Les grands requins blancs sont chassés... et pas par des hommes
Les orques ont élaboré une technique de chasse très subtile pour dévorer tranquillement le foie des requins: elles exploitent leur talon d'Achille, "l'immobilité tonique".
Le grand requin blanc est souvent considéré comme le prédateur marin le plus vorace. S'il joue effectivement un rôle clef dans le contrôle des écosystèmes, il n'est pas tout à fait en haut de la chaîne alimentaire. Parfois, il est aussi la proie d'autres animaux -et pas seulement de l'Homme. Depuis le début de l'année 2017, cinq carcasses de grands blancs ont été retrouvées sur les côtes d'Afrique du Sud. Les victimes, deux femelles et trois mâles mesurant entre 2,7 et 4,9 mètres, avaient un point en commun: leur foie avait disparu. Après avoir analysé les morsures entre les nageoires pectorales des grands poissons, les scientifiques ont déterminé que les coupables étaient... des orques. Que des orques puissent tuer des requins blancs n'est finalement pas si surprenant.
Quand on compare les deux, le grand blanc n'est pas de taille: il mesure 6,4 mètres de long maximum contre 9,6 mètres, pèse 2268 kg contre 9000 kg et nage même un peu moins vite, 45km/h contre 48km/h pour l'orque. Surtout, les scientifiques avaient déjà constaté que les orques s'en prenaient à de plus petits requins, dont le tigre, le requin vache ou requin bleu. Là encore, les orques s'en prenaient spécifiquement au foie de leurs victimes. Mais pourquoi cette partie de leur corps?
Comme l'explique le Guardian, le foie du requin blanc est particulièrement gros: il représente 5% de son poids total. Surtout, il est particulièrement riche en huile, dont le squalène -qui sert à stocker l'énergie et à assurer la flottabilité des requins-, mais aussi en lipides, en vitamine A, B12, B6, C, en fer et en sodium. A ce titre, il possède une "densité énergétique" plus élevée que le lard des baleines. Ce que l'orque, fin gourmet, semble avoir bien compris. Et l'intelligence du vorace mammifère ne s'arrête pas.
Comme le montrent les carcasses des requins, dévorées avec précisions et non pas sauvagement déchiquetées, les orques ont développé une technique de chasse très subtile. Ils exploitent le talon d'Achille des requins: "l'immobilité tonique", qui se déclenche quand le requin est retourné à l'envers et se caractérise par une sorte de transe paralysante, une perte totale de tonus musculaire. Si les scientifiques utilisent cette méthode pour étudier les requins ou leur poser des balises sans risque, ils n'en abusent pas, car l'immobilité tonique peut être fatale si elle est maintenue trop longtemps.
Certaines espèces de requins, dont le requin blanc, doivent en effet nager en permanence pour utiliser leurs branchies, et donc respirer. Les orques ont réussi à le comprendre, et exploitent cette faiblesse pour noyer leurs proies, avant de dévorer leur foie en toute tranquillité.