Pourquoi faire l'amour ? | Jean-Philippe Ruette | TEDxNarbonne (1)
Transcription: Claire Ghyselen Relecteur: eric vautier
Messieurs,
(Il rit)
j'ai une question indiscrète pour vous.
Êtes-vous un bon amant ?
(Rires)
(Il rit)
Qu'en est-il de vos prouesses au lit ?
Les miennes se portent très bien.
(Rires)
Surtout au début.
Les début, aah, la lune de miel.
Tout est simple.
On se regarde.
Un petit clin d'oeil et hop, on se retrouve au lit.
Aah.
La belle époque.
(Rires) (Il rit)
J'en vois plusieurs sourire.
(Il rit)
Il y a quelques années, je réaliste que nos débuts sont devenus routine.
Elle est souvent « indisposée »
et fini, les petits clins d'oeil.
Ça ne me décourage pas.
Je me dis qu'elle a simplement besoin d'un peu de romance et de nouveauté.
D'abord, je tente de varier les angles, les approches, les positions,
les musiques, les éclairages.
Puis, j'ajoute des fleurs, des restos,
du chocolat, danse, massage,
petits dessous,
des jeux de rôle,
(Il rit)
des jouets,
(Rires)
du piment, la totale quoi.
Hélas, malgré toute ma bonne volonté,
rien ne dure.
Dès que je pense avoir trouvé la recette parfaite qui marche tous les soirs,
ça ne marche plus.
Et là, je commence à croire qu'elle a un problème de libido, d'hormone,
quelque chose comme ça.
Un soir, dans la cuisine,
elle m'annonce :
« Chéri, je veux réaliser un rêve d'enfance.
Je pars seule en Australie. »
Ah bon, OK.
Trois semaines quand même.
(Il soupire et rit)
À moi de tenir la maison, de m'occuper des enfants et de tout le reste.
Je m'encourage en me disant qu'après tant d'efforts,
j'aurai sûrement droit à une belle récompense.
(Rires) (Il rit)
Trois semaines plus tard, la voilà de retour.
Et là, messieurs, imaginez la pression dans la tuyauterie.
(Rires) (Il rit)
Je me sens fringant comme un étalon en rut,
fin prêt pour ma récompense.
Et là, coup de théâtre :
à peine arrivée, elle me dit :
« J'ai fait la paix avec moi-même.
Je suis prête à me priver de sexe,
plutôt que de continuer à me faire secouer comme un sac de pommes-de-terre. »
(Rires)
Et elle ajoute :
« Ma décision est ferme et je suis prête à te quitter s'il le faut. »
Et puis, elle me tend son sac-à-dos de voyage
et elle me dit :
« Voici le fardeau de porter seule la responsabilité de notre vie sexuelle.
J'en ai fini de toute cette culpabilité, à toi de le porter maintenant. »
Oh !
(Il soupire)
(Il rit)
Aujourd'hui, avec le recul, cela me fait rire.
Je trouve qu'elle a eu beaucoup de courage de me dire tout ça à ce moment-là.
Sur le coup, par contre, ça fait mal.
Mon premier réflexe : partir loin
pour trouver enfin la bonne personne.
Mais j'ai fait ça plusieurs fois dans ma vie,
puis toujours avec les mêmes résultats.
Comme un ours, je me réfugie dans ma caverne pour passer l'hiver
et prendre soin de mon égo.
Au printemps, j'en ressors,
(Rires) (Il rit)
frappé par une idée de génie :
(Il rit)
ce n'est pas à moi qu'elle dit non.
Non, non, non.
C'est à ce que je lui propose en guise de sexualité.
(Il rit)
Si je change l'offre,
la demande va revenir.
(Rires)
(Applaudissements)
Le soir venu, dans la cuisine,
là où chez nous, les choses se disent :
« Chérie, je suis prêt à changer.
Dis-moi ce dont tu as besoin comme sexualité. »
Et là, elle me dit visiblement contrariée :
« Je ne sais pas.
Tu devrais le sentir. »
(Rires)
(Il rit)
Je ne savais pas, évidemment.
(Rires) (Il rit)
Finalement, elle ajoute :
« J'ai besoin de tendresse, de câlins,
de sentir une connexion entre nos coeurs. »
Quoi ?
(Rires) (Il rit)
OK, OK, OK, j'adore les défis.
Je me lance dans une quête pour trouver la recette de la connexion des coeurs.
Évidemment, je cherche partout
et je ne trouve rien de nouveau, donc,
je finis par demander à mes potes au bistrot.
(Rires) (Il rit)
(Il rit)
Imaginez la scène au bistrot, avec mon verre :
« Les gars,
ma femme me demande plus de connexion du coeur.
(Rires)
Qu'est-ce que vous me conseillez pour commencer ? »
Chacun regarde son verre,
(Rires) (Il rit)
silence radio. (Il rit)
Et là, il y en a un qui dit :
« T'as essayé les fleurs, les restos,
le chocolat, la danse, les massages,
les petits dessous ?
Et tout le reste ? »
Bref, rien de nouveau.
Un peu découragé, je retourne vers ma femme et je lui demande :
« Chérie, c'est quoi donc la recette pour connecter nos coeurs ? »
Et alors, je la vois mi-souriante, mi-contrariée qui me dit, devinez quoi :
« Je ne sais pas.
(Rires) (Il rit)
Tu devrais le sentir. »
(Rires) (Il rit)
Mais là,
elle me regarde dans les yeux et elle dit :
« Trouve ton propre chemin.
J'ai confiance en toi. »
Ça me touche.
Comme une reine avec son chevalier,
je la sens m'investir d'une mission sacrée.
Bien des années plus tard, j'ai écrit ceci pour la remercier :
Aujourd'hui, j'aimerais t'honorer,
d'avoir eu le courage de nommer,
sans me l'imposer,
ce héros que tu voyais en moi.
Pour être cet homme,
j'ai dû faire face à mes peurs,
à mes émotions refoulées,
pour toucher enfin ma vraie puissance,
celle qui rime avec présence,
celle qui se conjugue en douceur,
cette délicieuse force tranquille.
Merci à toi.
Et merci à toutes les femmes qui osent encore rêver
contre vents et marées,
de preux chevaliers,
de troubadours,
de ciels étoilés.
(Applaudissements)
Bon, j'avais une mission, mais...
à l'époque, je ne savais pas où chercher.
Finalement, j'ai trouvé par hasard.
C'est l'été.
Les enfants jouent dehors après le repas du soir.
Et où sommes-nous ?
Dans la cuisine, là où les choses se disent.
(Il rit)
Elle commence à me raconter sa journée.
Est-ce quelque chose que vous faites aussi, mesdames ?
Oui !
Généralement, pour nous, cela se passe très mal.
(Il rit)
Chaque fois qu'elle me parle de ses problèmes,
je lui propose une solution.
(Rires)
Invariablement, elle finit par se fâcher.
(Rires)
Fatigué par son manque de bonne foi,
(Rires) (Il rit)
(Applaudissements)
je me dis ce soir-là :
« Qu'elle se débrouille toute seule ! »
Je l'écoute donc sans dire un mot.
À ma grande surprise, nous passons un super moment, presque magique.
(Rires)
(Il rit)
Je sens une complicité retrouvée
se prolonger toute la soirée jusque dans notre lit.
Et je comprends qu'il vient de se passer quelque chose de capital.
(Il rit)
Note à moi-même :
« L'écoute silencieuse favorise la connexion des coeurs. »
(Rires) (Il rit)
(Applaudissements)
Chaque jour, je m'efforce de lui offrir ma présence.
Nous peaufinons ensemble les méthodes car c'est vraiment un travail d'équipe.
Voici quelques observations.
Elle doit assumer sa beauté rayonnante
et me l'offrir.
Le commérage n'est pas bon à recevoir.
Je dois cesser de faire
pour m'ouvrir
et la recevoir sans condition, là.
Ce moment nous sort de nos têtes.
Peu à peu, nous sourions sans raison tandis que le temps s'efface.
À la longue, je sens vraiment
une chaleur, du mouvement dans ma poitrine,
quelque chose qui s'éveille en moi.
Et surtout, le plus beau cadeau,
je la trouve de plus en plus belle, comme au début.
Comme si j'arrive à la voir à nouveau avec d'autres yeux.
Ceux du coeur.
Je pousse encore plus loin :
je réalise qu'être ouvert -
je réalise que mon coeur s'ouvre plus facilement,
si j'inspire profondément
comme si je voulais la faire entrer tout entière dans mon coeur.
Messieurs, essayons ensemble.
(Il rit)
Prenez un instant pour visualiser la dame de vos pensées.
(Il inspire profondément et expire)
Puis,
plongez votre regard intérieur dans votre coeur.
Et là, on ouvre et - on le fait ensemble -
on ouvre
et on inspire profondément.
(Il inspire profondément)
(Il rit)
C'est bon !
(Il rit)
(Rires)
Encore !
(Il inspire profondément)
(Il expire)
Autre découverte extraordinaire :
ça me donne de l'énergie.
Moi qui avais l'impression de donner beaucoup et recevoir peu,
je réalise qu'être ouvert,
sans donner de conseil,
sans chercher à avoir raison,
bref, être juste présent pour elle,
ça me donne de l'énergie.
M'ouvrir me permet de capter le plein rayonnement de sa beauté.
Ça charge mon coeur comme un panneau solaire.
(Il rit)
Messieurs, qu'est-ce que ça vous fait de savoir
que vous avez peut-être vous aussi un coeur panneau solaire ?
(Rires)
(Il rit)
À la longue, notre vie retrouve de la fluidité.
Faire l'amour avec les coeurs connectés, c'est vraiment mieux.
Nous le faisons d'ailleurs plus souvent.
Mais cela reste difficile d'harmoniser nos désirs.
Moi,
tel un scout, toujours prêt.
(Rires) (Il rit)
Elle, pas toujours.
(Il rit)
Je lui demande souvent comment elle veut être touchée, caressée.
Toujours elle me répond, devinez quoi :
(Rires)
« Je ne sais pas.
(Rires) (Il rit)
Tu devrais le sentir. »
(Rires) (Il rit)
Mais c'est devenu une blague entre nous et elle m'encourage souvent en disant :
« Fais-toi confiance, en dedans, tu le sais. »
Bon, je me sens parfois vraiment maladroit.
Un jour, je parle de sexe avec un ami
et subitement il me dit :
« Il y a ce livre :
« Faire l'amour de manière divine » de Barry Long. »
Il me dit :
« Toutes les femmes que je connais rêvent d'essayer ça. »
Ah bien là !
(Rires) (Il rit)
Donc, je le lis d'une traite
et ça fait : Waouh !
(Rires)
Comme un électrochoc.
Dès le premier chapitre, je comprends que ma façon de faire l'amour,
comme tout le monde,
est dysfonctionnelle.
Pourquoi ?
Parce que cette façon me sépare d'elle lentement mais sûrement.
L'histoire de ma vie.
Pourquoi faire l'amour ?
Ce n'est plus pour jouir et faire jouir,
Je découvre que nos corps ont besoin de laisser circuler l'amour entre eux.
L'important n'est plus tellement de s'exciter, de (il inspire),
non, car cela augmente le stress.
Il faut plutôt se détendre et passer du temps de qualité l'un dans l'autre.
Moyenne nationale : 5,4 minutes,
selon Google.
(Rires) (Il rit)
C'est la durée moyenne de nos relations sexuelles.
Et j'apprends que c'est très en-dessous de nos besoins réels.
Il faudrait y consacrer des heures chaque semaine.
(Rires)
Il est même question de se fixer des rendez-vous.
Waouh ! (Il rit)
Mon désir est enfin bon pour la santé.
(Rires) (Il rit)
Je comprends aussi que ça va demander un travail d'équipe.
Ça me fait déjà peur d'aller lui en parler.
(Rires)
Voici comment ça s'est passé.
Je m'approche :
« Chérie, voici le livre qui va changer nos vies. »
Et là, elle me regarde, agacée.
Elle décide quand même de lire le livre.
Merci à son intuition féminine.
Après sa lecture, elle revient vers moi en riant et me dit :
« Ah, je pensais être folle de croire tout cela et,
je réalise que nous sommes au moins deux avec l'auteur et même trois avec toi. »
(Rires)
Aah !
Pourquoi faire l'amour ?
Ce n'est plus pour courir vers l'orgasme.
Nous voulons maintenant sortir de l'autoroute
pour découvrir les routes de campagne.
Et là, nous commençons à pratiquer les trois R.
Quelqu'un à une idée ?
Trois verbes qui commencent par la lettre R.
(Public) Ralentir Ralentir, oui.
Recommencer ? Non, ce n'est pas ça.
(Rires) (Il rit)
Mais c'est bon, on pourrait appeler ça les quatre R.
(Rires) (Il rit)
Donc, ralentir,
respirer, oui, exact,
et ressentir.
Et recommencer.
(Rires) (Il rit)
Ces trois clés,
ces quatre clés nous aident vraiment à sortir de la moyenne nationale
et de la performance.
Quel fardeau de déposer...
Quel soulagement de déposer ce fardeau !
(Rires) (Il rit) (Applaudissements)
Plus besoin d'être Superman, je peux enfin suivre un nouveau tempo.
Pourquoi faire l'amour ?
Une nouvelle réponse prenait forme dans le silence de mon coeur.
Pour me connecter avec elle.
Pour être dans une intimité si profonde,
qu'il n'y ait plus de mot pour la décrire.
Par la grâce de ces connexions prolongées,
de toutes ces heures passées avec elle, en elle,
je découvrais la joie d'être en communion.
Au fil de toutes ces années passées,
à explorer ce pays sans carte,
j'ai découvert qu'il existait en elle un endroit magique.
Dans son ventre de femme.
Une porte ouverte sur l'infini.
C'est par là, que la femme, magicienne,