Hercule/Héraclès : ses douze travaux et sa mort peu enviable (2)
Oui...le gars qui a libéré le taureau juste avant...du coup la suite nous étonne qu'à moitié :
Eurysthée relâche les chevaux cannibales dans la nature. A ce moment-là, on peut être tenté 1/de
considérer Eurysthée comme un abruti fini 2/de flipper devant l'éventualité de se retrouver face
à deux équidés avides de sang en allant chercher son pain. Heureusement, la nature est belle comme
diraient les elfettes dans World of Warcraft. Résultat de l'affaire : des bêtes sauvages
dévorent les deux chevaux monstrueux. Tout le monde est sauf et tout est bien qui fini bien !
9ème dessert à la carte, Admète, fille d'Eurysthée, demande un présent à son
père. Le roi a une idée : il envoie Hercule prendre la ceinture d'Arès -le dieu de la
Guerre- qui a été offerte à Hippolyté, sa fille, reine des guerrières Amazones.
On voit pas ce qui pourrait mal tourner… Non Non...Ah vous êtes mauvaises langues ! On ne sait
pas ce qu'il lui dit, mais la redoutable reine...accepte. Comme quoi….
Bon d'accord...Héra, se déguise en Amazone,
fait croire aux Amazones qu'Hercule va enlever leur reine et finalement Hercule,
qui n'est pas hyper galant, tue sans merci Hippolyté, arrache sa ceinture,
et la ramène au roi pour torcher sa quête…. 10ème activité, Hercule doit combattre le
géant Géryon et voler son troupeau de bœufs... et ça ne va pas être facile !
Le bouvier Géryon a un triple tronc : à partir de la taille, il a 3 bustes, 6 bras,
3 têtes. Son chien qui l'accompagne partout a aussi 2 têtes et le dragon qui garde son
troupeau en a lui 7… Mais avant de terrasser le géant et ses compagnons, il doit régler une
question épineuse : comment transporter autant de bestiaux ? Facile : Hercule, agacé par le
soleil...le menace de son arc. Le dieu solaire, épaté, lui donne une immense coupe d'or. Hercule
défait Géryon et ses bestiaux avant d'embarquer les bœufs à bord du récipient. Il rend la coupe
au Soleil et les bœufs au brillant Eurysthée qui les sacrifie...à Héra, la pire ennemie d'Hercule.
Toujours très habile cet Eurysthée ! Nous voilà donc à 10 travaux qu'Hercule a mené
à bien. Oui mais voilà, comme Eurysthée refuse de reconnaître les travaux de l'hydre de Lerne
et des écuries d'Augias, il refile deux autres tâches à Hercule ! Pas du tout une arnaque vu
tout ce que Hercule vient de se taper ! C'est reparti, on retourne au turbin
donc ! 11ème foire à la saucisse, cette fois-ci Hercule doit carrément se rendre
au confin occidental du monde, par-delà la Méditerranée, au jardin des Hespérides,
où poussent des pommes d'or. C'est une foire aux pommes donc, autant pour moi.
Il traverse mille épreuves, et quasiment la terre entière, avant d'arriver au jardin. Là
il demande à Atlas, le titan qui porte la voûte céleste, de lui cueillir des pommes.
Ce dernier accepte, mais lui demande de le remplacer. Une fois les pommes cueillies,
Atlas refuse de reprendre sa place : Hercule est condamné à supporter le ciel pour
toujours ! Heureusement il ruse, prétextant de prendre une position plus confortable,
pour inverser les rôles à nouveau. Il s'enfuit avec les pommes qu'il offre à Eurysthée.
Qui, étonnement...les lui offre en retour !Un truc gentil pour une fois !
Et voilà le 12e challenge, le plus redoutable et insurmontable : Hercule,
fort de tous ses exploits, doit désormais descendre aux Enfers. Pire,
il a une mission précise : capturer Cerbère, le chien à 3 têtes qui garde ses portes inviolables.
Après s'être purifié et initié, Hercule pénètre aux Enfers… où il met un boxon
pas possible. Il commence à libérer les morts, à tataner les serviteurs d'Hadès,
à provoquer des éboulements… finalement Hadès n'en peut plus et cède à sa requête : Hercule
à le droit de capturer Cerbère, mais à mains nues. Notre héros utilise la même
technique que contre le lion de Némée : l'étouffement. Il le montre à Eurysthée
avant de rapporter respectueusement la bête toujours vivante aux Enfers.
Hey, ça reste une brave bête quand même, c'est pas parce qu'elle garde
les enfers qu'elle est mauvaise hein ! Après tant d'efforts, on pourrait
croire qu'un peu de réconfort, genre cocktail dans un jacuzzi,
serait bienvenue pour notre héros. Mais...pas vraiment !
Guérit, pardonné, il accomplit encore de nombreux exploits -mais je ne pouvais pas
tout vous raconter aujourd'hui ! Il prend même une nouvelle femme, Déjarine. Un jour les deux
amoureux doivent traverser une rivière. Le centaure Nessos propose son aide,
et prend Déjarine sur son dos. Mais aussitôt la rivière traversée, il tente de violer l'épouse
d'Hercule. Furieux, notre héros lui décoche une flèche bien placée. Mais Nessos, avant de mourir,
a le temps de donner un conseil à Déjarine : son sang de centaure est un véritable filtre d'amour
magique. Elle doit le récolter, et en imbiber la tunique de son mari si jamais celui-ci se
lasse d'elle. La femme, naïve, s'exécute. Bien sûr les années passent et Hercule,
connu pour son grand appétit sexuel, rend Déjarine de plus en plus jalouse. Elle
applique donc le conseil de Nessos et donne à son mari une tunique imbibée du sang du centaure.
Bon là je vous préviens, c'est dégueu.
Le sang est un poison puissant qui dévore les chairs, arrache la peau d'Hercule,
mais reste collé à son corps. Pas de chance, Hercule est immortel : il va donc douiller
pour l'éternité ! Ou pas, puisque résolu à ne pas souffrir éternellement, il fait dresser un bûcher
pour lui même, afin de brûler intégralement, jusqu'à ce qu'il ne reste rien. Ainsi consumé,
il s'élève au panthéon des dieux. Enfin débarrassé de sa nature mortelle, pleinement divin,
pardonné par Héra, il continue de veiller sur l'ordre céleste parmi les dieux immortels.
Et la légende continue. A Rome, elle inspire des adaptations qui empruntent des courants
artistiques ou philosophiques nouveaux. On a déjà cité Sénèque, qui utilise la fureur
d'Hercule pour illustrer la pensée stoïcienne. Hercule, victime de l'hybris, la démesure,
doit suivre une thérapie initiatique pour affronter son seul ennemi : lui-même.
La raison et l'esprit doivent primer sur la force et le physique,
même pour un bodybuildé de la première heure !
Pour justifier l'expansionnisme Romain, l'Hēraklês brutal devient Hercules Pacifer, le pacificateur,
un héros qui amène paix et prospérité. Aventurier, pionnier, chasseur de monstres, explorateur, il
donne accès à l'humanité à de nouvelles régions du monde. Les 12 travaux qui représentaient déjà la
conquête de la Méditerranée par les Grecs contre les Phéniciens sont maintenant une image de la
colonisation romaine. Les légendes tardives font d'Hercule un héros fondateur de cités comme Cadix,
Séville ou Barcelone. Il aménage le territoire, préparant le monde à la venue de la civilisation,
ouvrant la Méditerranée au niveau du détroit de Gibraltar (qu'on appelle les Colonnes d'Hercule),
et construisant les montagnes Pyrénées...pour ensevelir sa défunte amante Pyrène, fille du roi
de Narbonne. Enfin Hercules Invictus, l'invaincu, devient un symbole de légitimation du pouvoir
utilisé sur les monnaies des empereurs du 3e siècle comme Postume ou Gallien.
Et ça ne s'arrête pas là puisque le Moyen ge aussi a son propre Hercule chrétien : le Christ,
lui aussi ordonnateur du monde, créateur d'ordre social, pourfendeur de l'ancien
monde monstrueux du paganisme. Même s'il est moins bodybuildé...C'est clair…
La Renaissance en fait un héros moral : l'auteur Andrea Alciato (16e siècle)
l'inclut à ses Emblèmes, les 12 travaux donnent lieux à des adages centré sur la
raison plus que sur le corps ou l'émotion. C'est donc un Hercule stoïque, éthique,
pragmatique, qui parvient à notre modernité. Il inspire le personnage de Robinson Crusoë,
lui aussi rejeté par sa famille, lancé dans un hostile monde marin, qui finit par le dominer
et le coloniser en affrontant toutes sortes d'oiseaux, de bêtes fauves et de peuples sauvages…
Ouais, Robinson Crusoë c'est un peu le reboot d'Hercule.
Tu ne l'avais pas vu venir, moi non plus.
Bien vite le cinéma muet s'empare d'Hercule : face aux figures américaines du super-héros,
du cow-boy et du trappeur, l'Europe a les 3 en 1 : Hercule ! 31 films sont produits sur
Hercule : muets, peplum, et modernes. Il faut y ajouter tous les avatars qui
partagent les caractéristiques d'Hercule et s'en inspirent grandement. Le pseudo-Hercule Maciste,
héros du cinéma muet italien, compte 20 films à lui seul. Comme tant d'autres,
il voyage à travers le temps : s'il est esclave à Carthage dans un premier opus,
les suites le font affronter Zorro, explorer la Vallée des Rois d'Egypte,
ou se battre dans les tranchées de la première guerre mondiale ! Le phénomène Hercule se poursuit
jusqu'en 1970 avec Hercule à New York : un film qui pousse Arnold Schwarzenegger sur le devant
de la scène ! La BD et le cinéma d'animation prennent ensuite le relais : chez Marvel,
Hercule aide Thor à… remettre en place l'île de Manhattan, volée par un super-vilain. En France,
Astérix parodie les douze travaux en les modernisant : la séquence où le héros Gaulois
est confronté aux affres de l'administration qui le noie de paperasses et de formulaires
est internationalement célèbre. Et enfin, la crème de la crème : la série américaine de 1995,
où Hercule affronte entre autres Xena la Guerrière qui aura droit à sa propre série mythologique.
Ecoutez moi juste cette accroche du générique :
“ Les dieux étaient mesquins et cruels, ils prenaient un malin plaisir à faire souffrir
les hommes. Un seul homme a osé les affronter : Hercule. Hercule possédait une force que le
monde ne connaissait pas, une force que seul le pouvoir de son cœur pouvait surpasser. [...] Les
opprimés, les malheureux n'étaient plus seuls, ils avaient enfin un espoir : Hercule.”
C'est la dernière étape en date du délirant chemin parcouru par Hercule : à partir de Maciste,
Hercule n'est même plus un dieu. Il est 100% défenseur de l'humanité, des pauvres, des faibles,
des opprimés, c'est un type qui a bon cœur. Pour représenter et défendre le petit peuple,
Hercule n'hésite pas à jeter les puissants de leur trône et...à les remplacer. C'est le
paradoxe du “bon tyran”, qui terrasse l'élite mais reste au-dessus du commun des mortels à
cause de sa force surnaturelle qui instaure un règne nécessairement placé au-dessus des lois.
Mais comment ne pas aimer ce gros nounours aux gros biscottos hein ? Dur dur ! Merci à tous
d'avoir suivi cet épisode préparé avec Jean de Boisséson, j'espère sincèrement qu'il vous
aura fait kiffer, perso j'adore la mythologie et avec la grecque, y'a vraiment de quoi se marrer !
Cet épisode est d'ailleurs sponsorisé par les éditions RBA, avec qui j'ai déjà
travaillé sur la mythologie nordique, qui ressort actuellement toute une collection
de récits incroyables sur la mythologie grecque que je ne peux que vous conseiller.
Cette Collection Mythologie, “les prodigieuses aventures de dieux et héros grecs” va vous
permettre d'explorer toute la richesse des mythes grecs en évoquant leurs héros et leurs aventures,
avec un max de rigueur et d'informations complémentaires qui viennent apporter pas
mal de choses sur les récits. Si vous avez aimé cette vidéo sur Hercule, pour moi c'est évident
que c'est le genre d'ouvrages qui vous plairont ! En plus il y a de très belles illustrations
pour se plonger dans l'univers et visualiser un peu mieux ce qu'on nous raconte, inspiré des
céramiques antiques et des super dessins de John Flaxman, un illustrateur du XVIIIe siècle. Bien
évidement on va retrouver dans cette collection des livres sur Hercule mais aussi sur Zeus,
Achille, Ulysse...y'en a vraiment pour tous les goûts...D'ailleurs j'attends avec impatience celui
sur Icare parce que quand j'étais beaucoup plus jeune, au collège, j'avais lu un énorme pavé sur
Icare et que j'ai eu beaucoup d'affection pour ce mythe. Si ça vous intéresse sachez
que celle collection est disponible dés le 6 janvier 2021 chez votre marchand de journaux,
un nouveau livre sort toutes les deux semaines. Et sinon vous pouvez souscrire à un abonnement
chez RBA pour recevoir directement les nouveaux tomes dans votre boite au lettre. L'avantage de
l'abonnement c'est que vous ne loupez pas de sortie, que vous avez un volume offert,
10 fac-similés des illustrations de Flaxman sur les passages importants de
l'Odysée d'Ulysse et un super beau livre illustré, “L'Atlas de la mythologie”.