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George Sand : La Mare au Diable, chapitre 5

chapitre 5

LA GUILLETTE

Le père Maurice trouva chez lui une vieille voisine qui était venue causer avec sa femme tout en cherchant de la braise pour allumer son feu. La mère Guillette habitait une chaumière fort pauvre à deux portées de fusil de la ferme. Mais c'était une femme d'ordre et de volonté. Sa pauvre maison était propre et bien tenue, et ses vêtements rapiécés avec soin annonçaient le respect de soi-même au milieu de la détresse.

Vous êtes venue chercher le feu du soir, mère Guillette, lui dit le vieillard. Voulez-vous quelque autre chose?

Non, père Maurice, répondit-elle; rien pour le moment. Je ne suis pas quémandeuse, vous le savez, et je n'abuse pas de la bonté de mes amis. C'est la vérité; aussi vos amis sont toujours prêts à vous rendre service. J'étais en train de causer avec votre femme, et je lui demandais si Germain se décidait enfin à se remarier. Vous n'êtes point une bavarde, répondit le père Maurice, on peut parler devant vous sans craindre les propos: ainsi je dirai à ma femme et à vous que Germain est tout à fait décidé; il part demain pour le domaine de Fourche. A la bonne heure! s'écria la mère Maurice; ce pauvre enfant! Dieu veuille qu'il trouve une femme aussi bonne et aussi brave que lui! Ah! il va à Fourche? observa la Guillette. Voyez comme ça se trouve! cela m'arrange beaucoup, et puisque vous me demandiez tout à l'heure si je désirais quelque chose, je vas vous dire, père Maurice, en quoi vous pouvez m'obliger. Dites, dites, vous obliger, nous le voulons.

Je voudrais que Germain prît la peine d'emmener ma fille avec lui. Où donc? à Fourche?

Non pas à Fourche; mais aux Ormeaux, où elle va demeurer le reste de l'année. Comment! dit la mère Maurice, vous vous séparez de votre fille?

Il faut bien qu'elle entre en condition et qu'elle gagne quelque chose. Ça me fait assez de peine et à elle aussi, la pauvre âme! Nous n'avons pas pu nous décider à nous quitter à l'époque de la Saint-Jean; mais voilà que la Saint-Martin arrive, et qu'elle trouve une bonne place de bergère dans les fermes des Ormeaux. Le fermier passait l'autre jour par ici en revenant de la foire. Il vit ma petite Marie qui gardait ses trois moutons sur le communal. "Vous n'êtes guère occupée, ma petite fille, qu'il lui dit; et trois moutons pour une pastoure, ce n'est guère. Voulez-vous en garder cent? je vous emmène. La bergère de chez nous est tombée malade, elle retourne chez ses parents, et si vous voulez être chez nous avant huit jours, vous aurez cinquante francs pour le reste de l'année jusqu'à la Saint-Jean." L'enfant a refusé, mais elle n'a pu se défendre d'y songer et de me le dire lorsqu'en rentrant le soir elle m'a vue triste et embarrassée de passer l'hiver, qui va être rude et long, puisqu'on a vu, cette année, les grues et les oies sauvages traverser les airs un grand mois plus tôt que de coutume. Nous avons pleuré toutes deux; mais enfin le courage est venu. Nous nous sommes dit que nous ne pouvions pas rester ensemble, puisqu'il y a à peine de quoi faire vivre une seule personne sur notre lopin de terre; et puisque Marie est en âge (la voilà qui prend seize ans), il faut bien qu'elle fasse comme les autres, qu'elle gagne son pain et qu'elle aide sa pauvre mère. Mère Guillette, dit le vieux laboureur, s'il ne fallait que cinquante francs pour vous consoler de vos peines et vous dispenser d'envoyer votre enfant au loin, vrai, je vous les ferais trouver, quoique cinquante francs pour des gens comme nous ça commence à peser. Mais en toutes choses il faut consulter la raison autant que l'amitié. Pour être sauvée de la misère de cet hiver, vous ne le serez pas de la misère à venir, et plus votre fille tardera à prendre un parti, plus elle et vous aurez de peine à vous quitter La petite Marie se fait grande et forte, et elle n'a pas de quoi s'occuper chez vous. Elle pourrait y prendre l'habitude de la fainéantise Oh! pour cela, je ne le crains pas, dit la Guillette. Marie est courageuse autant que fille riche et à la tête d'un gros travail puisse l'être. Elle ne reste pas un instant les bras croisés, et quand nous n'avons pas d'ouvrage elle nettoie et frotte nos pauvres meubles qu'elle rend clairs comme des miroirs. C'est une enfant qui vaut son pesant d'or, et j'aurais bien mieux aimé qu'elle entrât chez vous comme bergère que d'aller si loin chez des gens que je ne connais pas. Vous l'auriez prise à la Saint-Jean, si nous avions su nous décider; mais à présent vous avez loué tout votre monde, et ce n'est qu'à la Saint-Jean de l'autre année que nous pourrons y songer. Eh! j'y consens de tout mon cur, Guillette! Cela me fera plaisir. Mais en attendant, elle fera bien d'apprendre un état et de s'habituer à servir les autres. Oui, sans doute; le sort en est jeté. Le fermier des Ormeaux l'a fait demander ce matin; nous avons dit oui, et il faut qu'elle parte. Mais la pauvre enfant ne sait pas le chemin, et je n'aimerais pas à l'envoyer si loin toute seule. Puisque votre gendre va à Fourche demain, il peut bien l'emmener. Il paraît que c'est tout à côté du domaine où elle va, à ce qu'on m'a dit; car je n'ai jamais fait ce voyage-là. C'est tout à côté, et mon gendre la conduira. Cela se doit; il pourra même la prendre en croupe sur la jument, ce qui ménagera ses souliers. Le voilà qui rentre pour souper. Dis- moi, Germain, la petite Marie à la mère Guillette s'en va bergère aux Ormeaux. Tu la conduiras sur ton cheval, n'est-ce pas? C'est bien, répondit Germain qui était soucieux, mais toujours disposé à rendre service à son prochain. Dans notre monde à nous, pareille chose ne viendrait pas à la pensée d'une mère, de confier une fille de seize ans à un homme de vingt-huit; car Germain n'avait réellement que vingt- huit ans; et quoique, selon les idées de son pays, il passât pour vieux au point de vue du mariage, il était encore le plus bel homme de l'endroit. Le travail ne l'avait pas creusé et flétri comme la plupart des paysans qui ont dix années de labourage sur la tête. Il était de force à labourer encore dix ans sans paraître vieux, et il eût fallu que le préjugé de l'âge fût bien fort sur l'esprit d'une jeune fille pour l'empêcher de voir que Germain avait le teint frais, l'il vif et bleu comme le ciel de mai, la bouche rose, des dents superbes, le corps élégant et souple comme celui d'un jeune cheval qui n'a pas encore quitté le pré. Mais la chasteté des murs est une tradition sacrée dans certaines campagnes éloignées du mouvement corrompu des grandes villes, et, entre toutes les familles de Belair, la famille de Maurice était réputée honnête et servant la vérité. Germain s'en allait chercher femme; Marie était une enfant trop jeune et trop pauvre pour qu'il y songeât dans cette vue, et, à moins d'être un sans cur et un mauvais homme , il était impossible qu'il eût une coupable pensée auprès d'elle. Le père Maurice ne fut donc nullement inquiet de lui voir prendre en croupe cette jolie fille; la Guillette eût cru lui faire injure si elle lui eût recommandé de la respecter comme sa sur; Marie monta sur la jument en pleurant, après avoir vingt fois embrassé sa mère et ses jeunes amies. Germain, qui était triste pour son compte, compatissait d'autant plus à son chagrin, et s'en alla d'un air sérieux, tandis que les gens du voisinage disaient adieu de la main à la pauvre Marie sans songer à mal.

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chapitre 5 Kapitel 5 chapter 5 capítulo 5 capítulo 5

LA GUILLETTE |Die Guillette |the GUILLET THE GUILLETTE ЛА ГИЛЬЕТТА

Le père Maurice trouva chez lui une vieille voisine qui était venue causer avec sa femme tout en cherchant de la braise pour allumer son feu. |||||||||||||||||||||Glut||anzünden|| |||||||old||||venue||||||||||coals|||| Father Maurice found at his house an old neighbor who had come to chat with his wife while looking for embers to light his fire. Отец Морис застал дома старого соседа, который пришел поболтать со своей женой в поисках углей для костра. La mère Guillette habitait une chaumière fort pauvre à deux portées de fusil de la ferme. |||||Hütte||||zwei Schussweiten|Gewehrschüsse||Gewehrschüsse|||Bauernhof |||||cottage||poor|||shots||rifle||| Mother Guillette lived in a very poor thatched cottage two gunshots from the farm. Мать Гильетт жила в очень бедном домике в двух выстрелах от фермы. Mais c'était une femme d'ordre et de volonté. ||||von Ordnung||| |||||||will But she was a woman of order and will. Но она была женщиной организованной и волевой. Sa pauvre maison était propre et bien tenue, et ses vêtements rapiécés avec soin annonçaient le respect de soi-même au milieu de la détresse. |||||||||||geflickt||Sorgfalt|kündeten von||||||||||Notlage |poor||||||kept||||patched||care|||||itself|||||| Her poor house was neat and tidy, and her neatly patched clothes heralded self-respect in the midst of distress. Его бедный дом был чистым и ухоженным, а тщательно залатанная одежда свидетельствовала о самоуважении в трудную минуту.

Vous êtes venue chercher le feu du soir, mère Guillette, lui dit le vieillard. ||venue|||||||||||elder You came to fetch the evening fire, Mother Guillette, said the old man. Вы пришли искать вечерний огонь, матушка Гильетт, - сказал старик. Voulez-vous quelque autre chose? Do you want something else? Хотите что-нибудь еще?

Non, père Maurice, répondit-elle; rien pour le moment. |||antwortete||||| No, Father Maurice, she replied; nothing yet. Je ne suis pas quémandeuse, vous le savez, et je n'abuse pas de la bonté de mes amis. ||||Bittstellerin||||||||||||| ||||beggar||||||abuse||||||| I am not a beggar, you know, and I do not abuse the kindness of my friends. Я не нищий, как вы знаете, и не злоупотребляю добротой своих друзей. C'est la vérité; aussi vos amis sont toujours prêts à vous rendre service. ||truth|||||||||| It's the truth; also your friends are always ready to help you. Это правда: ваши друзья всегда готовы оказать вам услугу. J'étais en train de causer avec votre femme, et je lui demandais si Germain se décidait enfin à se remarier. Ich war||||||||||||||||||| I was chatting with your wife, and I was asking her if Germain was finally making up his mind to remarry. Я разговаривал с вашей женой и спросил ее, не решил ли Жермен жениться снова. Vous n'êtes point une bavarde, répondit le père Maurice, on peut parler devant vous sans craindre les propos: ainsi je dirai à ma femme et à vous que Germain est tout à fait décidé; il part demain pour le domaine de Fourche. ||||geschwätzig||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||chatter|||||||||||fearing||words||||||||||||||||||||||||Fork You are not a gossip, replied Father Maurice, one can speak in front of you without fear of the words: thus I will tell my wife and to you that Germain is completely decided; he is leaving tomorrow for the Domaine de Fourche. Вы не из болтливых, - ответил преподобный Морис, - при вас можно говорить, не опасаясь быть отговоренным: так что я скажу вам и моей жене, что Жермен принял решение; завтра он уезжает в поместье Фурш. A la bonne heure! All in good time! s'écria la mère Maurice; ce pauvre enfant! cried Mother Maurice; that poor child! воскликнула матушка Морис, - бедное дитя! Dieu veuille qu'il trouve une femme aussi bonne et aussi brave que lui! |wants||||||||||| God grant he finds a woman as good and as brave as him! Дай Бог, чтобы он нашел такую же добрую и смелую женщину, как он сам! Ah! Ah! il va à Fourche? is he going to Fourche? Он едет в Форкс? observa la Guillette. observed|| Voyez comme ça se trouve! See how it turns out! Посмотрите, что из этого получилось! cela m'arrange beaucoup, et puisque vous me demandiez tout à l'heure si je désirais quelque chose, je vas vous dire, père Maurice, en quoi vous pouvez m'obliger. |passt mir gut|||da|||fragten||||||wollte|||||||||||||einen Gefallen tun |suits|||||||||||||||||||||||||oblige That suits me very much, and since you asked me earlier if I wanted anything, I am going to tell you, Father Maurice, how you can oblige me. Это очень удобно для меня, и раз уж вы спросили меня, не нужно ли мне чего-нибудь, я скажу вам, отец Морис, что вы можете для меня сделать. Dites, dites, vous obliger, nous le voulons. |||verpflichten||| Say, say, oblige you, we want it. Мы хотим вам помочь.

Je voudrais que Germain prît la peine d'emmener ma fille avec lui. |||||||to take|||| I would like Germain to take the trouble to take my daughter with him. Я бы хотела, чтобы Жермен взял мою дочь с собой. Où donc? Or so? Где? à Fourche? at Fork?

Non pas à Fourche; mais aux Ormeaux, où elle va demeurer le reste de l'année. Not||||||Abalone||||remain|||| Not at Fork; but in Les Ormeaux, where she will stay the rest of the year. Не в Форксе, а в Лез Ормо, где она пробудет до конца года. Comment! How? 'Or' What! dit la mère Maurice, vous vous séparez de votre fille? ||||||trennen sich||| ||||||separate||| said Mother Maurice, are you separating from your daughter? сказала матушка Морис, - вы расстаетесь со своей дочерью?

Il faut bien qu'elle entre en condition et qu'elle gagne quelque chose. She must enter into condition and earn something. Она должна быть в форме и что-то заработать. Ça me fait assez de peine et à elle aussi, la pauvre âme! |||ziemlich||||||||| |||||||||||poor|soul It hurts me enough and her too, poor soul! Мне и так больно, а тут еще она, бедняжка! Nous n'avons pas pu nous décider à nous quitter à l'époque de la Saint-Jean; mais voilà que la Saint-Martin arrive, et qu'elle trouve une bonne place de bergère dans les fermes des Ormeaux. |||||||||||||||||||||||||||||shepherd|||farms||Ormeaux We could not make up our minds to leave each other at the time of Midsummer's Day; but now the Saint-Martin arrives, and she finds a good place as a shepherdess in the farms of Ormeaux. Мы не могли заставить себя оставить друг друга в День середины лета, но наступил День святого Мартина, и она нашла хорошую работу пастушки на фермах Ле-Ормо. Le fermier passait l'autre jour par ici en revenant de la foire. |Der Bauer|||||||||| |farmer||||||||||fair The farmer was passing by here the other day on his way back from the fair. Фермер проезжал здесь на днях, возвращаясь с ярмарки. Il vit ma petite Marie qui gardait ses trois moutons sur le communal. |sah|||||hütete||||||Gemeindeland |saw|||||kept|||sheep|||communal He saw my little Marie who kept her three sheep on the communal. Он увидел мою маленькую Мари, которая присматривала за тремя овцами на лугу. "Vous n'êtes guère occupée, ma petite fille, qu'il lui dit; et trois moutons pour une pastoure, ce n'est guère. |||||||||||||||Hirtin||| ||hardly||||||||||sheep|||pasture|||hardly "You are not very busy, my little girl, he said to her; and three sheep for a shepherd, it is hardly. "Ты не очень-то занята, моя девочка, - сказал он ей, - а три овцы для пастушки - это не так уж много. Voulez-vous en garder cent? Do you want to keep a hundred? Хотите оставить себе сотню? je vous emmène. ||Ich bringe euch. ||takes I am taking you. Я возьму тебя. La bergère de chez nous est tombée malade, elle retourne chez ses parents, et si vous voulez être chez nous avant huit jours, vous aurez cinquante francs pour le reste de l'année jusqu'à la Saint-Jean." |shepherd|||||||||||||||||||||||||||||||||| Our shepherdess has fallen ill, she is returning to her parents, and if you want to be with us before eight days, you will have fifty francs for the rest of the year until Midsummer's Day. " Пастушка в нашем доме заболела, она возвращается к родителям, и если вы захотите быть у нас до восьми дней, то получите пятьдесят франков на весь год до середины лета". L'enfant a refusé, mais elle n'a pu se défendre d'y songer et de me le dire lorsqu'en rentrant le soir elle m'a vue triste et embarrassée de passer l'hiver, qui va être rude et long, puisqu'on a vu, cette année, les grues et les oies sauvages traverser les airs un grand mois plus tôt que de coutume. |||||||||||||||||zurückkehrend||||||||||||||||und||||||||Kraniche|||Wildgänse||||||||||||gewöhnlich ||||||||||||||||when|||||||||embarrassed||||||||||||||||cranes|||geese|||||||||||| The child refused, but she could not help thinking about it and telling me when, coming home in the evening, she saw me sad and embarrassed to spend the winter, which will be harsh and long, since this year we have seen cranes and wild geese cross the air a month earlier than usual. Ребенок отказался, но она не могла не думать об этом и не рассказывать мне, когда вечером возвращалась домой и видела меня грустным и смущенным от того, что мне предстоит пережить зиму, которая будет тяжелой и долгой, ведь в этом году журавли и дикие гуси пролетели на месяц раньше обычного. Nous avons pleuré toutes deux; mais enfin le courage est venu. ||cried|||||||| We both cried; but finally courage has come. Мы оба плакали, но в конце концов мужество пришло. Nous nous sommes dit que nous ne pouvions pas rester ensemble, puisqu'il y a à peine de quoi faire vivre une seule personne sur notre lopin de terre; et puisque Marie est en âge (la voilà qui prend seize ans), il faut bien qu'elle fasse comme les autres, qu'elle gagne son pain et qu'elle aide sa pauvre mère. |||||||||||||||||||||||||Grundstück|||||||||da ist sie||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||plot|||||||||||||seize||||||||||||||||||poor| We told ourselves that we couldn't stay together, since there is hardly enough to support a single person on our piece of land; and since Mary is old enough (here she is taking sixteen years), she must do like the others, earn her bread and help her poor mother. Мы сказали себе, что не можем оставаться вместе, поскольку на нашем участке земли едва хватает на одного человека, а поскольку Мари уже достаточно взрослая (ей сейчас исполняется шестнадцать), она должна делать то же, что и остальные, - зарабатывать себе на хлеб и помогать своей бедной матери. Mère Guillette, dit le vieux laboureur, s'il ne fallait que cinquante francs pour vous consoler de vos peines et vous dispenser d'envoyer votre enfant au loin, vrai, je vous les ferais trouver, quoique cinquante francs pour des gens comme nous ça commence à peser. ||||||||musste man nur||||||||||||davon abhalten||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||pains|||||||||||||would||although||||||||||| Mother Guillette, said the old plowman, if only fifty francs were needed to console you for your troubles and exempt you from sending your child away, true, I would make you find them, although fifty francs for people like us. begins to weigh. Матушка Гильетт, - сказал старый пахарь, - если бы вам нужно было всего пятьдесят франков, чтобы утешить вас за ваши неприятности и избавить от необходимости отсылать ребенка, я бы позаботился о том, чтобы вы их получили, хотя пятьдесят франков для таких людей, как мы, - это многовато. Mais en toutes choses il faut consulter la raison autant que l'amitié. |||||||||as much|| But in all things we must consult reason as much as friendship. Но во всем нужно руководствоваться разумом, как и дружбой. Pour être sauvée de la misère de cet hiver, vous ne le serez pas de la misère à venir, et plus votre fille tardera à prendre un parti, plus elle et vous aurez de peine à vous quitter La petite Marie se fait grande et forte, et elle n'a pas de quoi s'occuper chez vous. |||||||||||||||||||||||zögern wird||||||||||||||||||||||||sie||||||| To be saved from the misery of this winter, you will not be saved from the misery to come, and the longer your daughter takes to make up her mind, the more she and you will have difficulty in leaving you. Little Marie grows tall and strong, and she has nothing to do with you. Если вы спасетесь от страданий этой зимы, то не спасетесь от грядущих бед, и чем дольше ваша дочь будет принимать решение, тем труднее будет и ей, и вам расстаться Маленькая Мари растет большой и сильной, и ей нечем занять себя дома. Elle pourrait y prendre l'habitude de la fainéantise |||||||Faulheit |||||||laziness She could get used to laziness there Она могла бы привыкнуть к лени... Oh! pour cela, je ne le crains pas, dit la Guillette. |||||fürchten|||| |||||fear|||| for that, I am not afraid, said la Guillette. Marie est courageuse autant que fille riche et à la tête d'un gros travail puisse l'être. |||as|||||||||||| Marie is as brave as a rich girl and the head of a big job can be. Мари храбра настолько, насколько может быть храброй богатая девушка с большой работой. Elle ne reste pas un instant les bras croisés, et quand nous n'avons pas d'ouvrage elle nettoie et frotte nos pauvres meubles qu'elle rend clairs comme des miroirs. ||||||||die Arme verschränkt||||||Arbeit||||reibt ab|||Möbelstücke||||||Spiegeln ||||||||||||||of work||||scrubs||poor|furniture||||||mirrors She does not stay a moment with her arms crossed, and when we have no work she cleans and rubs our poor furniture which she makes as clear as mirrors. Она ни минуты не сидит на месте, а когда мы не работаем, чистит и моет нашу бедную мебель, делая ее чистой, как зеркало. C'est une enfant qui vaut son pesant d'or, et j'aurais bien mieux aimé qu'elle entrât chez vous comme bergère que d'aller si loin chez des gens que je ne connais pas. ||||||sein Gewicht wert||||||||einträte|||||||||||||||| ||||||weight||||||||entered||||shepherd|||||||||||| She is a child who is worth her weight in gold, and I would have liked much better for her to come to you as a shepherdess than to go so far to see people I do not know. Она - ребенок на вес золота, и я бы предпочел, чтобы она жила с вами в качестве пастушки, а не уезжала так далеко, чтобы жить с незнакомыми мне людьми. Vous l'auriez prise à la Saint-Jean, si nous avions su nous décider; mais à présent vous avez loué tout votre monde, et ce n'est qu'à la Saint-Jean de l'autre année que nous pourrons y songer. Sie|hätten genommen||||||||||||||||||||||||||||||||||| |would have|taken||||||||known||||||||rented||||||||||||||||||think You would have taken it on Midsummer Day, if we had known how to make up our mind; but now you have praised everyone, and it is only on Midsummer's Day the other year that we can think about it. Вы бы забрали ее в день Середины лета, если бы мы могли решиться; но теперь вы наняли всех своих людей, и только в день Середины лета следующего года мы сможем об этом подумать. Eh! Hey! j'y consens de tout mon cur, Guillette! |Ich stimme zu||||| |||||heart| I consent to it with all my heart, Guillette! Я всем сердцем согласна с этим, Гильетта! Cela me fera plaisir. ||will| It will make me happy. Я буду очень рад. Mais en attendant, elle fera bien d'apprendre un état et de s'habituer à servir les autres. |||||||||||sich gewöhnen|||| ||||will||||||||||| But in the meantime, she will do well to learn one state and get used to serving others. А пока ей не помешает выучить штат и привыкнуть служить другим. Oui, sans doute; le sort en est jeté. |||||ist entschieden|ist| Probably yes; the die is cast. Да, несомненно; смерть уже брошена. Le fermier des Ormeaux l'a fait demander ce matin; nous avons dit oui, et il faut qu'elle parte. |farmer||Abalone|||||||||||||| The farmer from Ormeaux sent for it this morning; we said yes, and she has to go. Фермер из Лез Ормо попросил ее сегодня утром, мы согласились, и она должна уехать. Mais la pauvre enfant ne sait pas le chemin, et je n'aimerais pas à l'envoyer si loin toute seule. |||||||||||||||||ganz| ||||||||path|||wouldn't||||||| But the poor child doesn't know the way, and I wouldn't like to send her so far alone. Но бедное дитя не знает дороги, и мне не хотелось бы отправлять ее в такую даль одну. Puisque votre gendre va à Fourche demain, il peut bien l'emmener. ||||||||||mitnehmen |||||Fork|||||take Since your son-in-law is going to Fourche tomorrow, he may well take her. Раз уж ваш зять завтра едет в Форкс, он мог бы взять его с собой. Il paraît que c'est tout à côté du domaine où elle va, à ce qu'on m'a dit; car je n'ai jamais fait ce voyage-là. ||||||||Anwesen|||||||||||||||| It seems that it is very close to the domain where she is going, I have been told; because I never made that trip. Мне сказали, что это рядом с поместьем, куда она направляется, но я никогда не ездил туда. C'est tout à côté, et mon gendre la conduira. ||||||||fahren wird ||||||||will drive It's right next door, and my son-in-law will drive it. Это совсем рядом, и мой зять отвезет ее. Cela se doit; il pourra même la prendre en croupe sur la jument, ce qui ménagera ses souliers. |||||||||||||||schonen wird||Schuhe |||||||||croup|||mare|||will preserve||shoes It should; he can even take her on the back of the mare, which will save her shoes. Так и должно быть; он может даже взять ее в крестец на кобыле, что избавит ее от обуви. Le voilà qui rentre pour souper. Here he is coming home for supper. Он вернулся к ужину. Dis- moi, Germain, la petite Marie à la mère Guillette s'en va bergère aux Ormeaux. |||||Marie||||||||| ||||||||||||shepherd|| Tell me, Germain, little Marie with Mother Guillette is going shepherdess to Ormeaux. Скажи мне, Жермен, маленькая Мари à la mère Guillette собирается стать пастушкой в Лез Ормо. Tu la conduiras sur ton cheval, n'est-ce pas? ||wirst reiten|||||| ||will drive|||horse||| You'll ride her on your horse, won't you? Вы ведь будете ездить на ней? C'est bien, répondit Germain qui était soucieux, mais toujours disposé à rendre service à son prochain. ||||||besorgt|||bereit|||||| ||||||concerned||||||||| That's good, replied Germain, who was anxious, but always ready to be of service to his neighbor. Прекрасно, - ответил Жермен, который был обеспокоен, но всегда был готов оказать услугу своему соседу. Dans notre monde à nous, pareille chose ne viendrait pas à la pensée d'une mère, de confier une fille de seize ans à un homme de vingt-huit; car Germain n'avait réellement que vingt- huit ans; et quoique, selon les idées de son pays, il passât pour vieux au point de vue du mariage, il était encore le plus bel homme de l'endroit. ||||||||käme||||||||anvertrauen|||||||||||||||||||||||||||||galt als alt||||||||||||||||| |||||such|||||||||||||||seventeen|||||||||||really||||||although||||||||||||||||||||||||| In our own world, such a thing would not occur to a mother, to entrust a girl of sixteen to a man of twenty-eight; for Germain was really only twenty-eight; and although, according to the ideas of his country, he was considered old from the point of view of marriage, he was still the most handsome man in the place. В нашем мире матери не пришло бы в голову доверить шестнадцатилетнюю дочь двадцативосьмилетнему мужчине, а Жермену действительно было всего двадцать восемь, и хотя, согласно представлениям его страны, он был уже стар с точки зрения брака, он все еще был самым красивым мужчиной в этом месте. Le travail ne l'avait pas creusé et flétri comme la plupart des paysans qui ont dix années de labourage sur la tête. |||||||verwelkt|||||||||||||| |||||dug||wilted|||most||peasants||||||||| Work had not hollowed it out and withered it like most peasants who have ten years of plowing on their heads. Работа не вскружила ему голову и не иссушила, как большинству фермеров, у которых за плечами десять лет пахоты. Il était de force à labourer encore dix ans sans paraître vieux, et il eût fallu que le préjugé de l'âge fût bien fort sur l'esprit d'une jeune fille pour l'empêcher de voir que Germain avait le teint frais, l'il vif et bleu comme le ciel de mai, la bouche rose, des dents superbes, le corps élégant et souple comme celui d'un jeune cheval qui n'a pas encore quitté le pré. ||||||||||||||||||Vorurteil||||||||||||ihn daran hindern|||||||Teint||||||||||||||||prächtige|||||geschmeidig|||||||||||| ||||||||||appear|||||||||||was|||||||||prevent|||||||complexion|fresh||vivid|||||sky||may|||||||||||supple|||||horse||||||| He had enough strength to plow another ten years without appearing old, and the prejudice of age had had to be very strong on a young girl's mind to prevent it from seeing that Germain had a fresh complexion. 'he bright and blue like the May sky, his mouth pink, superb teeth, the body elegant and supple like that of a young horse which has not yet left the meadow. Он был достаточно силен, чтобы пахать еще десять лет и не выглядеть старым, и предрассудки возраста должны были быть очень сильны в сознании молодой девушки, чтобы она не увидела, что у Жермена свежий цвет лица, глаза яркие и голубые, как майское небо, розовый рот, великолепные зубы и тело такое же изящное и гибкое, как у молодой лошади, еще не покинувшей луг. Mais la chasteté des murs est une tradition sacrée dans certaines campagnes éloignées du mouvement corrompu des grandes villes, et, entre toutes les familles de Belair, la famille de Maurice était réputée honnête et servant la vérité. Aber||Keuschheit|||||||||||||||||||||||Belair||||||||||| ||chastity||walls|||||||||||corrupted||||||||||Belair||||||||||| But wall chastity is a sacred tradition in some countryside far removed from the corrupt big city movement, and among all of Belair's families, Maurice's family was deemed to be honest and serving the truth. Но целомудрие стен - священная традиция в некоторых сельских районах, удаленных от коррумпированного движения больших городов, и из всех семей в Бельаре семья Мориса слыла честной и служила правде. Germain s'en allait chercher femme; Marie était une enfant trop jeune et trop pauvre pour qu'il y songeât dans cette vue, et, à moins d'être un  sans cur et un  mauvais homme , il était impossible qu'il eût une coupable pensée auprès d'elle. |||||||||||||||||daran dachte|||||||||||||||||||||||| |||||||||||||poor||||||||||||||heart|||||||||would||guilty||with| Germain was going to seek a wife; Marie was too young and too poor a child for him to think of it in this sight, and, unless he was a heartless and a bad man, it was impossible for him to have a guilty thought near her. Жермен собирался искать себе жену; Мари была слишком молода и слишком бедным ребенком, чтобы он мог думать о ней в таком свете, и, если только он не был бессердечным и злым человеком, у него не могло возникнуть и мысли о вине перед ней. Le père Maurice ne fut donc nullement inquiet de lui voir prendre en croupe cette jolie fille; la Guillette eût cru lui faire injure si elle lui eût recommandé de la respecter comme sa sur; Marie monta sur la jument en pleurant, après avoir vingt fois embrassé sa mère et ses jeunes amies. |||||||||||||||||||||||beleidigen|||||||||||||stieg auf||||||||||geküsst||||||junge Freundinnen ||||was|||||||||croup||||||would|believed|||injure|||||recommended|||||||||||mare||crying||||||||||| Father Maurice was therefore not at all worried to see him take this pretty girl on his back; La Guillette would have thought it was an insult to him if she had recommended that he respect her as his sister; Marie climbed onto the mare, weeping, after having kissed her mother and her young friends twenty times. Отец Морис ничуть не обеспокоился, увидев, как он везет на спине эту прелестную девушку; Ла Гильетт сочла бы, что поступила несправедливо, если бы посоветовала ему уважать ее как сестру; Мари взобралась на кобылу, плача, после того как двадцать раз поцеловала мать и своих юных друзей. Germain, qui était triste pour son compte, compatissait d'autant plus à son chagrin, et s'en alla d'un air sérieux, tandis que les gens du voisinage disaient adieu de la main à la pauvre Marie sans songer à mal. |||||||mitfühlte mit|||||||||||||||||||||||||||||| |||||||compassion|all the more||||grief||||||||||||neighborhood||goodbye|||||||||thought|| Germain, who was sad on his own account, sympathized all the more for his grief, and left with a serious air, while the people of the neighborhood waved goodbye to poor Marie without thinking of harm. Жермен, который и сам был опечален, тем более сочувствовал ее горю и ушел с серьезным видом, в то время как жители окрестностей махали бедной Мари на прощание, не думая о чем-то плохом.