VICE DE FORME 2010-07-02
Surprise dans le monde judiciaire : Yvan Colonna, l'assassin présumé du préfet Erignac, sera jugé une troisième fois, et la dernière décision de mars 2009 est don c annulée. La Cour de cassation a annulé la condamnation de réclusion à perpétuité, pour vice de forme . Même si cette décision surprend, on doit reconnaître que la Cour de cassation est dans sa fonction : elle ne se prononce pas sur le fond de l'affaire, mais sur sa forme. Et si elle casse cette décision de justice, c'est en vertu d'un vice de forme , d'un vice de procédure. Ce qu'on appelle donc un vice de forme , c'est le fait que la procédure n'a pas été scrupuleusement respectée comme on l'aurait dû : il y a eu une phase du procès qui ne s'est pas déroulée conformément à ce qui est prévu. Ça peut parfois être une toute petite chose, mais c'est l'appréciation de cette Cour de cassation de savoir si cela suffit à annuler la décision. Il est en tout cas certain que le procès n'est pas renvoyé parce que sa décision ne semble pas être équitable. L'annulation du procès Colonna ne signifie pas – en principe – que les membres de la Cour de cassation considèrent que Colonna a été condamné à tort, ou trop (on ne saurait dire pas assez : la perpétuité assortie de vingt-deux ans de sûreté est l'une des peines les plus lourdes). Cela signifie que la Cour a pensé qu'il n'avait pas été jugé conformément au code de procédure. Alors qu'il y ait des arrière-pensées politiques derrière la décision, on ne le sait pas trop : si l'on veut trouver un vice de forme dans un procès si long et compliqué, on en trouvera toujours. Le tout est de savoir si on les retiendra pour casser le procès.
Si un vice de procédure peut être constitué d'une entorse mineure au rituel judiciaire, le mot vice n'est quand même pas si léger. C'est un mot juridique qu'on trouve dans des situations différentes : on parle par exemple d'un vice de fabrication, parfois aussi d'un vice caché. Il s'agit d'un défaut grave mais invisible au moment d'une vente par exemple. Sa découverte, une fois la vente effectuée peut annuler la transaction. Et même de façon assez technique, on parle parfois de vice rédhibitoire, quand ce défaut semble suffisant pour annuler la vente.
Toutefois, on remarque que vice n'est pas un mot faible : il évoque bien plus qu'une simple étourderie, qu'un manquement sans importance. C'est que le mot porte derrière lui une forte condamnation morale. Un vice est plus qu'un défaut. C'est toujours plus profond, plus important, donc, plus condamnable. Coproduction du Centre national de Documentation Pédagogique. http://www.cndp.fr/ Venez découvrir le livre Les Mots de l'Actualité d'Yvan Amar.
