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Bernadette, Sœur Marie-Bernard (Henri Lasserre), Livre 3 – La Vie Cachée et la Mort (7)

Livre 3 – La Vie Cachée et la Mort (7)

Dès ce jour et sur une telle parole, qui pour elle était la voix d'en haut, cette jeune fille retrouva la pleine tranquillité de son àme.

Que l'interlocutrice de soeur Marie-Bernard ait pris pour une révélation directe l'expression d'une ferme espérance en la miséricorde de Dieu, cela est assurément possible. Mais si vraiment Bernadette a fait entendre cette affirmation sur le sort d'un mort, c'est un fait considérable; et il en faut forcément conclure que, pour un instant, le mystère insondable s'est ouvert devant elle.

Une autre fois, comme elle était alitée et fort souffrante, elle reçut la visite d'une Soeur de Nevers, étrangère à la Maison-mère. Cette Religieuse, après avoir causé quelques instants, était demeurée assise dans l'infirmerie, travaillant silencieusement à quelque ouvrage de couture et laissant en elle-même sa pensée voyager vers de douloureux horizons. Elle était triste : car deux larmes lui montèrent aux yeux et roulèrent le long de ses joues.

La malade s'en aperçut:

— Ma Soeur, pourquoi pleurez-vous?

— Hélas! parce que j'ai des peines.

— Des peines? tout le monde en a!... Mais vous vous avez telle et telle peine...

Et voilà qu'avec une précision des plus nettes, et comme si elle lisait dans un livre ouvert, soeur Marie-Bernard se met à détailler à sa compagne, bouleversée d 'étonnement, tout le sujet des secrètes préoccupations qui lui torturaient le coeur. Elle touchait à des chagrins et des soucis de famille qu'aucun moyen naturel n'avait pu faire connaître à celle qui parlait.

Bernadette termina en disant:

— Vous allez écrire ceci chez vous. Et tout sera alors arrangé.

Ce conseil fut suivi et rétablit l'harmonie dans un foyer troublé.

Nous tenons ce récit de la Religieuse elle-même à qui Bernadette a donné cette frappante preuve de seconde vue.

Par les quelques traits épars que nous avons glanés dans sa vie religieuse et dont nous avons formé à peu près sans ordre une gerbe incomplète, que nous achèverons peut-être quelque jour en y replaçant des épis oubliés; par tous les souvenirs de sa jeune existence au moment des Apparitions; par ces diverses anecdotes, on a pu voir ou pressentir quelle nature vive, alerte, charmante, exquise, fut ici-bas l'enfant que Notre-Dame de Lourdes a aimée... Avant d'arriver aux grandes douleurs et aux sublimes patiences des derniers jours nous avons tenu à faire ressortir ce caractère aimable, spirituel et enjoué, autant que plein d'amour fervent et de vertu profonde.

Il est bon de ne pas altérer les types qui ont plu au coeur de Dieu. Quand on fausse ces types historiques, on fausse par là même la religion d'un grand nombre à qui on donne des notions inexactes de ce que c'est que la véritable vertu et la Sainteté. Et cela peut faire un grand mal.

Dans un zèle inquiet et remuant qui croit travailler à tout transfigurer et qui ne parvient, hélas! qu'à tout défigurer, dans un zèle indiscret et mal éclairé, je ne sais quelle piété niaise a essayé parfois de présenter à l'édification des croyants une Bernadette de convention, indifférente et sans caractère, puritaine et vieille dès l'enfance, les yeux obliquement baissés... Ce n'est pas même une caricature, car la caricature contient encore une ressemblance; c'est une pure invention légendaire que l'Histoire a le droit et le devoir d'écarter sans fausse pitié.

Nous l'avons raconté dans un livre que Dieu a béni, nous venons de le redire présentement, toute une Congrégation est là pour l'attester à la terre, nulle créature n'eut plus de vie, plus de grâce, même humaine, plus de physionomie personnelle, plus d'esprit spontané, plus d'individualité caractéristique que celle sur qui se reposèrent dix-huit fois, à la Grotte de Lourdes, les regards de la Reine du ciel, que cette Bernadette, que cette soeur Marie-Bernard qui, depuis treize années, vécut pleine de charme, d'amabilité, de piété et de droiture au milieu des Soeurs de Nevers, s'avançant de plus en plus vers la perfection religieuse et captivant ses chères compagnes, comme elle avait attiré à elle, il y a vingt ans, les prédilections de la Vierge sans tache. Toutes l'aimaient en vérité, et elle était la seule à ne point s'aimer.

Elle avait conservé en toute leur fraîcheur première ces sentiments universels, ces sentiments naïfs et simples que le Père de toute créature se plaît partout et toujours, à voir s'épanouir au coeur des humains. En s'enlaçant pieusement au pied de l'autel, cette plante toute fleurie avait gardé le franc parfum qu'elle avait apporté du grand air des champs...

Réalisant en sa plénitude le type idéal de la Congrégation qu'elle avait élue pour famille; s'abandonnant sans réserve, se pliant totalement, sans nulle résistance et sans nulle contention, à l'action divine, Bernadette, devenue soeur Marie-Bernard, s'était développée et sanctifiée dans une harmonie sans discordance. Croissant chaque jour en piété en bonté, en sagesse, sachant supporter la souffrance avec la patience des Martyrs et prier avec la ferveur des Anges, elle avait gagné constamment dans l'ordre de la grâce sans rien perdre jamais dans l'ordre de la nature. Aidée par le secours d'en haut, elle avait résolu le difficile problème, religieux et moral, de grandir en tout sans se déformer en rien, de se hausser sans se fausser.

Telle fut la soeur Marie-Bernard. Telle fut, dans la vie cachée et à l'ombre des cloîtres, l'enfant illustre à qui la Vierge était jadis apparue et qui, avec l'aide du grand Curé Peyramale, Doyen de Lourdes, se trouvait avoir imprimé au monde, de ses débiles et innocentes mains, le plus grand mouvement religieux que l'on ait encore vu depuis les Croisades.

« — Elle est folle, elle est idiote, elle est hallucinée! » criaient les ennemis de Dieu autour de cette faiblesse si puissante. Que lui importaient ces vaines clameurs? Elle n'en ressentait ni trouble, ni humiliation : pas plus qu'elle n'avait jadis éprouvé de vanité en la cité de Lourdes devant l'enthousiasme des chrétiens fidèles; pas plus qu'aux Roches de Massabiellc, elle n'avait été atteinte d'orgueil à la suite des grâces extraordinaires qu'elle avait reçues et des admirables choses que Dieu avait accomplies par elle.

Vous êtes-vous parfois, parmi les herbes d'une prairie en fleur ou au fond de quelque fôret, arrêté sur les rives silencieuses de quelque magnifique et limpide ruisseau? Ses eaux sont claires, ses eaux sont pures, son cours est vif et calme. Durant le jour, le soleil traversant la voûte des arbres, caresse ses lames d'argent. Pendant la nuit les étoiles s'y mirent. Quelle agilité dans ces flots qui se pressent l'un l'autre et qui se jouent avec un doux murmure! Et en même temps quelle paix profonde, et quelle admirable placidité! Il semble que ces ondes si vivantes et si tranquilles arrivent directement, à travers les solitudes ombreuses, du fond de ces gorges inaccessibles qu'habite l'éternel repos.

Eh bien non! à quelques lieues plus haut, cet agreste ruisseau, sans interrompre sa marche, suivant au contraire son cours régulier et descendant sa pente, a sans efforts, en passant à travers la cité des hommes, fait tourner d'étonnants rouages, soulevé des poids gigantesques et mis en mouvement tout un monde... Et, cela fait, s'enfonçant dans une ombre plus épaisse et une paix plus profonde, il a continué de promener ses humbles flots le long des prés et des bois, sans qu'une seule de ses gouttes soit fatiguée, sans que sa limpidité soit atteinte et son innocence troublée.

Toute semblable fut ici-bas la destinée de Bernadette.

Ces détails que nous avons recueillis ça et là, ces éclatants et miraculeux épisodes de son enfance, ces souvenirs si charmants et si purs de sa vie religieuse, cet héroïsme dans la souffrance qui allait jusqu'à l'enjouement au sein des douleurs, sont-ils les indices de la Sainteté? Tout cet ensemble de blanche lumière forme-t-il ce nimbe glorieux dont la tradition de l'Eglise a toujours entouré le front des élus. Nous l'ignorons; et l'autorité souveraine du Père commun des Fidèles a seule le droit de le déterminer.

Toutefois, puisque nous venons de parler de lumière et des signes visibles de la prédestination, qu'il nous soit permis de rapporter un fait que Mgr Peyramale, de pieuse mémoire, a redit bien souvent, mais que toujours, pour des raisons très faciles à comprendre, il s'est refusé à laisser imprimer du vivant de Bernadette.

C'était à l'époque des persécutions administratives, et, si nous ne nous trompons, dans le courant d'août 1858. M. le Curé de Lourdes avait déjà déployé, comme chacun le sait, une invincible énergie à défendre l'oeuvre divine et l'enfant privilégiée.

Or, un jour de dimanche, il distribuait à son peuple le pain de Vie. Et voilà que tout à coup, au-dessus d'une personne agenouillée à la sainte table, il aperçoit une auréole éclatante. Et, en même temps, partant du saint Ciboire, un céleste rayon alla se joindre à cette auréole.

— Vous savez, racontait le Curé de Lourdes à Mgr Crosnier, qui a naguère relaté ce fait dans la Semaine religieuse de Nevers, vous savez qu'il nous est recommandé, quand nous distribuons la sainte communion de ne point portér notre attention sur les Fidèles qui la reçoivent... Je ne tins, je l'avoue, aucun compte de cette prescription, et désirant savoir quelle était la chrétienne dont le front était entouré de ce nimbe, j'arrêtai sur elle mon regard : et je la reconnus, non sans une profonde émotion. C'était Bernadette.

Heureuse l'enfant dont le front fut ainsi illuminé de cette marque de prédestination! Heureux le prêtre qui avait le coeur assez pur pour qu'il ait été donné à ses yeux mortels de voir ce signe d'en haut!

(Nous venons de rapporter ce fait tel que nous l'avons nous- même entendu redire à Mgr Peyramale. Il ne détermina point la foi du Curé de Lourdes, déjà acquise avant celte date à la réalité des Apparitions, mais il lui fut un grand encouragement dans les luttes qu'il eut à soutenir.)


Livre 3 – La Vie Cachée et la Mort (7) Buch 3 - Das verborgene Leben und der Tod (7)

Dès ce jour et sur une telle parole, qui pour elle était la voix d'en haut, cette jeune fille retrouva la pleine tranquillité de son àme.

Que l'interlocutrice de soeur Marie-Bernard ait pris pour une révélation directe l'expression d'une ferme espérance en la miséricorde de Dieu, cela est assurément possible. Mais si vraiment Bernadette a fait entendre cette affirmation sur le sort d'un mort, c'est un fait considérable; et il en faut forcément conclure que, pour un instant, le mystère insondable s'est ouvert devant elle.

Une autre fois, comme elle était alitée et fort souffrante, elle reçut la visite d'une Soeur de Nevers, étrangère à la Maison-mère. Cette Religieuse, après avoir causé quelques instants, était demeurée assise dans l'infirmerie, travaillant silencieusement à quelque ouvrage de couture et laissant en elle-même sa pensée voyager vers de douloureux horizons. Elle était triste : car deux larmes lui montèrent aux yeux et roulèrent le long de ses joues.

La malade s'en aperçut:

— Ma Soeur, pourquoi pleurez-vous?

— Hélas! parce que j'ai des peines.

— Des peines? tout le monde en a!... Mais vous __vous avez telle et telle peine__...

Et voilà qu'avec une précision des plus nettes, et comme si elle lisait dans un livre ouvert, soeur Marie-Bernard se met à détailler à sa compagne, bouleversée d 'étonnement, tout le sujet des secrètes préoccupations qui lui torturaient le coeur. Elle touchait à des chagrins et des soucis de famille qu'aucun moyen naturel n'avait pu faire connaître à celle qui parlait.

Bernadette termina en disant:

— Vous allez écrire ceci chez vous. Et tout sera alors arrangé.

Ce conseil fut suivi et rétablit l'harmonie dans un foyer troublé.

Nous tenons ce récit de la Religieuse elle-même à qui Bernadette a donné cette frappante preuve de seconde vue.

Par les quelques traits épars que nous avons glanés dans sa vie religieuse et dont nous avons formé à peu près sans ordre une gerbe incomplète, que nous achèverons peut-être quelque jour en y replaçant des épis oubliés; par tous les souvenirs de sa jeune existence au moment des Apparitions; par ces diverses anecdotes, on a pu voir ou pressentir quelle nature vive, alerte, charmante, exquise, fut ici-bas l'enfant que Notre-Dame de Lourdes a aimée... Avant d'arriver aux grandes douleurs et aux sublimes patiences des derniers jours nous avons tenu à faire ressortir ce caractère aimable, spirituel et enjoué, autant que plein d'amour fervent et de vertu profonde.

Il est bon de ne pas altérer les types qui ont plu au coeur de Dieu. Quand on fausse ces types historiques, on fausse par là même la religion d'un grand nombre à qui on donne des notions inexactes de ce que c'est que la véritable vertu et la Sainteté. Et cela peut faire un grand mal.

Dans un zèle inquiet et remuant qui croit travailler à tout transfigurer et qui ne parvient, hélas! qu'à tout défigurer, dans un zèle indiscret et mal éclairé, je ne sais quelle piété niaise a essayé parfois de présenter à l'édification des croyants une Bernadette de convention, indifférente et sans caractère, puritaine et vieille dès l'enfance, les yeux obliquement baissés... Ce n'est pas même une caricature, car la caricature contient encore une ressemblance; c'est une pure invention légendaire que l'Histoire a le droit et le devoir d'écarter sans fausse pitié.

Nous l'avons raconté dans un livre que Dieu a béni, nous venons de le redire présentement, toute une Congrégation est là pour l'attester à la terre, nulle créature n'eut plus de vie, plus de grâce, même humaine, plus de physionomie personnelle, plus d'esprit spontané, plus d'individualité caractéristique que celle sur qui se reposèrent dix-huit fois, à la Grotte de Lourdes, les regards de la Reine du ciel, que cette Bernadette, que cette soeur Marie-Bernard qui, depuis treize années, vécut pleine de charme, d'amabilité, de piété et de droiture au milieu des Soeurs de Nevers, s'avançant de plus en plus vers la perfection religieuse et captivant ses chères compagnes, comme elle avait attiré à elle, il y a vingt ans, les prédilections de la Vierge sans tache. Toutes l'aimaient en vérité, et elle était la seule à ne point s'aimer.

Elle avait conservé en toute leur fraîcheur première ces sentiments universels, ces sentiments naïfs et simples que le Père de toute créature se plaît partout et toujours, à voir s'épanouir au coeur des humains. En s'enlaçant pieusement au pied de l'autel, cette plante toute fleurie avait gardé le franc parfum qu'elle avait apporté du grand air des champs...

Réalisant en sa plénitude le type idéal de la Congrégation qu'elle avait élue pour famille; s'abandonnant sans réserve, se pliant totalement, sans nulle résistance et sans nulle contention, à l'action divine, Bernadette, devenue soeur Marie-Bernard, s'était développée et sanctifiée dans une harmonie sans discordance. Croissant chaque jour en piété en bonté, en sagesse, sachant supporter la souffrance avec la patience des Martyrs et prier avec la ferveur des Anges, elle avait gagné constamment dans l'ordre de la grâce sans rien perdre jamais dans l'ordre de la nature. Aidée par le secours d'en haut, elle avait résolu le difficile problème, religieux et moral, de grandir en tout sans se déformer en rien, de se hausser sans se fausser.

Telle fut la soeur Marie-Bernard. Telle fut, dans la vie cachée et à l'ombre des cloîtres, l'enfant illustre à qui la Vierge était jadis apparue et qui, avec l'aide du grand Curé Peyramale, Doyen de Lourdes, se trouvait avoir imprimé au monde, de ses débiles et innocentes mains, le plus grand mouvement religieux que l'on ait encore vu depuis les Croisades.

« — Elle est folle, elle est idiote, elle est hallucinée! » criaient les ennemis de Dieu autour de cette faiblesse si puissante. Que lui importaient ces vaines clameurs? Elle n'en ressentait ni trouble, ni humiliation : pas plus qu'elle n'avait jadis éprouvé de vanité en la cité de Lourdes devant l'enthousiasme des chrétiens fidèles; pas plus qu'aux Roches de Massabiellc, elle n'avait été atteinte d'orgueil à la suite des grâces extraordinaires qu'elle avait reçues et des admirables choses que Dieu avait accomplies par elle.

Vous êtes-vous parfois, parmi les herbes d'une prairie en fleur ou au fond de quelque fôret, arrêté sur les rives silencieuses de quelque magnifique et limpide ruisseau? Ses eaux sont claires, ses eaux sont pures, son cours est vif et calme. Durant le jour, le soleil traversant la voûte des arbres, caresse ses lames d'argent. Pendant la nuit les étoiles s'y mirent. Quelle agilité dans ces flots qui se pressent l'un l'autre et qui se jouent avec un doux murmure! Et en même temps quelle paix profonde, et quelle admirable placidité! Il semble que ces ondes si vivantes et si tranquilles arrivent directement, à travers les solitudes ombreuses, du fond de ces gorges inaccessibles qu'habite l'éternel repos.

Eh bien non! à quelques lieues plus haut, cet agreste ruisseau, sans interrompre sa marche, suivant au contraire son cours régulier et descendant sa pente, a sans efforts, en passant à travers la cité des hommes, fait tourner d'étonnants rouages, soulevé des poids gigantesques et mis en mouvement tout un monde... Et, cela fait, s'enfonçant dans une ombre plus épaisse et une paix plus profonde, il a continué de promener ses humbles flots le long des prés et des bois, sans qu'une seule de ses gouttes soit fatiguée, sans que sa limpidité soit atteinte et son innocence troublée.

Toute semblable fut ici-bas la destinée de Bernadette.

Ces détails que nous avons recueillis ça et là, ces éclatants et miraculeux épisodes de son enfance, ces souvenirs si charmants et si purs de sa vie religieuse, cet héroïsme dans la souffrance qui allait jusqu'à l'enjouement au sein des douleurs, sont-ils les indices de la Sainteté? Tout cet ensemble de blanche lumière forme-t-il ce nimbe glorieux dont la tradition de l'Eglise a toujours entouré le front des élus. Nous l'ignorons; et l'autorité souveraine du Père commun des Fidèles a seule le droit de le déterminer.

Toutefois, puisque nous venons de parler de lumière et des signes visibles de la prédestination, qu'il nous soit permis de rapporter un fait que Mgr Peyramale, de pieuse mémoire, a redit bien souvent, mais que toujours, pour des raisons très faciles à comprendre, il s'est refusé à laisser imprimer du vivant de Bernadette.

C'était à l'époque des persécutions administratives, et, si nous ne nous trompons, dans le courant d'août 1858. M. le Curé de Lourdes avait déjà déployé, comme chacun le sait, une invincible énergie à défendre l'oeuvre divine et l'enfant privilégiée.

Or, un jour de dimanche, il distribuait à son peuple le pain de Vie. Et voilà que tout à coup, au-dessus d'une personne agenouillée à la sainte table, il aperçoit une auréole éclatante. Et, en même temps, partant du saint Ciboire, un céleste rayon alla se joindre à cette auréole.

— Vous savez, racontait le Curé de Lourdes à Mgr Crosnier, qui a naguère relaté ce fait dans la __Semaine religieuse__ de Nevers, vous savez qu'il nous est recommandé, quand nous distribuons la sainte communion de ne point portér notre attention sur les Fidèles qui la reçoivent... Je ne tins, je l'avoue, aucun compte de cette prescription, et désirant savoir quelle était la chrétienne dont le front était entouré de ce nimbe, j'arrêtai sur elle mon regard : et je la reconnus, non sans une profonde émotion. C'était Bernadette.

Heureuse l'enfant dont le front fut ainsi illuminé de cette marque de prédestination! Heureux le prêtre qui avait le coeur assez pur pour qu'il ait été donné à ses yeux mortels de voir ce signe d'en haut!

(Nous venons de rapporter ce fait tel que nous l'avons nous- même entendu redire à Mgr Peyramale. Il ne détermina point la foi du Curé de Lourdes, déjà acquise avant celte date à la réalité des Apparitions, mais il lui fut un grand encouragement dans les luttes qu'il eut à soutenir.)