Rire jaune
Rire de manière forcée.
Rire en dissimulant mal un mécontentement, un dépit, une gêne. Si le jaune est une couleur considérée comme positive (le soleil, donc la vie ; l'or, donc la richesse ; le blé, donc la nourriture...), il a aussi souvent été perçu de manière négative : Judas le traître était représenté comme vêtu de jaune ; "Être habillé en jaune", c'était, à l'époque médiévale et dans certains pays, signaler être juif (la loi le voulait ainsi, ce qui rappelle l'infamante étoile jaune au cours de la dernière guerre mondiale) ; Le jaune du soufre rappelait Lucifer ; "Être peint en jaune", c'était être trompé par sa femme ; Dans l'Espagne de l'inquisition, les victimes des autodafés étaient vêtues de jaune.
Certains situent cette expression pour la première fois, avec le sens actuel, chez Saint-Simon au XVIIIe siècle.
Et ils rattachent le 'jaune' au teint des hépatiques qui, compte tenu des désagréments de leur maladie et de l'humeur qui en découlait, ne pouvaient rire que de manière forcée. Mais en 1640, Oudin écrit déjà "il rit jaune comme farine", expression de l'argot de l'époque où 'farine' ne désigne pas l'aliment, mais quelqu'un de vicieux ("des gens de même farine" désignait, dans le dictionnaire de l'Académie Française de 1694, "des gens qui sont sujets à mêmes vices, ou qui sont de même cabale").
Autrement dit, dès cette époque, le "rire jaune" désignait un rire malsain, dissimulateur. C'est donc probablement de cette époque, et non pas des bilieux, que nous vient cette expression.