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Les mots de l'actualité (2009), TRINQUER   2009-03-12

TRINQUER 2009-03-12

« Alcools et tabac interdits : Les jeunes trinquent ». C'est le titre qu'on lit à la une du journal Libération d'hier, et le titre, comme souvent, joue sur les mots. En effet, le verbe « trinquer » a en français deux sens principaux – l'un littéral, l'autre figuré – qui sont très différents et dont les échos sont presque contraires. « Trinquer » signifie d'abord choquer son verre contre celui de son voisin avant de boire. Et on se souhaite mutuellement de bonnes choses. Mais le mot signifie aussi subir des désagréments consécutifs à une action quelconque. Trinquer, c'est payer pour quelque chose, et bien souvent payer les pots cassés. Cette dernière phrase, d'ailleurs, est très éclairante. Elle peut être prise au sens propre comme au sens figuré. En effet, si l'on choque les verres trop fort, ils peuvent se briser. Et cette possibilité, même si elle est rare, est évoquée par la sonorité du mot. « Trinquer » fait penser à « trink », qui peut être une onomatopée, un mot figurant un bruit. Si on trinque trop, gare à la casse.

Mais le mot porte une idée indirecte bien souvent. Celui qui trinque paye pour tout le monde. Comme on dit vulgairement, c'est lui qui porte le chapeau. Jojo n'était que le chauffeur des bandits, mais comme c'est le seul à s'être fait prendre, il a trinqué, il paye peut-être plus que son dû. Et on se souvient par ailleurs d'un splendide slogan publicitaire de la lutte contre l'alcoolisme qui date des années 50-60 : « Les parents boivent, les enfants trinquent » qui, comme dans Libération hier, joue sur les mots. Ce sont les enfants qui subiront les conséquences néfastes de l'alcoolisme de leurs parents. Mais revenons un moment au sens propre du mot, qui est étrange. En effet, le mot est emprunté à des langues germaniques. Mais on sait que drink, par exemple, en anglais, signifie boire et non trinquer. Mais là encore, c'est sûrement la sonorité du mot qui explique le glissement de sens. « Trinquer », c'est donc choquer son verre contre celui de son voisin, mais le sens symbolique est fort. On trinque à quelque chose, de même qu'on peut dire qu'on boit à quelque chose, c'est-à-dire que le geste et le fait de boire, ensemble, s'accompagnent d'un vœu. On dédie de façon rituelle cette consommation à quelqu'un ou à la réalisation de quelque chose. Déjà, on boit « à la santé » de quelqu'un, en général de son compagnon de boisson, mais pas toujours. Et cela s'accompagne d'une phrase également ritualisée : « à ta santé », « à la santé du roi de France », etc. Cette dernière phrase est souvent raccourcie par une ellipse. On dit « à la tienne » sans qu'il soit besoin de préciser. À tel point qu'on en oublie parfois que « à la tienne » signifie « à ta santé », et qu'on peut jouer sur les rimes, avec des expressions comme « à la tienne Étienne ». Coproduction du Centre national de Documentation Pédagogique. http://www.cndp.fr/

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TRINQUER   2009-03-12 TRINQUER 2009-03-12

« Alcools et tabac interdits : Les jeunes trinquent ». C'est le titre qu'on lit à la une du journal Libération d'hier, et le titre, comme souvent, joue sur les mots. En effet, le verbe « trinquer » a en français deux sens principaux – l'un littéral, l'autre figuré – qui sont très différents et dont les échos sont presque contraires. « Trinquer » signifie d'abord choquer son verre contre celui de son voisin avant de boire. Et on se souhaite mutuellement de bonnes choses. Mais le mot signifie aussi subir des désagréments consécutifs à une action quelconque. Trinquer, c'est payer pour quelque chose, et bien souvent payer les pots cassés. Cette dernière phrase, d'ailleurs, est très éclairante. Elle peut être prise au sens propre comme au sens figuré. En effet, si l'on choque les verres trop fort, ils peuvent se briser. Et cette possibilité, même si elle est rare, est évoquée par la sonorité du mot. « Trinquer » fait penser à « trink », qui peut être une onomatopée, un mot figurant un bruit. Si on trinque trop, gare à la casse. If we toast too much, watch out for breakage.

Mais le mot porte une idée indirecte bien souvent. But the word often carries an indirect idea. Celui qui trinque paye pour tout le monde. The one who toasts pays for everyone. Comme on dit vulgairement, c'est lui qui porte le chapeau. As the saying goes, it's him who wears the hat. Jojo n'était que le chauffeur des bandits, mais comme c'est le seul à s'être fait prendre, il a trinqué, il paye peut-être plus que son dû. Jojo was just the driver for the bandits, but since he is the only one who got caught, he has taken the hit; he may be paying more than his fair share. Et on se souvient par ailleurs d'un splendide slogan publicitaire de la lutte contre l'alcoolisme qui date des années 50-60 : « Les parents boivent, les enfants trinquent » qui, comme dans Libération hier, joue sur les mots. And we also remember a splendid advertising slogan from the fight against alcoholism that dates back to the 50s-60s: 'When parents drink, children pay the price,' which, like in Liberation yesterday, plays on words. Ce sont les enfants qui subiront les conséquences néfastes de l'alcoolisme de leurs parents. Mais revenons un moment au sens propre du mot, qui est étrange. But let's return for a moment to the literal meaning of the word, which is strange. En effet, le mot est emprunté à des langues germaniques. Indeed, the word is borrowed from Germanic languages. Mais on sait que drink, par exemple, en anglais, signifie boire et non trinquer. But we know that drink, for example, in English means to drink and not to toast. Mais là encore, c'est sûrement la sonorité du mot qui explique le glissement de sens. But here again, it is surely the sound of the word that explains the shift in meaning. « Trinquer », c'est donc choquer son verre contre celui de son voisin, mais le sens symbolique est fort. "To toast" thus means to clink one's glass against that of one's neighbor, but the symbolic meaning is strong. On trinque à quelque chose, de même qu'on peut dire qu'on boit à quelque chose, c'est-à-dire que le geste et le fait de boire, ensemble, s'accompagnent d'un vœu. We toast to something, just as we can say that we drink to something, meaning that the gesture and the act of drinking, together, are accompanied by a wish. On dédie de façon rituelle cette consommation à quelqu'un ou à la réalisation de quelque chose. We ritually dedicate this consumption to someone or to the achievement of something. Déjà, on boit « à la santé » de quelqu'un, en général de son compagnon de boisson, mais pas toujours. Already, we drink "to the health" of someone, usually of our drinking companion, but not always. Et cela s'accompagne d'une phrase également ritualisée : « à ta santé », « à la santé du roi de France », etc. And this is accompanied by a phrase that is also ritualized: "to your health", "to the health of the King of France", etc. Cette dernière phrase est souvent raccourcie par une ellipse. This last sentence is often shortened by an ellipsis. On dit « à la tienne » sans qu'il soit besoin de préciser. We say 'to your health' without the need for clarification. À tel point qu'on en oublie parfois que « à la tienne » signifie « à ta santé », et qu'on peut jouer sur les rimes, avec des expressions comme « à la tienne Étienne ». So much so that we sometimes forget that 'to your health' means 'to your health', and that we can play on the rhymes, with expressions like 'to your health Étienne'. Coproduction du Centre national de Documentation Pédagogique. http://www.cndp.fr/