraient au même moment dans la manifestation parisienne.
Je vous ai fait un petit résumé en images.
Les charges se terminent maintenant
par des affrontements au corps-à-corps avec les manifestants.
Percuté par un policier, ce manifestant reste au sol, inanimé.
La BRAV-M, plutôt discrète depuis qu'une pétition proche des 200 000 signatures
réclame sa dissolution sur le site de l'Assemblée nationale,
était aussi de la partie.
Revenons dans l'hémicycle mardi.
C'est le député LFI Jean-François Coulomme qui interpelle la Première ministre :
Conseil de l'Europe, Ligue des droits de l'homme,
Défenseur des droits, Amnesty International,
le Parlement belge, jusqu'au Financial Times,
tous les observateurs de ce cauchemar que vous avez provoqué
dénoncent le sinistre théâtre que vous mettez en scène
au prétexte mensonger de faire le bonheur des Français contre leur gré.
Une police qui roule à moto sur un manifestant à terre,
qui matraque les crânes, qui gaze à bout portant une députée en écharpe.
La BRAV-M qui tire sur une mère de famille et lui détruit la main,
qui tire sur un syndicaliste et lui arrache un oeil,
qui violente sexuellement des femmes nassées,
qui dégoupille 4000 grenades au TNT à la face de nos jeunes révoltés
par votre corruption écocidaire.
Des comas, et après monsieur Darmanin ?
Et la justice ? Sur injonction de son ministre,
elle est sommée d'infliger une réponse pénale rapide,
se mettant ainsi au service d'interpellations et de gardes à vue arbitraires pour dissuader
mais dont les victimes ressortent majoritairement exemptes de motif de poursuite.
Et après, monsieur Dupond-Moretti ?
Le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, répond :
Monsieur le député, il y a de ça quelques mois, quelques années,
c'était après le Bataclan,
on voulait embrasser les flics.
Aujourd'hui, vous vomissez dessus.
Voilà la réalité.
Je veux ici rappeler que monsieur Jean-Luc Mélenchon, votre leader maximo,
a été condamné définitivement pour avoir exercé des violences sur des policiers
et sur un procureur de la République.
Voilà, monsieur le député, la réalité.
Et dans le code de procédure pénal, vous pourrez lire par exemple,
que les gardes à vue que vous fustigez,
sont en réalité une mesure coercitive prise par un officier de police judiciaire
sous le contrôle d'un procureur chaque fois qu'il y a une raison plausible
de suspecter qu'une infraction a été commise.
Ce n'est pas plus compliqué que cela.
Et puis il y a Olivier Dussopt.
Le renégat socialiste ne manque jamais une occasion
de dresser le réquisitoire de son ancien parti.
Comme s'il n'avait pas donné assez de gages à ses nouveaux employeurs.
Il répond ici à Christine Pires-Beaune, députée socialiste du Puy-de-Dôme.
Vous êtes en réalité en échec,
parce que votre stratégie est liée à celle de monsieur Mélenchon.
Madame la députée,
vous appartenez à un parti qui est tellement inféodé à monsieur Mélenchon
que vous en êtes réduite à demander à vos propres candidats de se retirer
du deuxième tour des élections législatives dans l'Ariège.
C'est la démonstration que vous ne pensez plus,
que vous ne décidez plus, que vous n'avez plus de souveraineté,
de capacité à penser votre propre avenir.
Je me souviens d'une interview de Bernard Cazeneuve
qui avait dit que finalement le Parti socialiste