(1) Émeutes : pourquoi la France flambe - YouTube
Des fous furieux sont venus incendier ma maison,
essayer d'attenter à nos vies.
Que personne ne pense que derrière ces réseaux sociaux
il y a l'impunité.
Il y a aussi certaines images de jeunes
qui tentent de reproduire dans la vie réelle ce qu'ils voient dans la vie virtuelle.
Jamais les insoumis n'ont été pour la violence.
Monsieur Mélenchon est un danger pour la République.
La France insoumise qui d‘ailleurs pourrait s'appeler la France incendiaire.
Les jeux vidéo, les réseaux sociaux,
les parents défaillants, les Gilets jaunes,
la contestation de la réforme des retraites
ou même Jean-Luc Mélenchon
sont-ils vraiment responsables du soulèvement qui ébranle le pays ?
C'est le sommaire de ce numéro 34 de Pol'Express.
entièrement consacré aux racines de la crise.
En politique, le refus de régler les problèmes se paye toujours au prix fort.
Les journées et les nuits d'émeutes viennent le confirmer, une fois encore.
En 2017, à peine installé à l'Élysée,
Emmanuel Macron avait commandé à Jean-Louis Borloo un rapport sur les banlieues.
L'ancien ministre délégué à la Ville de Jacques Chirac
va prendre à coeur sa mission.
Plusieurs centaines d'élus locaux et d'associations sont consultés.
En avril 2018, il remet à Édouard Philippe un plan de bataille.
De la rénovation urbaine au rôle de la police en passant par la lutte contre la pauvreté,
le document ne fait l'économie d'aucune question.
Il est salué par des élus locaux de tous bords.
Mais voilà, un an après avoir commandé le rapport,
Emmanuel Macron a changé d'avis.
Il ne veut plus de plan.
Il mise désormais sur les bons résultats de l'économie française.
C'est la théorie du ruissellement.
La prospérité des uns irriguera les quartiers en déshérence.
On croulera sous les offres d'emploi
et les enfants feront des rondes pour célébrer la mondialisation heureuse.
Le rapport Borloo, lui, sera rangé dans un tiroir d'où il ne ressortira jamais.
C'est la facture de ce renoncement politique que la France paye depuis six jours.
Des centaines de communes touchées. Plus de 5 000 véhicules incendiés.
Un millier de bâtiments brûlés, dégradés ou pillés :
des centres commerciaux, des agences bancaires,
des débits de tabac, des enseignes de mode et de sport,
des mairies, des commissariats, des brigades de gendarmerie.
45 000 policiers sont mobilisés.
Les unités spécialisées ont été mises à contribution :
le RAID, le GIGN
ou la BRI dont un blindé, sur ces images,
tente de pénétrer dans la cité Pablo Picasso de Nanterre.
Avant d'être contraint de faire demi-tour sous la pression des émeutiers.
À Nîmes, à Vénissieux et dans le 13e arrondissement parisien,
les forces de l'ordre ont essuyé des tirs d'armes à feu.
À ce jour, plus de 3 000 personnes ont été placées en garde à vue.
570 ont été déférées devant la justice.
Sur le terrain, au moins 7 journalistes ont été victimes de violences et de vols.
Des élus ont été agressés.
À Pontoise dans le Val-d'Oise, à Montluçon dans l'Allier
ou à L'Haÿ-les-Roses dans le Val-de-Marne.
Dans cette dernière commune,
un véhicule enflammé a été lancé contre le domicile du maire LR Vincent Jeanbrun,
obligeant son épouse et ses deux jeunes enfants à fuir.
Non, on n'allait pas laisser brûler les équipements municipaux.
On n'allait pas laisser brûler l'hôtel de ville.
C'est vrai que je l'ai dit, je l'ai affirmé, j'ai voulu dire : “On tiendra. On résistera”.
Et j'ai l'impression que c'est ça qui a déplu.
C'est ça qui fait que des fous furieux sont venus incendier ma maison,
essayer d'attenter à nos vies.
Si ce lundi les violences semblent décroître, la partie n'est pas encore gagnée.
Le moindre incident peut relancer l'engrenage de la destruction et de l'affrontement.
L'ampleur du soulèvement a surpris tout le monde.
Jamais le mimétisme de l'émeute n'avait atteint de pareils niveaux.
Même en 2005.
Pour le gouvernement, l'explication est technique plutôt que politique.
Si le mouvement s'est propagé aussi rapidement, a expliqué le Garde des sceaux,
c'est à cause des réseaux sociaux et notamment de Snapchat.
Éric Dupond-Moretti croit avoir trouvé la parade :
il a demandé aux opérateurs téléphoniques
de communiquer à la justice les adresses IP de tous ceux qui appellent à la violence.
Je veux que la jeunesse sache, de façon claire,
que les procureurs de ce pays iront chercher l'identité
des utilisateurs des réseaux, notamment Snapchat,
qui sont pour ces jeunes un vecteur de communication
pour donner le lieu, le moment et la cible de l'agression.
Que personne ne pense
que derrière ces réseaux sociaux il y a l'impunité.
Le ministre de la justice a identifié un second responsable : les parents.
Le président de la République, ce matin,
a rappelé que ce n'est pas l'État qui éduque les enfants, mais les parents.
Chaque fois que des parents seront en capacité d'exercer leur autorité parentale
et qu'ils ne le feront pas,
il y a une responsabilité pénale que je souhaite mettre en oeuvre.
Que des parents, souvent isolés, aient baissé les bras, c'est certain.
Mais peut-on sérieusement réduire ces émeutes à un déficit d'autorité parentale ?
C'est un peu court.
Comme la grille de lecture proposée hier par Olivier Véran.
Peut-être que ces jeunes ils ont aussi été exposés
à des images de pillages des villes,
dans le mouvement des gilets jaunes lorsque c'était violent dans les centre-villes
ou lors de certaines manifestations qui ont dégénéré avec les black blocs.
Il y a aussi certaines images de jeunes
qui tentent de reproduire dans la vie réelle ce qu'ils voient dans la vie virtuelle.
L'un des jeux à la mode, c'est un jeu dans lequel vous devez faire du carjacking.
Résumons : c'est la faute à Snapchat,
aux parents, aux gilets jaunes,
aux violences dans les manifestations contre la réforme des retraites
et aux jeux vidéo.
Mais jamais, au grand jamais, la République n'est pour quelque chose
dans le naufrage d'une partie de sa jeunesse.
Puisque le gouvernement semble en panne d'analyse,
suggérons-lui quelques pistes de réflexion.
Ne me remerciez pas, c'est mon côté serviable.
Quand la valeur d'un individu se réduit à la quantité de biens qu'il peut acheter,
quand le consommateur prend le pas sur le citoyen,
croit-on encore que la morale et le civisme puissent se frayer un chemin ?
Quand l'État méprise aussi ouvertement ses agents
- les profs, les soignants, la justice et même les policiers -
peut-on attendre que la jeunesse respecte ces derniers ?
Quand un gamin gagne plus que ses parents
en faisant le guet pour les trafiquants de drogue,
que pèse encore la culture de l'effort et du mérite ?
Peut-on enfin s'étonner que ceux qui n'ont pas accès au monde de la marchandise
s'abandonnent au pillage ?
Oublie-t-on que la France compte 11 millions de pauvres.
Et que la dictature des marques s'exerce aussi
sur ceux qui n'ont ni les moyens de consommer,
ni les moyens d'échapper à cette aliénation mercantile.
Ce n'est certainement pas une excuse et encore moins une approbation des violences.
Mais c'est un début d'explication.
Ces émeutes questionnent d'abord le modèle néolibéral
dont Emmanuel Macron est l'ardent promoteur.
Vous trouvez que j'exagère ?
Alors regardez ces images que j'ai tournées samedi soir sur les Champs-Élysées.
Un rassemblement non déclaré devait s'y tenir.
Je me suis intéressé au dispositif mis en place par la préfecture de police.
Voyez comment sont positionnés les véhicules des forces de l'ordre.
À l'évidence, la principale préoccupation
était de protéger les enseignes de luxe et les grands groupes.
Combien de petits commerçants dont le magasin a été dévasté
auraient aimé bénéficier de cette protection ?
Sans parler des services municipaux et des équipements collectifs abandonnés au saccage.
Mais l'automutilation des banlieues inquiète moins le gouvernement
que le spectacle éventuel des Champs-Élysées dévastés.
À droite et à l'extrême droite, on tient le coupable.
Mais bon sang, c'est bien sûr Jean-Luc Mélenchon !
En appelant à préserver les écoles, les bibliothèques et les gymnases,
le leader de la France insoumise aurait légitimé toutes les autres destructions.
Cette phrase est un appel à pouvoir attaquer en toute liberté,
à inciter à attaquer les autres bâtiments,
y compris les commissariats et les mairies
puisqu'ils ne figuraient pas dans cette liste
qui étaient quelque part épargnés par le chef de bande.
Monsieur Mélenchon est un danger pour la République.
Evidemment on parlera de la France insoumise
qui d'ailleurs pourrait s'appeler la France incendiaire
parce que depuis le début des émeutes
ont tout fait pour inciter à l'insurrection et inciter au soulèvement
contre l'ordre républicain et contre les forces de l'ordre.
C'est encore une fois puni par la loi, c'est l'article 433-10 du Code pénal.
Il y a certainement 1 000 raisons de critiquer Jean-Luc Mélenchon.
Y compris à gauche.
Mais aucune de tordre ses propos.
Écoutez ce qu'il a vraiment dit.
Jamais les insoumis n'ont été pour la violence.
Et à chacun, et notamment aux plus jeunes
qui sont très nombreux aujourd'hui dans ces actions :
Non, l'école est le temple le plus sacré que tu aies, garçon ou fille,
il ne faut pas y toucher.
Les bibliothèques, le gymnase,
tout ce qui est à nous tous, qui est notre bien commun.
Au demeurant, combien de jeunes des quartiers, entre 13 et 17 ans
écoutent encore les responsables politiques ?
Combien connaissent Jean-Luc Mélenchon ?
Faire de ce dernier le chef d'orchestre clandestin du mouvement
est une escroquerie intellectuelle.
Quant à l'exécutif, le voilà contraint de remettre son ouvrage sur le métier.
A peine sorti des retraites, il est rattrapé par les banlieues.
Il y a une semaine, Emmanuel Macron était à Marseille pour relancer son quinquennat.
C'était il y a un siècle.
Il y a trois mois, Élisabeth Borne estimait que le pays avait besoin d'apaisement.
Elle ne pensait pas que l'histoire lui donnerait raison à ce point.
Mais cette crise majeure pourrait sonner le glas de son séjour à Matignon.
Car pour rebondir, Emmanuel Macron devra trouver une nouvelle figure de proue.
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On se retrouve jeudi pour un nouveau Bourbon de Serge.