Macron l'incendiaire
On ne peut accepter ni les factieux ni les factions.
La mobilisation contre la réforme des retraites qui se renforce,
Emmanuel Macron qui rajoute de l'huile sur le feu
et les violences lors de la manifestation parisienne.
C'est le sommaire du numéro 34 du Bourbon de Serge.
Si Emmanuel Macron pariait sur le pourrissement de la mobilisation, c'est raté.
Le recours à l'article 49-3 a, au contraire, ravivé l'incendie social.
Hier, en France, les manifestants étaient aussi nombreux que le 7 mars,
journée record de la mobilisation jusqu'ici.
3,5 millions de personnes ont défilé ce jeudi selon la CGT.
Le ministère de l'Intérieur, lui, n'en dénombre que 1,08 million.
Et il n'y a pas de raison que cela s'arrête.
L'intersyndicale appelle à une nouvelle manifestation mardi.
Car les directions des confédérations ont bien compris que la colère ne retombait pas.
La base veut s'exprimer.
Et la jeunesse est entrée dans la danse
comme en témoignent les manifestations sauvages
qui, chaque nuit, depuis une semaine,
épuisent les forces de l'ordre dans des courses-poursuites.
Le pays bouillonne.
Et l'intervention télévisée du chef de l'État, mercredi, n'a rien apaisé du tout.
Au contraire.
Vous avez dit : “La foule n'a pas de légitimité face au peuple qui s'exprime à travers les élus.”
Est-ce à dire, à vos yeux,
que le mécontement qui s'exprime dans les rues, aujourd'hui,
les manifestants, sont illégitimes ?
Non pas du tout, et merci de me permettre de clarifier cela,
parce que j'ai dit des choses hier, précises,
à des parlementaires qui ont subi des agressions.
Quand des groupes utilisent l'extrême violence pour agresser des élus de la République,
qu'ils soient parlementaires aujourd'hui ou maires,
malheureusement chaque semaine,
quand ils utilisent la violence, sans règle absolue,
parce qu'ils ne sont pas contents de quelque chose,
alors là ça n'est plus la République.
Or, la démocratie…
Convenez monsieur le président,
que ce ne sont pas des propos qui sont à même d'apaiser
ce qui se passe aujourd'hui dans les rues.
Pardon. Ce sont des propos qui clarifient.
Ce sont des propos qui clarifient.
Quand les Etats-Unis d'Amérique ont vécu ce qu'ils ont vécu, au Capitole,
quand le Brésil a vécu ce qu'il a vécu,
quand vous avez eu l'extrême violence en Allemagne, aux Pays-Bas,
ou parfois par le passé chez nous,
on ne peut accepter ni les factieux ni les factions.
Le chef de l'État aurait dû se souvenir de l'apostrophe de Victor Hugo
aux insurgés des trois journées de juillet 1830.
Les trois glorieuses qui mirent fin au règne de Charles X.
“Hier vous n'étiez qu'une foule. Vous êtes un peuple aujourd'hui.”
Et de fait, les scènes de violences qui ont émaillé la capitale
ont mis en évidence un basculement.
Au-delà des éternels blacks blocs,
c'est désormais une partie de la jeunesse qui se rebelle.
Et qui se laisse aller, elle aussi, à lancer du pavé.
Pas besoin de brandir un complot d'extrême gauche comme le fait Gérald Darmanin.
La radicalité de la rue découle directement du blocage politique.
Quand on escamote le débat démocratique à coups d'artifices de procédure,
il ne faut pas s'étonner qu'il s'exprime par des débordements dans les manifestations.
À Paris les affrontements ont duré plusieurs heures.
Esquisse de barricade,
feux de poubelles,
interpellations.
Cette compagnie d'intervention charge pour interpeller des individus.
Elle est aussitôt prise à partie par les manifestants.
Un peu plus loin, c'est une autre unité qui essuie des tirs d'engins pyrotechniques.
Les lancers de grenades de désencerclement s'enchaînent.
Place de l'Opéra, cette compagnie de CRS, dotée des derniers équipements,
se replie sous une pluie de projectiles.
Le cortège des syndicats s'approche de la place de l'Opéra, terme de la manifestation.
Service d'ordre syndical et gendarmes se font face un long moment.
Une compagnie d'intervention et la Brav foncent sur le cortège.
Les gradés peinent à stopper l'action.
Les unités de police se replient, caillassées.
Parvenus place de l'Opéra, les syndicats appellent à la dispersion.
De nombreux jeunes tentent de partir en manifestation sauvage vers le centre de Paris.
Place de l'Opéra et surtout dans les rues alentour, les incendies se multiplient.
Une partie des manifestants encore présents rebrousse chemin en direction de la Bastille.
Puis ils s'éparpillent dans les rues avoisinantes.
C'est l'heure des courses-poursuites et des incendies de poubelles.
Ce jeu du chat et de la souris va durer encore plusieurs heures.
Ce matin, le ministère de l'Intérieur annonçait “457 interpellations”
et 441 policiers et gendarmes blessés”.
À ceux qui entonneront le refrain du chaos et de la violence jamais vue,
on rappellera qu'au même endroit, le même jour, il y a 44 ans,
une manifestation syndicale avait elle aussi basculé dans la violence.
C'était le 23 mars 1979.
Les sidérurgistes lorrains montés à Paris pour défendre leurs emplois
affrontaient la police.
Les blacks blocs de l'époque s'appelaient "les autonomes".
Et le ministre de l'Intérieur, Christian Bonnet,
avait lui aussi agité, comme Gérald Darmanin hier soir,
le spectre du complot d'extrême gauche.
Pour avoir participé à l'époque à cette manifestation,
celle d'hier est restée mesurée en comparaison.
Il est vrai que du côté de Longwy, en Lorraine,
la police avait déserté le commissariat à force d'essuyer des jets d'engins incendiaires
et même des tirs d'armes à feu.
Dans la région, gendarmes et policiers rasaient les murs.
C'était ma minute la caméra de Serge explore le temps.
Sans caméra, d'ailleurs.
Emmanuel Macron a-t-il conscience que c'est désormais la paix civile qui est menacée.
Mercredi, en tout cas, il n'offrait au pays
que la perspective de petits arrangements avec la droite.
Et la mise au placard de la représentation nationale.
Elisabeth Borne a toujours votre confiance.
Oui. J'ai nommé Elisabeth Borne.
Je lui ai demandé de bâtir un programme législatif et un programme de gouvernement,
en lien avec la présidente de l'Assemblée nationale et le président du Sénat,
que j'ai vu hier,
pour avoir à la fois moins de textes de loi,
des textes plus courts, plus clairs.
Tout ne passe pas par la loi.
Le mandat que je lui ai donné,
c'est de continuer à élargir cette majorité autant qu'elle le pourra.
Il faut avoir beaucoup d'estime et de respect pour de nombreux parlementaires
qui sont venus en soutien de son texte.
Ils n'étaient pas la totalité d'un parti,
c'est pour ça que je dis que c'est dur de bâtir des coalitions
mais il y a des individualités politiques, avec leurs convictions,
qui sont prêtes à travailler avec les forces de la majorité.
Et donc je souhaite que la Première ministre puisse bâtir justement
cet élargissement de la majorité.
En clair, il faut s'attendre à une entrée prochaine au gouvernement
de ministres issus des Républicains, pour poursuivre exactement la même politique.
Cela aura certainement le mérite de la clarté.
Mais il n'est pas sûr que ce soit la réponse qu'attendent des millions de Français.
Le sens de l'État commande aujourd'hui d'entendre la clameur du pays.
Merci d'avoir regardé cette chronique.
Si vous l'avez appréciée, partagez-la.
Et n'oubliez pas les pouces.
Vous pouvez encore vous abonner à la chaîne.
En cliquant sur la cloche pour recevoir les notifications.
Vous pouvez aussi nous suivre sur Facebook et Twitter.
Les liens sont dans la description.
Et bien sûr, nous avons besoin de votre soutien financier pour continuer.
Je vous donne rendez-vous sur Donorbox.
Merci à tous ceux qui nous aident déjà. Votre confiance nous oblige.
Je vous dis à lundi pour Pol'Express.