Péter les plombs, disjoncter
1. S'énerver brutalement et fortement 2. Devenir fou
Aujourd'hui, dans les habitations relativement modernes, les dégâts causés aux appareils électroniques par les court-circuits et surtensions électriques sont limités par des disjoncteurs, ces petits boîtiers munis d'un interrupteur, qu'on trouve rassemblés dans le tableau électrique central. Lorsqu'un problème électrique survient, le disjoncteur saute et coupe le courant vers les prises et points lumineux qui lui sont reliés. Si le problème n'est pas un défaut d'un des appareils, il suffit de relever la petite manette du disjoncteur pour rétablir le courant dans la partie concernée. Mais autrefois, lorsque la technologie électrique n'était pas aussi avancée, la protection du réseau électrique intérieur se faisait par des fusibles qu'on appelait aussi des plombs, ellipse de plomb de sûreté ou plomb fusible, appellations qui datent de la fin du XIXe siècle. Ces choses fabriquées en porcelaine étaient ainsi nommées parce qu'elles comportaient un fil de plomb d'un diamètre variable selon l'intensité maximum du courant qui pouvait le traverser. En effet, la particularité de ce fil, qui était un point de passage obligé du courant, était de fondre[1] lorsque ce dernier était trop fort, comme dans le cas d'une surtension due à un orage, par exemple. Du coup, en fondant, le plomb coupait l'électricité vers la zone alimentée et en protégeait les appareils connectés. Très pratiques pour l'époque, ces plombs avait quand même un défaut : pour remettre le courant, il fallait impérativement avoir en réserve du fil de plomb de différents diamètres et une lampe de poche ou une bougie, puisqu'il fallait y voir quelque chose pour remplacer le fil fondu et qu'il n'était pas question, comme on peut le faire maintenant, de tâtonner dans le noir pour trouver la manette du disjoncteur. Ce plomb qui fondait ou qui pétait et qui, du coup, empêchait le fonctionnement de ce qu'il alimentait a produit la métaphore des années 1980 qui nous intéresse ici. On y compare en effet le cerveau à un appareil électrique alimenté à travers des plombs ; et lorsque son propriétaire s'énerve brutalement ou se met à avoir un comportement aberrant, c'est que son cerveau ne fonctionne plus parce qu'il n'est plus alimenté, donc que ses plombs ont pété. Et c'est tout naturellement, avec l'évolution de la technologie, la disparition progressive des fusibles (qui sont entre-temps passés par des formes plus modernes et plus aisément remplaçables que les fils de plomb) et la généralisation des disjoncteurs que « péter les plombs » est petit à petit remplacé par « disjoncter ».