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Marcel Proust. Sur la Lecture ; Un Baiser & La madeleine de Proust., 03. Marcel Proust. Sur la Lecture. Partie 3/9.

03. Marcel Proust. Sur la Lecture. Partie 3/9.

Je n'étais pas depuis bien longtemps à lire dans ma chambre qu'il fallait aller au parc, à un kilomètre du village (1). Mais, après le jeu obligé, j'abrégeais la fin du goûter apporté dans des paniers et distribué aux enfants au bord de la rivière, sur l'herbe où le livre avait été posé avec défense de le prendre encore. Un peu plus loin, dans certains fonds assez incultes et assez mystérieux du parc, la rivière cessait d'être une eau rectiligne et artificielle, couverte de cygnes et bordées d'allées où souriaient des statues, et par moment sautelante de carpes, se précipitait, passait à une allure rapide la clôture du parc, devenait une rivière dans le sens géographique du mot – une rivière qui devait avoir un nom – et ne tardait pas à s'épandre (la même vraiment qu'entre les statues et sous les cygnes) entre des herbages où dormaient des bœufs et dont elle noyait les boutons d'or, sortes de prairies rendues par elle assez marécageuses et qui, tenant d'un côté au village par des tours informes, restes, disait-on, du moyen âge, joignaient de l'autre, par des chemins montants d'églantiers et d'aubépines, la « nature » qui s'étendait à l'infini, des villages qui avaient d'autres noms, l'inconnu. Je laissais les autres finir de goûter dans le bas du parc, au bord des cygnes, et je montais en courant dans le labyrinthe, jusqu'à telle charmille où je m'asseyais, introuvable, adossé aux noisetiers taillés, apercevant le plant d'asperges, les bordures de fraisiers, le bassin où, certains jours, les chevaux faisaient monter l'eau en tournant, la porte blanche qui était la « fin du parc » en haut, et au delà, les champs de bluets et de coquelicots. Dans cette charmille le silence était profond, le risque d'être découvert presque nul, la sécurité rendue plus douce par les cris éloignés qui d'en bas m'appelaient en vain, quelquefois même se rapprochaient, montaient les premiers talus, cherchant partout, puis s'en retournaient, n'ayant pas trouvé; alors plus aucun bruit ; seul de temps en temps le son d'or des cloches qui au loin, par delà les plaines, semblait tinter derrière le ciel bleu, aurait pu m'avertir de l'heure qui passait ; mais surpris par sa douceur et troublé par le silence plus profond qui le suivait, je n'étais jamais sûr du nombre des coups. Ce n'étaient pas les cloches tonnantes qu'on entendait en rentrant dans le village – quand on approchait de l'église qui de près avait repris sa taille haute et raide, dressant sur le bleu du soir son capuchon d'ardoise ponctué de corbeaux – faire voler le son en éclats sur la place, « pour les biens de la terre ». Elles n'arrivaient au bout du parc que faibles et douces et ne s'adressant pas à moi, mais à toute la campagne, à tous les villages, aux paysans isolés dans leur champ, elles ne me forçaient nullement à lever la tête, elles passaient près de moi, portant l'heure aux pays lointains, sans me voir, sans me connaître et sans me déranger.

Et quelquefois à la maison, dans mon lit, longtemps après le dîner, les dernières heures de la soirée abritaient aussi ma lecture, mais cela seulement les jours où j'étais arrivé aux derniers chapitres d'un livre, où il n'y avait plus beaucoup à lire pour arriver à la fin. Alors, risquant d'être puni si j'étais découvert, et l'insomnie qui, le livre fini, se prolongerait peut-être toute la nuit, dès que mes parents étaient couchés je rallumais ma bougie; tandis que, dans la rue toute proche, entre la maison de l'armurier et la poste, baignées de silence, il y avait plein d'étoiles au ciel sombre et pourtant bleu, et qu'à gauche, sur la ruelle exhaussée où commençait en tournant son ascension surélevée, on sentait veiller, monstrueuse et noire, l'abside de l'église dont les sculptures la nuit ne dormaient pas, l'église villageoise et pourtant historique, séjour magique du Bon Dieu, de la brioche bénite, des saints multicolores et des dames des châteaux qui, les jours de fête, faisant, quand elles traversaient le marché, piailler les poules et regarder les commères, venaient à la messe « dans leurs attelages », non sans acheter au retour, chez le pâtissier de la place, juste après avoir quitté l'ombre du porche où les fidèles en poussant la porte semaient les rubis errants de la nef, quelques-uns de ces gâteaux en forme de tours, protégés du soleil par un store, - « manqués », « saint-honorés » et « gênoises », - dont l'odeur oisive et sucrée est restée mêlée pour moi aux cloches de la grand'messe et à la gaieté des dimanches.

Puis la dernière page était lue, le livre était fini. Il fallait arrêter la course éperdue des yeux et de la voix qui suivait sans bruit, s'arrêtant seulement pour reprendre haleine, dans un soupir profond. Alors, afin de donner aux tumultes depuis trop longtemps déchaînés en moi pour pouvoir se calmer ainsi d'autres mouvements à diriger, je me levais, je me mettais à marcher le long de mon lit, les yeux encore fixés à quelque point qu'on aurait vainement cherché dans la chambre ou dehors, car il n'était situé qu'à une distance d'âme, une de ces distances qui ne se mesurent pas par mètres et par lieues, comme les autres, et qu'il est d'ailleurs impossible de confondre avec elles quand on regarde les yeux « lointains » de ceux qui pensent « à autre chose ». Alors, quoi ? ce livre, ce n'était que cela ? Ces êtres à qui on avait donné plus de son attention et de sa tendresse qu'aux gens de la vie, n'osant pas toujours avouer à quel point on les aimait, et même quand nos parents nous trouvaient en train de lire et avaient l'air de sourire de notre émotion, fermant le livre avec une indifférence affectée ou un ennui feint ; ces gens pour qui on avait haleté et sangloté, on ne les verrait plus jamais, on ne saurait plus rien d'eux. Déjà, depuis quelques pages, l'auteur, dans le cruel « Épilogue », avait, eu soin de les « espacer » avec une indifférence incroyable pour qui savait l'intérêt avec lequel il les avait suivis jusque-là pas à pas. L'emploi de chaque heure de leur vie nous avait été narrée. Puis subitement : « Vingt ans après ces événements on pouvait rencontrer dans les rues de Fougères (2) un vieillard encore droit, etc. » Et le mariage dont deux volumes avaient été employés à nous faire entrevoir la possibilité délicieuse, nous effrayant puis nous réjouissant de chaque obstacle dressé puis aplani, c'est par une phrase incidente d'un personnage secondaire que nous apprenions qu'il avait été célébré, nous ne savions pas au juste quand, dans cet étonnant épilogue écrit, semblait-il, du haut du ciel par une personne indifférente à nos passions d'un jour, qui s'était substituée à l'auteur. On aurait tant voulu que le livre continuât, et si c'était impossible avoir d'autres renseignements sur tous ces personnages, apprendre maintenant quelque chose de leur vie, employer la nôtre à des choses qui ne soient pas tout à fait étrangères à l'amour qu'ils nous avaient inspiré et dont l'objet nous faisait tout à coup défaut, ne pas avoir aimé en vain, pour une heure, des êtres qui demain ne seraient plus qu'un nom sur une page oubliée, dans un livre sans rapport avec la vie et sur la valeur duquel nous nous étions bien mépris puisque son lot ici-bas, nous le comprenions maintenant et nos parents nous l'apprenaient au besoin d'une phrase dédaigneuse, n'était nullement, comme nous l'avions cru, de contenir l'univers et la destinée, mais d'occuper une place fort étroite dans la bibliothèque du notaire, entre les fastes sans prestige du Journal de Modes illustré et de la Géographie d'Eure-et-Loir.

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03. Marcel Proust. Sur la Lecture. Partie 3/9. 03. Marcel Proust. Über das Lesen. Teil 3/9. 03. Marcel Proust. On Reading. Part 3/9. 03. Marcel Proust. Sobre a leitura. Parte 3/9. 03. Marcel Proust. Om att läsa. Del 3/9.

Je n’étais pas depuis bien longtemps à lire dans ma chambre qu’il fallait aller au parc, à un kilomètre du village (1). I hadn't read in my room for a long time that I had to go to the park, one kilometer from the village (1). Mais, après le jeu obligé, j’abrégeais la fin du goûter apporté dans des paniers et distribué aux enfants au bord de la rivière, sur l’herbe où le livre avait été posé avec défense de le prendre encore. |||||I abbreviated|the|||||||||||||||||||||||||||||| |||juego||||||merienda||||cestas||||||||||||||||||||||| But, after the obligatory game, I shortened the end of the snack brought in baskets and distributed to the children at the edge of the river, on the grass where the book had been placed with prohibition to take it again. Un peu plus loin, dans certains fonds assez incultes et assez mystérieux du parc, la rivière cessait d’être une eau rectiligne et artificielle, couverte de cygnes et bordées d’allées où souriaient des statues, et par moment sautelante de carpes, se précipitait, passait à une allure rapide la clôture du parc, devenait une rivière dans le sens géographique du mot – une rivière qui devait avoir un nom – et ne tardait pas à s’épandre (la même vraiment qu’entre les statues et sous les cygnes) entre des herbages où dormaient des bœufs et dont elle noyait les boutons d’or, sortes de prairies rendues par elle assez marécageuses et qui, tenant d’un côté au village par des tours informes, restes, disait-on, du moyen âge, joignaient de l’autre, par des chemins montants d’églantiers et d’aubépines, la « nature » qui s’étendait à l’infini, des villages qui avaient d’autres noms, l’inconnu. ||||||||uncultivated|||||||river||||||||||swans||bordered|||||||||bubbling||carps|||||||||fence||||||||||||||||||||||||spread|||||||||||||||||||||drowned|||||||||||swampy|||||||||||informs|||||||joined||||||amounts|of wild roses||||||||||||||| ||||||fondo||||||||||||||||||||||||||||||sautelante||||||||senderos|||clo|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||noyait||botones|||||||||marshlandas||que||||||||||||||||se unían|||||||matorrales||||||||||||||| A little further on, in certain rather uncultivated and mysterious parts of the park, the river ceased to be a straight and artificial water, covered with swans and lined with paths where statues smiled, and at times leaping with carp, rushing, at a rapid pace, past the park fence, became a river in the geographical sense of the word - a river that must have had a name - and soon spread out (the same way it did between the statues and under the swans) between grasslands where oxen slept and whose buttercups it drowned, The meadows, which she had rendered quite marshy, held onto the village on one side by shapeless towers - remnants, it was said, of the Middle Ages - and on the other, by rising paths of rosehips and hawthorns, joined "nature", which stretched to infinity, to villages with other names, the unknown. Je laissais les autres finir de goûter dans le bas du parc, au bord des cygnes, et je montais en courant dans le labyrinthe, jusqu’à telle charmille où je m’asseyais, introuvable, adossé aux noisetiers taillés, apercevant le plant d’asperges, les bordures de fraisiers, le bassin où, certains jours, les chevaux faisaient monter l’eau en tournant, la porte blanche qui était la « fin du parc » en haut, et au delà, les champs de bluets et de coquelicots. ||||finish||||||||||||||mounted|||||labyrinth|||bowers|||||leaned||hazel||||plant|of asparagus||borders||strawberries||||||||||||||||||||||||||||||bluebells|||poppies |||||||||||||||||||||||||||||||||avellanos|||||de espárragos||||||bajo||||||||||||||||||||||||||||bluets|||coquelicots Dejaba que los demás terminaran de probar en la parte baja del parque, al borde de los cisnes, y subía corriendo al laberinto, hasta tal arboleda donde me sentaba, intrencado, apoyado en los avellanos podados, vislumbrando la planta de espárragos, los bordes de fresas, el estanque donde, algunos días, los caballos hacían subir el agua al girar, la puerta blanca que era el « final del parque » en la cima, y más allá, los campos de acianos y amapolas. Dans cette charmille le silence était profond, le risque d’être découvert presque nul, la sécurité rendue plus douce par les cris éloignés qui d’en bas m’appelaient en vain, quelquefois même se rapprochaient, montaient les premiers talus, cherchant partout, puis s’en retournaient, n’ayant pas trouvé; alors plus aucun bruit ; seul de temps en temps le son d’or des cloches qui au loin, par delà les plaines, semblait tinter derrière le ciel bleu, aurait pu m’avertir de l’heure qui passait ; mais surpris par sa douceur et troublé par le silence plus profond qui le suivait, je n’étais jamais sûr du nombre des coups. ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||returned||||||||||||||||||||||||||tint|||||||warn||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||me llamaban|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||tinter|||||||||||||||||||||||||||||||||| En esta arboleda el silencio era profundo, el riesgo de ser descubierto casi nulo, la seguridad se volvía más dulce por los gritos lejanos que desde abajo me llamaban en vano, a veces incluso se acercaban, subían las primeras pendientes, buscando por todas partes, luego se volvían, sin haber encontrado; entonces no quedaba ningún ruido; solo de vez en cuando el sonido dorado de las campanas que a lo lejos, más allá de las llanuras, parecía tintinear detrás del cielo azul, podría haberme advertido de la hora que pasaba; pero sorprendido por su dulzura y turbado por el silencio más profundo que la seguía, nunca estaba seguro del número de campanadas. Ce n’étaient pas les cloches tonnantes qu’on entendait en rentrant dans le village – quand on approchait de l’église qui de près avait repris sa taille haute et raide, dressant sur le bleu du soir son capuchon d’ardoise ponctué de corbeaux – faire voler le son en éclats sur la place, « pour les biens de la terre ». |||||||||||||||||||||||||||||||||||hood|of slate|punctuated||||||||||||||||| |||||tronantes|||||||pueblo|||||||||||||||recta|||||||||pizarra|||||||||||||||||| It wasn't the thundering bells you could hear on entering the village – when you approached the church, which had regained its tall, stiff waist, raising against the blue of the evening its slate cowl dotted with crows. – shatter the sound in the square, “for the goods of the earth”. No eran las campanas retumbantes que se oían al entrar en el pueblo – cuando se aproximaba a la iglesia que de cerca había recuperado su tamaño alto y rígido, erguía sobre el azul de la tarde su capuchón de pizarra salpicado de cuervos – hacer volar el sonido en estallidos sobre la plaza, « por los bienes de la tierra ». Elles n’arrivaient au bout du parc que faibles et douces et ne s’adressant pas à moi, mais à toute la campagne, à tous les villages, aux paysans isolés dans leur champ, elles ne me forçaient nullement à lever la tête, elles passaient près de moi, portant l’heure aux pays lointains, sans me voir, sans me connaître et sans me déranger. |||||||||||||||||||||||||||aislados||||||||||||||||||||||||||||||||

Et quelquefois à la maison, dans mon lit, longtemps après le dîner, les dernières heures de la soirée abritaient aussi ma lecture, mais cela seulement les jours où j’étais arrivé aux derniers chapitres d’un livre, où il n’y avait plus beaucoup à lire pour arriver à la fin. ||||||||||||||||||housed||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||albergaban||||||||||||||||||||||||||||| Alors, risquant d’être puni si j’étais découvert, et l’insomnie qui, le livre fini, se prolongerait peut-être toute la nuit, dès que mes parents étaient couchés je rallumais ma bougie; tandis que, dans la rue toute proche, entre la maison de l’armurier et la poste, baignées de silence, il y avait plein d’étoiles au ciel sombre et pourtant bleu, et qu’à gauche, sur la ruelle exhaussée où commençait en tournant son ascension surélevée, on sentait veiller, monstrueuse et noire, l’abside de l’église dont les sculptures la nuit ne dormaient pas, l’église villageoise et pourtant historique, séjour magique du Bon Dieu, de la brioche bénite, des saints multicolores et des dames des châteaux qui, les jours de fête, faisant, quand elles traversaient le marché, piailler les poules et regarder les commères, venaient à la messe « dans leurs attelages », non sans acheter au retour, chez le pâtissier de la place, juste après avoir quitté l’ombre du porche où les fidèles en poussant la porte semaient les rubis errants de la nef, quelques-uns de ces gâteaux en forme de tours, protégés du soleil par un store, - « manqués », « saint-honorés » et « gênoises », - dont l’odeur oisive et sucrée est restée mêlée pour moi aux cloches de la grand’messe et à la gaieté des dimanches. |||punished|||||||||||would prolong|||||||||||||relit||||||||||||||||||bathed||||||||||||||||||||raised|||in|||ascension||would||||||the apse|||||sculptures|||||||village|||||||||||brioche|blessed||||||||||||||||||||squeal||||||gossip||||mass|||harness||||||||pastry chef||||||||||||||||||would spread|||errant||||||||||||||||||store|||||Genoese||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||poste|||||||||||||sin embargo||||||||exhaussée|||||||||sentía|vigilar||||la absidiola||||||||||||||||estancia|||||||brioche|||||||||||||||||||||||||||comadres|||||||ataduras||||||||pastelero|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||tienda|||||genuinas|||oisiva|||||||||||||||||| So, risking punishment if I were discovered, and the insomnia that, with the book finished, would perhaps last all night, as soon as my parents were in bed I relit my candle; while, in the nearby street, between the gunsmith's house and the post office, bathed in silence, there were many stars in the dark yet blue sky, and on the left, in the elevated alleyway where the bend in its elevated ascent began, you could feel the monstrous, black, watchful, monstrous and black, the apse of the church whose sculptures didn't sleep at night, the village yet historic church, magical abode of the Bon Dieu, the blessed brioche, the multicolored saints and the ladies from the castles who, on feast days, making, and the ladies of the castles who, on feast days, would come to mass "in their carriages", making the hens chirp and the gossips stare as they passed through the market, not without buying on their way back from the patissier on the square, just after leaving the shadow of the porch where the faithful, pushing open the door, sowed the errant rubies of the nave, a few of these tower-shaped cakes, protected from the sun by an awning, - "manqués", "saint-honorés" and "gênoises", - whose idle, sweet smell has remained mingled for me with the bells of high mass and the gaiety of Sundays. Entonces, arriesgándome a ser castigado si me descubrían, y la insomnio que, una vez terminado el libro, podría prolongarse toda la noche, tan pronto como mis padres se acostaban, encendía de nuevo mi velita; mientras que, en la calle cercana, entre la casa del armero y la oficina de correos, bañadas en silencio, había un montón de estrellas en el cielo oscuro y sin embargo azul, y a la izquierda, en el callejón elevado donde comenzaba su ascenso en curva, se sentía vigilar, monstruosa y negra, la ábside de la iglesia cuyas esculturas no dormían por la noche, la iglesia del pueblo y sin embargo histórica, estancia mágica del Buen Dios, de la brioche bendita, de los santos multicolores y de las damas de los castillos que, en días de fiesta, haciendo, cuando atravesaban el mercado, cacarear a las gallinas y mirar a las comadres, venían a misa « en sus carruajes », no sin comprar de regreso, en la pastelería de la plaza, justo después de haber dejado la sombra del porche donde los fieles al empujar la puerta sembraban los rubíes errantes de la nave, algunos de esos pasteles en forma de torres, protegidos del sol por un toldo, - « fallidos », « santos-honorados » y « genoveses », - cuyo olor ocioso y dulce ha permanecido mezclado para mí con las campanas de la misa y la alegría de los domingos.

Puis la dernière page était lue, le livre était fini. Luego se leía la última página, el libro había terminado. Il fallait arrêter la course éperdue des yeux et de la voix qui suivait sans bruit, s’arrêtant seulement pour reprendre haleine, dans un soupir profond. |||||wild||||||||||||||||||| |||||desesperada||||||||||||||||||| Era necesario detener la carrera desenfrenada de los ojos y de la voz que seguía en silencio, deteniéndose solo para recuperar el aliento, en un profundo suspiro. Alors, afin de donner aux tumultes depuis trop longtemps déchaînés en moi pour pouvoir se calmer ainsi d’autres mouvements à diriger, je me levais, je me mettais à marcher le long de mon lit, les yeux encore fixés à quelque point qu’on aurait vainement cherché dans la chambre ou dehors, car il n’était situé qu’à une distance d’âme, une de ces distances qui ne se mesurent pas par mètres et par lieues, comme les autres, et qu’il est d’ailleurs impossible de confondre avec elles quand on regarde les yeux « lointains » de ceux qui pensent « à autre chose ». Alors, quoi ? ce livre, ce n’était que cela ? Ces êtres à qui on avait donné plus de son attention et de sa tendresse qu’aux gens de la vie, n’osant pas toujours avouer à quel point on les aimait, et même quand nos parents nous trouvaient en train de lire et avaient l’air de sourire de notre émotion, fermant le livre avec une indifférence affectée ou un ennui feint ; ces gens pour qui on avait haleté et sangloté, on ne les verrait plus jamais, on ne saurait plus rien d’eux. |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||feint|||||||gasped||sobbed|||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||feint||||||||||||||||||||| Déjà, depuis quelques pages, l’auteur, dans le cruel « Épilogue », avait, eu soin de les « espacer » avec une indifférence incroyable pour qui savait l’intérêt avec lequel il les avait suivis jusque-là pas à pas. ||||||||Epilogue||||||||||||||||||||||||| ||||||||epílogo||||||espaciarlos||||||||||||||||||| L’emploi de chaque heure de leur vie nous avait été narrée. ||||||||||narrated The employment of every hour of their life had been told to us. Puis subitement : « Vingt ans après ces événements on pouvait rencontrer dans les rues de Fougères (2) un vieillard encore droit, etc. ||||||||||||||Fougères||||| » Et le mariage dont deux volumes avaient été employés à nous faire entrevoir la possibilité délicieuse, nous effrayant puis nous réjouissant de chaque obstacle dressé puis aplani, c’est par une phrase incidente d’un personnage secondaire que nous apprenions qu’il avait été célébré, nous ne savions pas au juste quand, dans cet étonnant épilogue écrit, semblait-il, du haut du ciel par une personne indifférente à nos passions d’un jour, qui s’était substituée à l’auteur. ||||||||||||||||||||rejoicing||||||flattened|||||incidental|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||aplanado||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| On aurait tant voulu que le livre continuât, et si c’était impossible avoir d’autres renseignements sur tous ces personnages, apprendre maintenant quelque chose de leur vie, employer la nôtre à des choses qui ne soient pas tout à fait étrangères à l’amour qu’ils nous avaient inspiré et dont l’objet nous faisait tout à coup défaut, ne pas avoir aimé en vain, pour une heure, des êtres qui demain ne seraient plus qu’un nom sur une page oubliée, dans un livre sans rapport avec la vie et sur la valeur duquel nous nous étions bien mépris puisque son lot ici-bas, nous le comprenions maintenant et nos parents nous l’apprenaient au besoin d’une phrase dédaigneuse, n’était nullement, comme nous l’avions cru, de contenir l’univers et la destinée, mais d’occuper une place fort étroite dans la bibliothèque du notaire, entre les fastes sans prestige du Journal de Modes illustré et de la Géographie d’Eure-et-Loir. |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||disdainful|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||defecto||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||desprecio|||lot|||||||||||||||||||||el avión|||||||||||||||||||||||||||||||||de Eure||Loir Hubiéramos querido tanto que el libro continuara, y si era imposible tener más información sobre todos esos personajes, aprender ahora algo de su vida, emplear la nuestra en cosas que no estuvieran del todo ajenas al amor que nos habían inspirado y cuyo objeto de repente nos faltaba, no haber amado en vano, durante una hora, a seres que mañana no serían más que un nombre en una página olvidada, en un libro sin relación con la vida y sobre el valor del cual nos habíamos equivocado, ya que su destino aquí abajo, lo entendíamos ahora y nuestros padres nos lo enseñaban cuando era necesario con una frase desdeñosa, no era en absoluto, como habíamos creído, contener el universo y el destino, sino ocupar un lugar muy estrecho en la biblioteca del notario, entre los fastos sin prestigio del Journal de Modes ilustré y de la Geografía de Eure-et-Loir.