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Adolphe, Benjamin Constant, CHAPITRE PREMIER

CHAPITRE PREMIER

Je venais de finir à vingt-deux ans mes études à l'université de Gottingue. — L'intention de mon père, ministre de l'électeur de *, était que je parcourusse les pays les plus remarquables de l'Europe. Il voulait ensuite m'appeler auprès de lui, me faire entrer dans le département dont la direction lui était confiée, et me préparer à le remplacer un jour. J'avais obtenu, par un travail assez opiniâtre, au milieu d'une vie très-dissipée, des succès qui m'avaient distingué de mes compagnons d'étude, et qui avaient fait concevoir à mon père sur moi des espérances probablement fort exagérées. Ces espérances l'avaient rendu très-indulgent pour beaucoup de fautes que j'avais commises. Il ne m'avait jamais laissé souffrir des suites de ces fautes. Il avait toujours accordé, quelquefois prévenu mes demandes à cet égard.

Malheureusement sa conduite était plutôt noble et généreuse que tendre. J'étais pénétré de tous ses droits à ma reconnaissance et à mon respect ; mais aucune confiance n'avait existé jamais entre nous. Il avait dans l'esprit je ne sais quoi d'ironique qui convenait mal à mon caractère. Je ne demandais alors qu'à me livrer à ces impressions primitives et fougueuses qui jettent l'âme hors de la sphère commune, et lui inspirent le dédain de tous les objets qui l'environnent. Je trouvais dans mon père, non pas un censeur, mais un observateur froid et caustique, qui souriait d'abord de pitié, et qui finissait bientôt la conversation avec impatience. Je ne me souviens pas, pendant mes dix-huit premières années, d'avoir eu jamais un entretien d'une heure avec lui. Ses lettres étaient affectueuses, pleines de conseils raisonnables et sensibles ; mais à peine étions-nous en présence l'un de l'autre, qu'il y avait en lui quelque chose de contraint que je ne pouvais m'expliquer, et qui réagissait sur moi d'une manière pénible. Je ne savais pas alors ce que c'était que la timidité, cette souffrance intérieure qui nous poursuit jusque dans l'âge le plus avancé, qui refoule sur notre cœur les impressions les plus profondes, qui glace nos paroles, qui dénature dans notre bouche tout ce que nous essayons de dire, et ne nous permet de nous exprimer que par des mots vagues ou une ironie plus ou moins amère, comme si nous voulions nous venger sur nos sentiments mêmes de la douleur que nous éprouvons à ne pouvoir les faire connaître. Je ne savais pas que, même avec son fils, mon père était timide, et que souvent, après avoir longtemps attendu de moi quelques témoignages d'affection que sa froideur apparente semblait m'interdire, il me quittait les yeux mouillés de larmes, et se plaignait à d'autres de ce que je ne l'aimais pas. Ma contrainte avec lui eut une grande influence sur mon caractère. Aussi timide que lui, mais plus agité, parce que j'étais plus jeune, je m'accoutumai à renfermer en moi-même tout ce que j'éprouvais, à ne former que des plans solitaires, à ne compter que sur moi pour leur exécution, à considérer les avis, l'intérêt, l'assistance et jusqu'à la seule présence des autres comme une gêne et comme un obstacle. Je contractai l'habitude de ne jamais parler de ce qui m'occupait, de ne me soumettre à la conversation que comme à une nécessité importune, et de l'animer alors par une plaisanterie perpétuelle qui me la rendait moins fatigante, et qui m'aidait à cacher mes véritables pensées. De là une certaine absence d'abandon, qu'aujourd'hui encore mes amis me reprochent, et une difficulté de causer sérieusement que j'ai toujours peine à surmonter. Il en résulta en même temps un désir ardent d'indépendance, une grande impatience des liens dont j'étais environné, une terreur invincible d'en former de nouveaux. Je ne me trouvais à mon aise que tout seul, et tel est, même à présent, l'effet de cette disposition d'âme, que, dans les circonstances les moins importantes, quand je dois choisir entre deux partis, la figure humaine me trouble, et mon mouvement naturel est de la fuir pour délibérer en paix. Je n'avais point cependant la profondeur d'égoïsme qu'un tel caractère paraît annoncer : tout en ne m'intéressant qu'à moi, je m'intéressais faiblement à moi-même. Je portais au fond de mon cœur un besoin de sensibilité dont je ne m'apercevais pas, mais qui, ne trouvant point à se satisfaire, me détachait successivement de tous les objets qui tour à tour attiraient ma curiosité. Cette indifférence sur tout s'était encore fortifiée par l'idée de la mort, idée qui m'avait frappé très-jeune, et sur laquelle je n'ai jamais conçu que les hommes s'étourdissent si facilement. J'avais, à l'âge de dix-sept ans, vu mourir une femme âgée, dont l'esprit, d'une tournure remarquable et bizarre, avait commencé à développer le mien. Cette femme, comme tant d'autres, s'était, à l'entrée de sa carrière, lancée vers le monde, qu'elle ne connaissait pas, avec le sentiment d'une grande force d'âme et de facultés vraiment puissantes. Comme tant d'autres aussi, faute de s'être pliée à des convenances factices, mais nécessaires, elle avait vu ses espérances trompées, sa jeunesse passer sans plaisir ; et la vieillesse enfin l'avait atteinte sans la soumettre. Elle vivait dans un château voisin d'une de nos terres, mécontente et retirée, n'ayant que son esprit pour ressource, et analysant tout avec son esprit. Pendant près d'un an, dans nos conversations inépuisables, nous avions envisagé la vie sous toutes ses faces, et la mort toujours pour terme de tout ; et après avoir tant causé de la mort avec elle, j'avais vu la mort la frapper à mes yeux. Cet événement m'avait rempli d'un sentiment d'incertitude sur la destinée, et d'une rêverie vague qui ne m'abandonnait pas. Je lisais de préférence dans les poëtes ce qui rappelait la brièveté de la vie humaine. Je trouvais qu'aucun but ne valait la peine d'aucun effort. Il est assez singulier que cette impression se soit affaiblie précisément à mesure que les années se sont accumulées sur moi. Serait-ce parce qu'il y a dans l'espérance quelque chose de douteux, et que, lorsqu'elle se retire de la carrière de l'homme, cette carrière prend un caractère plus sévère, mais plus positif ? Serait-ce que la vie semble d'autant plus réelle, que toutes les illusions disparaissent, comme la cime des rochers se dessine mieux dans l'horizon lorsque les nuages se dissipent ? Je me rendis, en quittant Gottingue, dans la petite ville de D*. Cette ville était la résidence d'un prince qui, comme la plupart de ceux de l'Allemagne, gouvernait avec douceur un pays de peu d'étendue, protégeait les hommes éclairés qui venaient s'y fixer, laissait à toutes les opinions une liberté parfaite, mais qui, borné par l'ancien usage à la société de ses courtisans, ne rassemblait par là même autour de lui que des hommes en grande partie insignifiants ou médiocres. Je fus accueilli dans cette cour avec la curiosité qu'inspire naturellement tout étranger qui vient rompre le cercle de la monotonie et de l'étiquette. Pendant quelques mois, je ne remarquai rien qui pût captiver mon attention. J'étais reconnaissant de l'obligeance qu'on me témoignait ; mais tantôt ma timidité m'empêchait d'en profiter, tantôt la fatigue d'une agitation sans but me faisait préférer la solitude aux plaisirs insipides que l'on m'invitait à partager. Je n'avais de haine contre personne, mais peu de gens m'inspiraient de l'intérêt ; or, les hommes se blessent de l'indifférence ; ils l'attribuent à la malveillance ou à l'affectation ; ils ne veulent pas croire qu'on s'ennuie avec eux naturellement. Quelquefois je cherchais à contraindre mon ennui ; je me réfugiais dans une taciturnité profonde : on prenait cette taciturnité pour du dédain. D'autres fois, lassé moi-même de mon silence, je me laissais aller à quelques plaisanteries, et mon esprit, mis en mouvement, m'entraînait au-delà de toute mesure. Je révélais en un jour tous les ridicules que j'avais observés durant un mois. Les confidents de mes épanchements subits et involontaires ne m'en savaient aucun gré, et avaient raison ; car c'était le besoin de parler qui me saisissait, et non la confiance. J'avais contracté dans mes conversations avec la femme qui, la première, avait développé mes idées, une insurmontable aversion pour toutes les maximes communes et pour toutes les formules dogmatiques. Lors donc que j'entendais la médiocrité disserter avec complaisance sur des principes bien établis, bien incontestables en fait de morale, de convenance ou de religion, choses qu'elle met assez volontiers sur la même ligne, je me sentais poussé à la contredire, non que j'eusse adopté des opinions opposées, mais parce que j'étais impatienté d'une conviction si ferme et si lourde. Je ne sais quel instinct m'avertissait d'ailleurs de me défier de ces axiomes généraux si exempts de toute restriction, si purs de toute nuance. Les sots font de leur morale une masse compacte et indivisible, pour qu'elle se mêle le moins possible avec leurs actions, et les laisse libres dans tous les détails. Je me donnai bientôt, par cette conduite, une grande réputation de légèreté, de persiflage, de méchanceté. Mes paroles amères furent considérées comme des preuves d'une âme haineuse, mes plaisanteries comme des attentats contre tout ce qu'il y avait de plus respectable. Ceux dont j'avais eu le tort de me moquer trouvaient commode de faire cause commune avec les principes qu'ils m'accusaient de révoquer en doute ; parce que, sans le vouloir, je les avais fait rire aux dépens les uns des autres, tous se réunirent contre moi. On eût dit qu'en faisant remarquer leurs ridicules, je trahissais une confidence qu'ils m'avaient faite ; on eût dit qu'en se montrant à mes yeux tels qu'ils étaient, ils avaient obtenu de ma part la promesse du silence : je n'avais point la conscience d'avoir accepté ce traité trop onéreux. Ils avaient trouvé du plaisir à se donner ample carrière, j'en trouvais à les observer et à les décrire ; et ce qu'ils appelaient une perfidie me paraissait un dédommagement tout innocent et très-légitime. Je ne veux point ici me justifier : j'ai renoncé depuis longtemps à cet usage frivole et facile d'un esprit sans expérience ; je veux simplement dire, et cela pour d'autres que pour moi, qui suis maintenant à l'abri du monde, qu'il faut du temps pour s'accoutumer à l'espèce humaine, telle que l'intérêt, l'affectation, la vanité, la peur, nous l'ont faite. L'étonnement de la première jeunesse, à l'aspect d'une société si factice et si travaillée, annonce plutôt un cœur naturel qu'un esprit méchant. Cette société d'ailleurs n'a rien à en craindre : elle pèse tellement sur nous, son influence sourde est tellement puissante, qu'elle ne tarde pas à nous façonner d'après le moule universel. Nous ne sommes plus surpris alors que de notre ancienne surprise, et nous nous trouvons bien sous notre nouvelle forme, comme l'on finit par respirer librement dans un spectacle encombré par la foule, tandis qu'en entrant, on n'y respirait qu'avec effort. Si quelques-uns échappent à cette destinée générale, ils renferment en eux-mêmes leur dissentiment secret ; ils aperçoivent dans la plupart des ridicules le germe des vices : ils n'en plaisantent plus, parce que le mépris remplace la moquerie, et que le mépris est silencieux. Il s'établit donc, dans le petit public qui m'environnait, une inquiétude vague sur mon caractère. On ne pouvait citer aucune action condamnable ; on ne pouvait même m'en contester quelques-unes qui semblaient annoncer de la générosité ou du dévouement ; mais on disait que j'étais un homme immoral, un homme peu sûr : deux épithètes heureusement inventées pour insinuer les faits qu'on ignore, et laisser deviner ce qu'on ne sait pas.

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CHAPITRE PREMIER CHAPTER(1)|FIRST ERSTES KAPITEL CHAPTER ONE CAPÍTULO I CAPITOLO UNO CAPÍTULO UM 第一章

Je venais de finir à vingt-deux ans mes études à l'université de Gottingue. |||||||||||||Göttingen I|had come|of|finish|at|twenty|two|years|my|studies||the university||Göttingen At the age of twenty-two, I had just finished my studies at the University of Gottingue. В возрасте двадцати двух лет я только что закончил учебу в университете Геттинге. — L'intention de mon père, ministre de l'électeur de ***, était que je parcourusse les pays les plus remarquables de l'Europe. |||||||||||путешествовал по||||||| ||||||der Wähler|||||bereisen||||||| The intention||my|father|minister||the elector||was|that||traveled|the|countries|the|more|remarkable||Europe - It was the intention of my father, minister to the Elector of *, that I should travel through the most remarkable countries of Europe. - По замыслу моего отца, министра курфюрста, я должен был путешествовать по самым примечательным странам Европы. Il voulait ensuite m'appeler auprès de lui, me faire entrer dans le département dont la direction lui était confiée, et me préparer à le remplacer un jour. ||then|call me|with|||||enter|||department||||||entrusted||||||replace|| He then wanted to call me to his side, get me into the department he was in charge of, and prepare me to replace him one day. Он хотел призвать меня к себе, устроить в отдел, которым он руководил, и подготовить к тому, чтобы однажды заменить его. J'avais obtenu, par un travail assez opiniâtre, au milieu d'une vie très-dissipée, des succès qui m'avaient distingué de mes compagnons d'étude, et qui avaient fait concevoir à mon père sur moi des espérances probablement fort exagérées. ||||||упорный|||||||||||выделил|||||||||задумать||||||||||возможно, сильно преувеличенные ||||||eigensinnig|||||||||||||||||||||||||||Hoffnungen||| |obtained|||work|quite|determined||mid||life||dissipated||||had|distinguished|||companions|of study|||||conceive|||||||hopes|||exaggerated Through hard work, in the midst of a very dissipated life, I had achieved successes that had set me apart from my fellow students, and had led my father to conceive expectations of me that were probably quite exaggerated. Упорным трудом, в условиях весьма рассеянной жизни, я добился успехов, которые выделяли меня среди сокурсников, и заставили моего отца возлагать на меня надежды, которые, вероятно, были весьма преувеличены. Ces espérances l'avaient rendu très-indulgent pour beaucoup de fautes que j'avais commises. |||||снисходительный||||||| ||||sehr|nachsichtig||||||| These|hopes|had|made||indulgent||||mistakes|||committed These expectations had made him very indulgent of many of the faults I had committed. Из-за этих ожиданий он очень снисходительно относился ко многим моим ошибкам. Il ne m'avait jamais laissé souffrir des suites de ces fautes. |||||||Folgen||| |||||suffer||consequences||| Он никогда не позволял мне страдать от последствий этих недостатков. Il avait toujours accordé, quelquefois prévenu mes demandes à cet égard. |||gewährt||||||| He||||sometimes|prevented||requests|||regard Он всегда соглашался на мои просьбы, а иногда и предотвращал их.

Malheureusement sa conduite était plutôt noble et généreuse que tendre. |||||||großzügig|| Unfortunately||conduct||rather|||generous||tender К сожалению, его поведение было скорее благородным и великодушным, чем нежным. J'étais pénétré de tous ses droits à ma reconnaissance et à mon respect ; mais aucune confiance n'avait existé jamais entre nous. |проникнутый||||||||||||||||существовало||| I was|penetrated|||||||||||||no|||existed||| I was fully aware of his right to my gratitude and respect, but no trust had ever existed between us. Я чувствовала, что он имеет полное право на мою благодарность и уважение, но между нами никогда не было доверия. Il avait dans l'esprit je ne sais quoi d'ironique qui convenait mal à mon caractère. ||||||||||подходило|||| ||||||||ironisch|||||| ||||I|||what|ironic||suited||||character There was something ironic about him that didn't suit my character. У него в голове было что-то ироничное, что не соответствовало моему характеру. Je ne demandais alors qu'à me livrer à ces impressions primitives et fougueuses qui jettent l'âme hors de la sphère commune, et lui inspirent le dédain de tous les objets qui l'environnent. ||спрашивал|||||||впечатления|||пылкие|||||||сфере||||вдохновляют||||||||окружает ||||||||||primitive||leidenschaftlichen|||||||||||||Verachtung||||||umgeben ||was asking||||deliver||||||fervent||throw||out||||common|||||contempt||||||the environment Все, чего я тогда хотел, - это отдаться тем примитивным и пламенным впечатлениям, которые вырывают душу из привычной сферы и внушают ей презрение ко всем предметам, которые ее окружают. Je trouvais dans mon père, non pas un censeur, mais un observateur froid et caustique, qui souriait d'abord de pitié, et qui finissait bientôt la conversation avec impatience. |находил|||||||цензор||||||каустический||||||||||||| ||||||||Zensor||||||sarkastisch||||||||||||| ||||||||censor||||||caustic||smiled|||pity|||finished||||| Encontré en mi padre, no un censor, sino un observador frío y cáustico, que al principio sonreía con lástima, y pronto terminaba la conversación con impaciencia. В лице отца я нашел не цензора, а холодного и едкого наблюдателя, который сначала улыбался с жалостью, а вскоре прекращал разговор с нетерпением. Je ne me souviens pas, pendant mes dix-huit premières années, d'avoir eu jamais un entretien d'une heure avec lui. |||||||||first||of having|||||||| За первые восемнадцать лет жизни я не помню, чтобы у меня с ним был хоть один часовой разговор. Ses lettres étaient affectueuses, pleines de conseils raisonnables et sensibles ; mais à peine étions-nous en présence l'un de l'autre, qu'il y avait en lui quelque chose de contraint que je ne pouvais m'expliquer, et qui réagissait sur moi d'une manière pénible. |||нежные|||||||||||||||||||||||||скованность|||||||||||||трудный ||||||||||||||||||||||||||||||||||||reagierte||||| ||||full||||||||pain|were|||||||||||||||constrained||||could|explain|||reacted|||||painful Его письма были ласковыми, полными разумных и деликатных советов; но едва мы оказывались в присутствии друг друга, как в нем появлялось что-то непреодолимое, чего я не могла объяснить, и что болезненно реагировало на меня. Je ne savais pas alors ce que c'était que la timidité, cette souffrance intérieure qui nous poursuit jusque dans l'âge le plus avancé, qui refoule sur notre cœur les impressions les plus profondes, qui glace nos paroles, qui dénature dans notre bouche tout ce que nous essayons de dire, et ne nous permet de nous exprimer que par des mots vagues ou une ironie plus ou moins amère, comme si nous voulions nous venger sur nos sentiments mêmes de la douleur que nous éprouvons à ne pouvoir les faire connaître. ||||||||||||||||||||||||подавляет||||||||||||||извращает|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||испытываем|||||| ||||||||||Schüchternheit||||||||||||||unterdrückt||||||||tiefsten||||||entstellt|||||||||||||||||||||||||||||bitter||||||||||||||||erleben|||||| ||||||||||shyness||suffering|internal||||up to|||||advanced||repress||||||||||freezes||words||denatures||||||||||say||||allows|||express||||||||||||bitter||||wanted||avenge|||feelings|same||||||feel|||||| Тогда я еще не знал, что такое застенчивость, это внутреннее страдание, преследующее нас до старости, подавляющее самые глубокие душевные переживания, замораживающее слова, искажающее в устах все, что мы пытаемся сказать, и позволяющее выразить себя лишь в туманных словах или более или менее горькой иронии, как будто мы хотим отомстить собственным чувствам за ту боль, которую испытываем, не имея возможности их озвучить. Je ne savais pas que, même avec son fils, mon père était timide, et que souvent, après avoir longtemps attendu de moi quelques témoignages d'affection que sa froideur apparente semblait m'interdire, il me quittait les yeux mouillés de larmes, et se plaignait à d'autres de ce que je ne l'aimais pas. |||||||||||||||||||||||||||холодность||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||Zuneigung|||Kälte Distanziertheit|||verboten|||verließ mich||||||||||||||||ich liebte ihn| |||||||||||||||||||wait||||expressions||||coldness|||forbid me|||was leaving|||wet|||||complained||others||||||loved| No sabía que, incluso con su hijo, mi padre era tímido, y que a menudo, después de esperar largo rato alguna expresión de afecto por mi parte que su aparente frialdad parecía prohibir, me dejaba con los ojos húmedos de lágrimas, y se quejaba a los demás de que yo no le quería. Я не знал, что даже с сыном отец был застенчив и что часто, долго ожидая от меня какого-то проявления ласки, которое, казалось бы, не допускала его кажущаяся холодность, он уходил от меня с мокрыми от слез глазами и жаловался другим, что я его не люблю. Ma contrainte avec lui eut une grande influence sur mon caractère. |ограничение||||||||| |constraint|||had|a||||| Мое ограничение с ним оказало большое влияние на мой характер. Aussi timide que lui, mais plus agité, parce que j'étais plus jeune, je m'accoutumai à renfermer en moi-même tout ce que j'éprouvais, à ne former que des plans solitaires, à ne compter que sur moi pour leur exécution, à considérer les avis, l'intérêt, l'assistance et jusqu'à la seule présence des autres comme une gêne et comme un obstacle. |||||||||||||привык|||||||||||||||||||||||||выполнение||рассматривать|||||||||||||||||| ||||||aufgeregt|||||||gewöhnt||einschließen|||||||empfand|||||||||||||||||||||||||||||||||||| |timid|||||agitated|||||||got used||contain|||||||I felt|||form|||plans||||count||||||execution|||||||||||||||a|guilt|||| Такой же робкий, как он, но более беспокойный, потому что был моложе, я привык замыкаться на себе, строить одинокие планы, полагаться в их исполнении только на себя, считать советы, интерес, помощь и даже само присутствие других людей помехой и препятствием. Je contractai l'habitude de ne jamais parler de ce qui m'occupait, de ne me soumettre à la conversation que comme à une nécessité importune, et de l'animer alors par une plaisanterie perpétuelle qui me la rendait moins fatigante, et qui m'aidait à cacher mes véritables pensées. |контракт||||||||||||||||||||||необходимое бремя||||||||постоянной|||||||||||||| |schloss|||||||||mich beschäftigte|||||||Gespräch||||||lästige Notwendigkeit|||sie zu beleben||||||||||||||||||| |contracted|||||||||occupied me||||submit|||||||||importune|||animate it||||joke|perpetual||||made it||fatiguing|||||||real| Я приобрел привычку никогда не говорить о том, что меня занимало, подчиняться разговору лишь как нежелательной необходимости, а затем оживлять его постоянными шутками, что делало его менее утомительным и помогало скрывать свои истинные мысли. De là une certaine absence d'abandon, qu'aujourd'hui encore mes amis me reprochent, et une difficulté de causer sérieusement que j'ai toujours peine à surmonter. |||||||||||||||||||||||преодолеть ||||Abwesenheit|von Hingabe|||||||||||causing||||||| Of||||absence|of abandonment||still||||reproach|||||||||always|||overcome De ahí una cierta falta de abandono, que aún hoy me reprochan mis amigos, y una dificultad para hablar en serio que todavía me cuesta superar. Отсюда некоторая несдержанность, за которую меня даже сегодня упрекают друзья, и трудности с серьезными разговорами, которые мне до сих пор трудно преодолеть. Il en résulta en même temps un désir ardent d'indépendance, une grande impatience des liens dont j'étais environné, une terreur invincible d'en former de nouveaux. ||||||||страстное желание|||||||||окружённый|||непобедимый|||| ||resultierte|||||||||||||||umgeben||||||| |of it|||||||ardent||||||links|||surrounded||||||| Результатом стало жгучее желание независимости, нетерпение к окружающим меня связям и непобедимый страх перед созданием новых. Je ne me trouvais à mon aise que tout seul, et tel est, même à présent, l'effet de cette disposition d'âme, que, dans les circonstances les moins importantes, quand je dois choisir entre deux partis, la figure humaine me trouble, et mon mouvement naturel est de la fuir pour délibérer en paix. |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||обдумывать|| |||||||||||||||||||Disposition|Seelenzustand|||||||||||||||||||||||||||||beraten|| I|||found|||at ease|that||||||||||||||||||||||||||||||||||||||of||flee|to|deliberate|| Я был спокоен только тогда, когда оставался один, и таково влияние этого расположения души даже сейчас, что при самых незначительных обстоятельствах, когда мне приходится выбирать между двумя сторонами, человеческая фигура беспокоит меня, и мое естественное движение - убежать от нее, чтобы спокойно поразмыслить. Je n'avais point cependant la profondeur d'égoïsme qu'un tel caractère paraît annoncer : tout en ne m'intéressant qu'à moi, je m'intéressais faiblement à moi-même. ||||||von Egoismus|||||||||mich interessierend|||||||| ||||||of selfishness||||||||||||||weakly||| Однако у меня не было той глубины эгоизма, на которую указывает такой характер: хотя меня интересовал только я сам, я был заинтересован в себе лишь слегка. Je portais au fond de mon cœur un besoin de sensibilité dont je ne m'apercevais pas, mais qui, ne trouvant point à se satisfaire, me détachait successivement de tous les objets qui tour à tour attiraient ma curiosité. ||||||||||||||||||||||||||поочередно||||||||||| ||||||||||sensitivity||||wasn't aware|||||||||satisfy||detached|successively|||||||||attracted|| Я носил в своем сердце потребность в чувствительности, о которой не подозревал, но которая, не находя способа удовлетворить себя, отрывала меня последовательно от всех предметов, которые в свою очередь привлекали мое любопытство. Cette indifférence sur tout s'était encore fortifiée par l'idée de la mort, idée qui m'avait frappé très-jeune, et sur laquelle je n'ai jamais conçu que les hommes s'étourdissent si facilement. ||||||укрепилась||||||||||||||||||||||опьяняются|| ||||||||||||||||||||||||||||sich betäuben|| ||||||fortified||||||||||||||||||conceived||||dull themselves|| Это безразличие ко всему еще больше укрепилось благодаря мысли о смерти - идее, которая поразила меня еще в юности и по поводу которой я никогда не задумывался, что у людей так легко кружится голова. J'avais, à l'âge de dix-sept ans, vu mourir une femme âgée, dont l'esprit, d'une tournure remarquable et bizarre, avait commencé à développer le mien. |||||||||||||||манера мышления||||||||| |||||||||a||||||turn|remarkable||||||||mine В семнадцать лет я увидел, как умирает пожилая женщина, чей удивительный и причудливый ум начал развивать мой собственный. Cette femme, comme tant d'autres, s'était, à l'entrée de sa carrière, lancée vers le monde, qu'elle ne connaissait pas, avec le sentiment d'une grande force d'âme et de facultés vraiment puissantes. |||||||||||launched||||||knew|||||||||||faculties||powerful Эта женщина, как и многие другие, в начале своей карьеры бросилась в незнакомый ей мир с ощущением огромной силы души и поистине мощных способностей. Comme tant d'autres aussi, faute de s'être pliée à des convenances factices, mais nécessaires, elle avait vu ses espérances trompées, sa jeunesse passer sans plaisir ; et la vieillesse enfin l'avait atteinte sans la soumettre. |||||||подчиниться|||приличия|||||||||||||||||||||||подчинить wie|||||||gebeugt|||Konventionen|falschen Konventionen||||||||enttäuscht||||||||Alter|||||| ||||||submitted|bent|||conventions|artificial||||||||tricked||||||||old age|||||| Как и многие другие, из-за того, что она не подчинилась ложным, но необходимым условностям, ее надежды рухнули, молодость прошла без удовольствия, и, наконец, старость настигла ее, не покорившись ей. Elle vivait dans un château voisin d'une de nos terres, mécontente et retirée, n'ayant que son esprit pour ressource, et analysant tout avec son esprit. ||||||||||unzufrieden||zurückgezogen|||||||||||| ||||||||||discontented||withdrawn|||||||||||| Она жила в замке неподалеку от одной из наших земель, недовольная и замкнутая, имея в качестве ресурса только свой разум и анализируя все своим умом. Pendant près d'un an, dans nos conversations inépuisables, nous avions envisagé la vie sous toutes ses faces, et la mort toujours pour terme de tout ; et après avoir tant causé de la mort avec elle, j'avais vu la mort la frapper à mes yeux. |||||||unerschöpflichen|||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||inexhaustible|we||envisioned||||||||||||||||||||||||||||||||| Почти год в наших неиссякаемых беседах мы рассматривали жизнь со всех сторон, а смерть - как конец всего этого; и после того как мы с ней столько говорили о смерти, я увидел, как смерть поразила ее в моих глазах. Cet événement m'avait rempli d'un sentiment d'incertitude sur la destinée, et d'une rêverie vague qui ne m'abandonnait pas. ||||||неопределенности|||судьба|||мечтание||||| ||||||||||||||||mich nicht verließ| ||||||||||||reverie||||| This event had filled me with a sense of uncertainty about destiny, and a vague reverie that wouldn't leave me. Это событие наполнило меня чувством неуверенности в судьбе и смутной задумчивостью, которая не покидала меня. Je lisais de préférence dans les poëtes ce qui rappelait la brièveté de la vie humaine. |||||||||||краткость жизни|||| ||||in||Dichter||||||||| |||||||||||brevity|||| I liked to read poets who reminded me of the brevity of human life. Мне нравилось читать поэтов, которые напоминали мне о краткости человеческой жизни. Je trouvais qu'aucun but ne valait la peine d'aucun effort. ||||||der||keiner kein| |||||was worth|||| I found that no goal was worth any effort. Я обнаружил, что ни одна цель не стоит затраченных усилий. Il est assez singulier que cette impression se soit affaiblie précisément à mesure que les années se sont accumulées sur moi. |||единственный||||||||||||||||| |||||||||weakened||||||||||| Странно, что это впечатление ослабевает именно по мере того, как на меня наваливаются годы. Serait-ce parce qu'il y a dans l'espérance quelque chose de douteux, et que, lorsqu'elle se retire de la carrière de l'homme, cette carrière prend un caractère plus sévère, mais plus positif ? |||||||надежда|||||||||||||||||||||||| |||||||hope||||doubtful|||||||||||||||||||| Может быть, потому, что в надежде есть что-то сомнительное, и когда она уходит из карьеры человека, эта карьера приобретает более суровый, но и более позитивный характер? Serait-ce que la vie semble d'autant plus réelle, que toutes les illusions disparaissent, comme la cime des rochers se dessine mieux dans l'horizon lorsque les nuages se dissipent ? ||||||||||||иллюзии||||вершина||||||||||||рассекаются ||||||||||||||||Spitze||||||in||||||sich auflösen ||||||||||||||||crown||rocks||is outlined||||||||disappear Может быть, жизнь кажется еще более реальной, когда исчезают все иллюзии, подобно тому как вершины скал становятся более четкими на горизонте, когда рассеиваются облака? Je me rendis, en quittant Gottingue, dans la petite ville de D***. ||||||в маленький город||||| ||rendered||||||||| Покинув Геттингью, я направился в небольшой городок Д*. Cette ville était la résidence d'un prince qui, comme la plupart de ceux de l'Allemagne, gouvernait avec douceur un pays de peu d'étendue, protégeait les hommes éclairés qui venaient s'y fixer, laissait à toutes les opinions une liberté parfaite, mais qui, borné par l'ancien usage à la société de ses courtisans, ne rassemblait par là même autour de lui que des hommes en grande partie insignifiants ou médiocres. |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||ограниченный|||||||||дворяне|||||||||||||||незначительные||посредственные ||||||||||||||||||||||von geringer Ausdehnung|||||||||||||||||||begrenzt|||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||of limited extent||||enlightened|||||||||||||||limited|||usage||||||courtisans||gathered|||||||||||||insignificant|| This city was the residence of a prince who, like most German princes, governed a small country with gentleness, protected the enlightened men who came to settle there, allowed all opinions complete freedom, but who, limited by ancient custom to the society of his courtiers, gathered around him only men who were largely insignificant or mediocre. Этот город был резиденцией князя, который, как и большинство немецких князей, мягко управлял маленькой страной, покровительствовал просвещенным людям, приезжавшим сюда жить, допускал полную свободу всех мнений, но который, ограниченный древним обычаем обществом своих придворных, собирал вокруг себя только людей в основном незначительных или посредственных. Je fus accueilli dans cette cour avec la curiosité qu'inspire naturellement tout étranger qui vient rompre le cercle de la monotonie et de l'étiquette. ||||||||||||||||||||монотонность||| |||||||||die inspiriert|||||||||||||| |||||||||||||||break||||||||the etiquette Me recibieron en esta corte con la curiosidad que inspira naturalmente a cualquier extranjero que viene a romper el círculo de la monotonía y la etiqueta. Меня приняли при дворе с тем любопытством, которое, естественно, одолевает любого иностранца, приехавшего разорвать круг однообразия и этикета. Pendant quelques mois, je ne remarquai rien qui pût captiver mon attention. ||||||||könnte||| |||||noticed|||could||| В течение нескольких месяцев я не замечал ничего, что привлекло бы мое внимание. J'étais reconnaissant de l'obligeance qu'on me témoignait ; mais tantôt ma timidité m'empêchait d'en profiter, tantôt la fatigue d'une agitation sans but me faisait préférer la solitude aux plaisirs insipides que l'on m'invitait à partager. |||вежливость|||||||||||то и дело||||||||||||||||||| |||die Höflichkeit|||zeigte||||||||||||Unruhe||||||||||langweiligen|||einlud|| |grateful|of|the kindness|||||sometimes|||prevented me||||||||||||prefer|||||insipid||||| I was grateful for the kindness shown to me, but sometimes my shyness prevented me from taking advantage of it, and sometimes the fatigue of aimless agitation made me prefer solitude to the insipid pleasures I was invited to share. Я был благодарен за оказанную мне любезность, но иногда моя застенчивость мешала мне воспользоваться ею, иногда усталость от бесцельной возни заставляла меня предпочесть одиночество тем тусклым удовольствиям, которые мне предлагали разделить. Je n'avais de haine contre personne, mais peu de gens m'inspiraient de l'intérêt ; or, les hommes se blessent de l'indifférence ; ils l'attribuent à la malveillance ou à l'affectation ; ils ne veulent pas croire qu'on s'ennuie avec eux naturellement. ||||||||||||||||||||||||злонамеренность|||притворство|||||||||| ||||||||||machten mir|||||||||||schreiben|||Böswilligkeit|||Affektiertheit|||||||||| |||||||||||||||||hurt||||attribute it||||||the affectation|||||||||| Я никого не ненавидела, но мало кто внушал мне интерес, а мужчин обижает равнодушие, они приписывают его злобе или жеманству; они не хотят верить, что людям от природы скучно с ними. Quelquefois je cherchais à contraindre mon ennui ; je me réfugiais dans une taciturnité profonde : on prenait cette taciturnité pour du dédain. ||||принуждать||||||||молчаливость|||||||| ||||zwingen|||||zog mich zurück||||||||Schweigsamkeit||| ||||constrain||boredom|||refuged|||taciturnity|||||||| A veces intentaba contener mi aburrimiento; me refugiaba en una profunda taciturnidad: esta taciturnidad se confundía con el desdén. Иногда я пытался сдержать свою скуку; я укрывался в глубокой неразговорчивости: эту неразговорчивость принимали за презрение. D'autres fois, lassé moi-même de mon silence, je me laissais aller à quelques plaisanteries, et mon esprit, mis en mouvement, m'entraînait au-delà de toute mesure. ||||||||||ließ mich|||||||||||||||| |||||||||||||||||||||trained me|to|||| Иной раз, устав от молчания, я позволял себе несколько шуток, и мой ум, придя в движение, увлекал меня за собой. Je révélais en un jour tous les ridicules que j'avais observés durant un mois. |||||||нелепости|||||| Ich|offenbarte|||||||||beobachtet||| |revealed|||||||||||| За один день я раскрыл все нелепые вещи, которые наблюдал в течение месяца. Les confidents de mes épanchements subits et involontaires ne m'en savaient aucun gré, et avaient raison ; car c'était le besoin de parler qui me saisissait, et non la confiance. ||||излияний|внезапные откровения||||||||||||||||||||||| ||||Äußerungen|||||||||||||||||||||||| |confidants|||outpourings|subtle||involuntary|did not||||||||||||||||seized|||| The confidants of my sudden, involuntary outpourings didn't appreciate it, and rightly so; for it was the need to speak that seized me, not confidence. Доверенные лица моих внезапных и непроизвольных излияний не благодарили меня за это, и они были правы, потому что меня захватила потребность говорить, а не уверенность. J'avais contracté dans mes conversations avec la femme qui, la première, avait développé mes idées, une insurmontable aversion pour toutes les maximes communes et pour toutes les formules dogmatiques. ||||||||||||||||непреодолимая|отвращение||||максимы|||||||догматические формулы ||||||||||||||||unüberwindliche|Abneigung||||||||||Formeln| |||||||||||||||||aversion||||maxims||||||| In my conversations with the woman who had first developed my ideas, I had acquired an insurmountable aversion to all common maxims and dogmatic formulas. В беседах с женщиной, которая первой развила мои идеи, я приобрел непреодолимое отвращение ко всем общепринятым максимам и догматическим формулам. Lors donc que j'entendais la médiocrité disserter avec complaisance sur des principes bien établis, bien incontestables en fait de morale, de convenance ou de religion, choses qu'elle met assez volontiers sur la même ligne, je me sentais poussé à la contredire, non que j'eusse adopté des opinions opposées, mais parce que j'étais impatienté d'une conviction si ferme et si lourde. |||||медиокритичность|дискутировать|||||||||||||||приемлемости|||||||||||||||||||противоречить|||я бы|||||||||||||||| ||||||reden||Selbstgefälligkeit|||||etablierten||unbestreitbar|||||||||||||||||||||||||||||||||||||unwillig||Überzeugung||||| ||||||dissert||complacency||some|||||uncontestable||||||convenience||||||||||||||||||||||I had|adopted||||||||impatient||||||| So whenever I heard mediocrity complacently disserting on well-established, unquestionable principles of morality, propriety or religion, things it quite readily puts on the same line, I felt impelled to contradict it, not because I had adopted opposing opinions, but because I was impatient with such firm, weighty conviction. Поэтому, когда я слышал, как посредственность самодовольно рассуждает об устоявшихся, неоспоримых принципах морали, приличия или религии, которые она с легкостью ставит в один ряд, я чувствовал себя обязанным возразить ей, но не потому, что придерживался противоположного мнения, а потому, что был нетерпим к столь твердым и весомым убеждениям. Je ne sais quel instinct m'avertissait d'ailleurs de me défier de ces axiomes généraux si exempts de toute restriction, si purs de toute nuance. ||||||||||||аксиомы||||||||||| ||||Instinkt|warnte mich||||vermeiden||||||frei|||Einschränkung||rein|||Nuance |||||||||dare|||axioms||||||||pure||| Не знаю, какой инстинкт подсказывал мне, что нужно остерегаться этих общих аксиом, столь свободных от всех ограничений, столь чистых от всех нюансов. Les sots font de leur morale une masse compacte et indivisible, pour qu'elle se mêle le moins possible avec leurs actions, et les laisse libres dans tous les détails. |глупцы|||||||компактная|||||||||||||||||||| |die Dummköpfe||||||||||||||||||||||||||| |fools|||||||compact||indivisible|||||||||||||||||| Fools make their morality a compact, indivisible mass, so that it intermingles as little as possible with their actions, and leaves them free in every detail. Глупцы превращают свою мораль в компактную, неделимую массу, чтобы она как можно меньше влияла на их поступки и оставляла им свободу во всех деталях. Je me donnai bientôt, par cette conduite, une grande réputation de légèreté, de persiflage, de méchanceté. |||||||||||||насмешка|| ||gab|||||||||||Spott|| |||||||||||||persiflage||wickedness I soon earned myself a reputation for levity, persiflage and malice. Este comportamiento pronto me dio fama de ligero, persuasivo y malicioso. Такое поведение вскоре принесло мне репутацию легкомысленного, настойчивого и злобного человека. Mes paroles amères furent considérées comme des preuves d'une âme haineuse, mes plaisanteries comme des attentats contre tout ce qu'il y avait de plus respectable. ||||||||||ненавистной|||||||||||||| ||bitter||||||||hasserfüllte||||||||was|||||| ||bitter|were||||proofs|||hateful||jokes|||attacks||||||||| My bitter words were seen as evidence of a hateful soul, my jokes as attacks on everything respectable. Мои горькие слова воспринимались как свидетельство ненависти в душе, мои шутки - как нападки на все самое уважаемое. Ceux dont j'avais eu le tort de me moquer trouvaient commode de faire cause commune avec les principes qu'ils m'accusaient de révoquer en doute ; parce que, sans le vouloir, je les avais fait rire aux dépens les uns des autres, tous se réunirent contre moi. |||||||||||||||||||||отменить||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||mich anklagten||anzweifeln||||||||||||||||||||||| |||||wrong||||found|convenient|||||||||accused me||revoke|in|||||||||had||||at the expense|||||||gathered|| Те, кого я незаслуженно высмеивал, нашли удобным объединиться с теми принципами, которые они обвиняли в том, что я подвергаю сомнению; поскольку я невольно заставил их смеяться друг над другом, они все объединились против меня. On eût dit qu'en faisant remarquer leurs ridicules, je trahissais une confidence qu'ils m'avaient faite ; on eût dit qu'en se montrant à mes yeux tels qu'ils étaient, ils avaient obtenu de ma part la promesse du silence : je n'avais point la conscience d'avoir accepté ce traité trop onéreux. |||||||||||||||||||||||||||||||||||из||||||||||||тяжелый, обременительный |||||||||verraten|||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||was betraying||confidence|||||||||showing||||||||||||||promise|||||||||||||costly Казалось, что, указывая на их нелепость, я предаю доверие, которое они мне оказали; казалось, что, показав мне себя такими, какие они есть, они добились от меня обещания молчать: меня не мучила совесть, что я принял этот слишком обременительный договор. Ils avaient trouvé du plaisir à se donner ample carrière, j'en trouvais à les observer et à les décrire ; et ce qu'ils appelaient une perfidie me paraissait un dédommagement tout innocent et très-légitime. ||||||||||||||||||||||||предательство||||||||| ||||||||||||||||||||||||Verrat||||Entschädigung||||| ||||||||||||||||||||||called||perfidiousness||seemed||compensation||||| Они находили удовольствие в том, чтобы сделать себе широкую карьеру; я находил удовольствие в том, чтобы наблюдать и описывать их; и то, что они называли вероломством, казалось мне очень невинной и законной компенсацией. Je ne veux point ici me justifier : j'ai renoncé depuis longtemps à cet usage frivole et facile d'un esprit sans expérience ; je veux simplement dire, et cela pour d'autres que pour moi, qui suis maintenant à l'abri du monde, qu'il faut du temps pour s'accoutumer à l'espèce humaine, telle que l'intérêt, l'affectation, la vanité, la peur, nous l'ont faite. ||||||||отказался||||||легкомысленный||||||||||||||||||||||||||||||привыкнуть|||||||притворство||||||| ||||||||||||||frivol usage|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||frivolous||||||||||||||||||||||the shelter||||||||get accustomed||the species|||||||||||| |||de modo algum||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| Я не хочу оправдываться: я давно отказался от этого легкомысленного и легкого использования неопытного ума; я просто хочу сказать, и это скорее для других, чем для себя, укрытого от мира, что нужно время, чтобы привыкнуть к человеческому виду, каким его сделали для нас интерес, жеманство, тщеславие и страх. L'étonnement de la première jeunesse, à l'aspect d'une société si factice et si travaillée, annonce plutôt un cœur naturel qu'un esprit méchant. Astonishment||||||the aspect||||artificial|||worked|||||||| Удивление первых юношей при виде такого искусственного и продуманного общества свидетельствует скорее о естественном сердце, чем о злом уме. Cette société d'ailleurs n'a rien à en craindre : elle pèse tellement sur nous, son influence sourde est tellement puissante, qu'elle ne tarde pas à nous façonner d'après le moule universel. |||||||||||||||stumm|||||||||||||| |||||||fear||weighs||||||deaf||||||takes|||||||mold| Этого общества нечего бояться: оно так тяготит нас, его приглушенное влияние так сильно, что вскоре оно формирует нас по универсальному образцу. Nous ne sommes plus surpris alors que de notre ancienne surprise, et nous nous trouvons bien sous notre nouvelle forme, comme l'on finit par respirer librement dans un spectacle encombré par la foule, tandis qu'en entrant, on n'y respirait qu'avec effort. |||||||||||||||||||||||||||||überfüllt||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||cluttered||||||entering|||breathed|| We are then surprised only by our old surprise, and we find ourselves well in our new form, just as we come to breathe freely in a crowded show, whereas on entering, we breathed only with effort. Тогда мы удивляемся только своему старому удивлению, и нам становится хорошо в нашей новой форме, подобно тому, как мы свободно дышим в переполненном людьми балагане, тогда как когда мы входили в него, мы дышали только с усилием. Si quelques-uns échappent à cette destinée générale, ils renferment en eux-mêmes leur dissentiment secret ; ils aperçoivent dans la plupart des ridicules le germe des vices : ils n'en plaisantent plus, parce que le mépris remplace la moquerie, et que le mépris est silencieux. ||||||||||||||||||||||||семя||пороки||||||||презрение|||насмешка|||||| ||||||||||||||||||||||||||Laster|||||||||||Spott|||||| |||escape||||||contain|||||dissent|||see|||||||germ||vices|||jest|||||contempt|replaces|||||||| If some escape this general destiny, they contain their secret dissension within themselves; they see in most ridicule the germ of vices: they no longer joke about it, because contempt replaces mockery, and contempt is silent. Если некоторые и избегают этой общей участи, то держат свой тайный разлад в себе; они видят в большинстве насмешек зародыш порока: они больше не шутят над этим, потому что презрение заменяет насмешку, а презрение молчит. Il s'établit donc, dans le petit public qui m'environnait, une inquiétude vague sur mon caractère. ||||||||surrounded me|||||| So the small crowd around me became vaguely concerned about my character. И тут небольшая толпа вокруг меня стала проявлять смутное беспокойство по поводу моего характера. On ne pouvait citer aucune action condamnable ; on ne pouvait même m'en contester quelques-unes qui semblaient annoncer de la générosité ou du dévouement ; mais on disait que j'étais un homme immoral, un homme peu sûr : deux épithètes heureusement inventées pour insinuer les faits qu'on ignore, et laisser deviner ce qu'on ne sait pas. ||||||||||||оспаривать|||||||||||преданности||||||||аморальный человек||||||эпитеты||||намекать|||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||Bezeichnungen||||unterstellen|||||||||||| |||||||||||||||||||||||devotion||||||||||||||epithets||||insinuate|||||||||||| No one could cite any condemnable action; they couldn't even dispute a few that seemed to herald generosity or devotion; but they said I was an immoral man, an insecure man: two epithets happily invented to insinuate facts we don't know, and let us guess what we don't know. Никто не мог назвать ни одного предосудительного поступка; меня нельзя было обвинить даже в нескольких, которые, казалось бы, свидетельствовали о щедрости или преданности; но обо мне говорили, что я безнравственный человек, неуверенный в себе: два эпитета, удачно придуманные, чтобы намекнуть на факты, которые неизвестны, и намекнуть на то, что неизвестно.