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TEDx Talks, Les Secrets pour Améliorer son Orthographe | Céline Gonzalez | TEDxGrasse (1)

Les Secrets pour Améliorer son Orthographe | Céline Gonzalez | TEDxGrasse (1)

Transcription: Claire Ghyselen Relecteur: Anne-Sophie Matichard

Le Chat a dit :

« Écrire sans faute

ou écrire cent fautes,

certains ont déjà du mal à ce stade. »

(Rires)

Cruel, n'est-ce pas ?

Je ne sais pas vous,

mais moi, j'aime beaucoup ce personnage du chat.

imaginé par le dessinateur belge Philippe Geluck

qui vient nous bousculer,

nous sortir de notre torpeur,

nous faire voir le monde différemment

et surtout nous faire voir différemment ce que l'habitude nous fait oublier.

Et il se trouve qu'une fois encore,

le chat fait mouche,

si je puis dire,

avec talent.

Parce que ce qu'on constate dernièrement dans les médias

que ce soit la télévision, dans les journaux ou à la radio,

c'est que l'orthographe est devenu un véritable enjeu économique

pour les entreprises.

L'orthographe leur coûte cher,

leur fait perdre des contrats.

Et c'est vrai qu'aujourd'hui, ce qu'on constate également,

c'est que nous tous, que ce soit à titre professionnel ou à titre personnel,

eh bien, nous sommes toutes et tous amenés à écrire tous les jours,

à produire du contenu.

Que ce soit des mails, des comptes-rendus,

des textos,

ou bien également tous les jours sur les nombreux réseaux sociaux,

des posts.

J'aimerais aujourd'hui répondre à deux questions.

Première question :

Pourquoi faisons-nous tous des fautes d'orthographes ?

Et deuxième question :

Eh bien, au fond, pourquoi l'orthographe est-elle importante ?

En ce qui me concerne,

j'ai toujours eu cette curiosité gourmande pour les mots,

des plus communs aux plus rares,

et pour des formules qui, à mes oreilles, sonnaient de façon magique.

Dans « Le Petit Chaperon rouge »,

« tire la chevillette et la bobinette cherra »,

que je ne comprenais pas tout à fait.

Également d'autres formules du genre :

La mariée ira mal,

qu'en français on peut lire de gauche à droite,

mais aussi de droite à gauche.

Vous pourrez essayer après.

À un accent près,

et nous verrons que cet accent fait toute la différence.

Également un verbe que j'aime beaucoup :

le verbe rêver,

que l'on peut lire aussi de droite à gauche

et de gauche à droite.

Et aujourd'hui, depuis plus de 18 ans,

c'est dans l'édition que s'exerce ma passion pour la langue

et également comme formatrice.

Et avec mon équipe de correcteurs, nous avons accompagné de nombreux auteurs

à la recherche du mot juste, de l'expression juste -

et l'exercice, croyez-moi, est loin d'être aisé -

en restant toujours au service d'un style

et au service d'une voix.

Alors bien sûr, cela voulait dire aussi corriger l'orthographe et la typographie.

Et d'ailleurs, c'est à cette occasion,

que j'ai appris dans l'expression : un arbre sans feuilles,

eh bien, il faut un s à feuilles.

Parce que si l'arbre en avait, des feuilles, justement,

il en aurait plusieurs.

C'est également là que j'ai appris

que après-midi peut être accordé au masculin ou au féminin.

Alors bien sûr, au sein d'un même texte, au sein d'un même roman, il faut choisir

mais les deux sont possibles.

Étant originaire du sud-ouest de la France,

j'ai une nette préférence pour le féminin.

Une après-midi ensoleillée,

« ée ».

C'est là aussi que j'ai appris qu'à une certaine époque,

il existait une différence ténue mais bien présente,

entre faire de nouveau,

c'est-à-dire faire plusieurs fois

et faire à nouveau,

c'est-à-dire effacer et refaire à neuf.

Je vous rassure,

aujourd'hui, rares sont les personnes qui connaissent cette différence de sens,

tant il est vrai qu'en orthographe et en langue,

c'est l'usage qui prévaut.

Et l'usage, vaut qu'aujourd'hui,

vous puissiez employer l'une ou l'autre des expressions indifféremment.

À nouveau et de nouveau.

Je m'arrête là car je pourrais continuer pendant des heures.

Vous l'aurez compris,

la correction réclame une concentration extrême

ainsi qu'une posture de doute quasi permanente

et véritablement épuisante.

Faut-il un « e », faut-il un « s » ?

Faut-il deux « l » ?

Et je me souviens,

mes premières années, à la fin de la journée,

j'avais le cerveau qui bouillonnait

et j'en venais à douter de tout,

presque à chercher « maman » dans le dictionnaire.

M a m a n ?

Je crois que c'est bon, allez, je passe.

Donc aujourd'hui, laissez-moi être votre guide

dans cette balade au pays de la langue française.

Et restez avec moi, jusqu'au bout !

Je vous donnerai une astuce simple et directement applicable

qui vous permettra d'améliorer vos écrits.

Question numéro une :

Pourquoi faisons-nous tous des fautes d'orthographe ?

Je ne parle pas ici du défaut de connaissance que nous pouvons avoir

tous et toutes de certaines règles du français.

Le français est une langue réputée difficile, à juste titre.

Et pour ma part, j'affine tous les jours sa connaissance.

Cependant,

les principales règles, les principaux écueils sont en nombre limité

et peuvent être révisés en quelques heures d'étude.

Donc, je ne parle pas de cet aspect-là, qui est bien sûr essentiel,

mais qui n'offre pourtant pas une complète garantie

contre les coquilles.

Car dans notre jargon d'édition, on nomme les coquilles,

vous savez, ces petites fautes qui crissent sous la dent,

qui crissent, qui accrochent l'oeil.

Alors, d'abord un petit sondage.

Levez la main ceux qui parmi vous, se sont déjà retrouvés

dans la situation suivante :

imaginez,

vous êtes devant votre ordinateur et vous rédigez un message.

Vous le relisez.

Vous appuyez sur la touche « Envoi »

pour immédiatement vous rendre compte que vous y avez laissé une erreur

soit de contenu ou d'orthographe.

Levez la main, s'il vous plaît.

Je lève la main car je me suis déjà retrouvée dans cette situation

et cela m'arrive malheureusement encore aujourd'hui.

Je vois beaucoup d'entre vous.

Merci pour votre honnêteté.

En tant qu'amoureuse des mots,

quand j'ai une question, je me tourne vers mes fidèles compagnons,

mes amis de toujours : les dictionnaires.

Et pour répondre à cette question,

pourquoi faisons-nous tous des fautes d'orthographe,

je me suis emparée de mon Grand Robert de la langue française

et je l'ai posé avec fracas sur mon pupitre.

Je l'ai ouvert,

il est véritablement très gros,

et puis, je l'ai feuilleté,

feuilleté,

feuilleté jusqu'à tomber sur la définition

du verbe lire.

Et c'est là

que Robert nous apprend que le verbe lire

provient du verve latin : legere.

Qui a donc donné en français plus tard, le verbe lire.

Mais également,

au gré des caprices de l'évolution de la langue,

le verbe élire.

Lire,

élire.

Si bien qu'on peut dire que lire, c'est d'abord et avant tout : choisir.

Et cette notion de choix,

qui est inhérente à l'acte de lire,

elle m'a particulièrement intéressée

car elle illustre parfaitement

la façon dont vous et moi lisons le français de manière naturelle.

C'est ce que montre la recherche en psychologie cognitive de la lecture.

Nous ne lisons pas toutes les syllabes d'un mot

et nous ne lisons pas tous les mots dans une phrase.

À propos des mots,

eh bien, nous les reconnaissons dans leur ensemble.

À propos des phrases,

notre oeil parcourt le texte à la recherche de ce qui est le plus important,

le plus important pour la lecture,

c'est-à-dire, le plus porteur de sens :

les noms, les adjectifs et les verves en tête.

Ensuite, notre oeil et notre cerveau reconstituent la phrase

d'après la connaissance intime que nous avons de notre langue.

C'est ainsi que l'on peut dire que la lecture est une succession de fixations

et de saccades.

Je répète :

la lecture est ainsi une succession de fixations

et de saccades.

Ce qu'il faut savoir,

c'est qu'entre deux fixations,

l'oeil est aveugle.

Je ne sais pas si c'est une bonne nouvelle.

Quoi qu'il en soit,

la conséquence pour celui qui se propose de relire un texte, quel qu'il soit,

c'est que les erreurs risquent fort de lui échapper

parce que son oeil et son cerveau les auront automatiquement gommées

et automatiquement corrigées.

Par ailleurs,

celui qui relit lui-même des phrases dont il est à l'origine,

voit se dresser devant lui un deuxième écueil.

D'abord, nous l'avons vu, l'écueil de ses habitudes de lecture.

Ensuite, l'écueil tendu par son statut d'auteur,

qui fait qu'il va encore moins, dans ce cas, relire ce qui est écrit,

mais bien relire ce qu'il sait,

ou plutôt, ce qu'il croit être écrit.

Je ne sais pas si c'est également une bonne nouvelle.

Quoi qu'il en soit, j'en arrive à ma question numéro deux :

au fond, pourquoi l'orthographe est-elle importante ?

Et cette question, quand on la pose,

elle en amène immédiatement une troisième, qui est

la suivante :

quel objectif premier poursuivons-nous

lorsque nous adressons un écrit, quel qu'il soit, à un destinataire ?

Quel est notre objectif premier ?

Eh bien, l'objectif premier,

est de toucher l'autre par la pertinence d'une idée,

par le contenu d'un message,

nous cherchons à transmettre une information,

nous cherchons à plaire,

nous cherchons à convaincre.

Or, la faute d'orthographe brouille notre message,

en pollue le contenu.

Mais surtout, la faute d'orthographe distrait le destinataire

du contenu premier du message.

J'ai pour vous trois exemples où la langue nous piège.

Si je vous dis :

« J'ai acheté l'appartement de ma voisine

que j'ai tant convoité / convoitée. »

(Rires)

Ouais.

Vous voyez où je veux en venir.

Comment écrivez-vous « convoité » ?

« Convoité » : é ?

« Convoitée » : ée ?

Les avis divergent.

Bien sûr, les deux sont possibles, tout dépend du sens

et tout dépend de qui parle.

Est-ce un investisseur immobilier qui convoite l'appartement ?

Ou est-ce un amoureux qui convoite la voisine ?

Tout dépend du sens.

Vous aurez reconnu la règle de l'accord du participe passé

avec le complément d'objet direct lorsqu'il est situé avant le verbe.

Un deuxième exemple maintenant, si je vous dis :

« Et si on mangeait,

virgule,

les enfants ? »

Qui parle dans ce cas-là ?

C'est un parent qui appelle ses enfants pour le repas.

Alors, d'après mon expérience, il peut toujours attendre.

Maintenant, enlevez la virgule :

« Et si on mangeait les enfants ? »

Dans ce cas-là, ce n'est plus la même chose, n'est-ce pas ?

C'est l'ogre, qui parle à l'ogresse à propos du Petit Poucet et de ses frères.

Comme quoi, parfois, la vie tient à une virgule.

J'ai pour vous un troisième et dernier exemple :

Il y a quelques temps, un célèbre avocat que nous appellerons Monsieur V,

reprenait sur une scène de théâtre les moments marquants de sa carrière.

L'affiche était libellée en ces termes et était visible dans le métro :

« MONSIEUR V ... A LA BARRE »

(Rires)

Hélas !

Hélas !

Et je vous laisse savourer la coquille.

(Rires)

Dans les premières impressions de l'affiche,

l'accent sur le « à » avait été oublié.

(Rires)

Alors, bien sûr,

les internautes se sont emparés de l'affaire, Twitter en tête,

où ils se sont demandé

avec une certaine malice et une certaine mauvaise foi,

si le spectacle était interdit aux moins de 18 ans.

Dans les impressions suivantes de l'affiche,

l'accent sur le « à » a été rétabli.

Mais cet exemple vous montre bien

qu'en français, l'accent a une pleine valeur orthographique.

Et c'est bien là la principale réponse à la question :

pourquoi l'orthographe est-elle importante ?

l'orthographe, en tant que code commun,

partagé par tous les utilisateurs du français

et reflet des usages,

parce qu'au fond, l'orthographe est surtout ça : un reflet des usages,

porte notre sérieux et notre crédibilité.

Elle est en somme la politesse de celui qui écrit.

Et encore une fois,

je me suis tournée vers les racines des mots

tant il est vrai que l'examen des racines des mots permet

d'enrichir le sens actuel et d'enrichir aussi l'imaginaire que nous y associons.

Et il m'a toujours absolument fasciné

que les mots « texte » et « textile »

proviennent d'un même mot latin qui est « textus ».

Et il est vrai qu'un texte se tisse patiemment, fil à fil,

couleur après couleur

et que le dessin final,

d, e, deux s, i, n,

ou dessein final,

d, e, deux s, e, i, n,

ne s'apprécie vraiment qu'une fois la lecture ou l'ouvrage achevé.

Et à la manière d'une étoffe bien ajustée sur le corps,

qui sait se faire oublier

pour mieux mettre en valeur celui ou celle qui la porte,

Les Secrets pour Améliorer son Orthographe | Céline Gonzalez | TEDxGrasse (1) Les Secrets pour Améliorer son Orthographe | Céline Gonzalez | TEDxGrasse (1) I segreti per migliorare il proprio ortografia | Céline Gonzalez | TEDxGrasse (1)

Transcription: Claire Ghyselen Relecteur: Anne-Sophie Matichard

Le Chat a dit :

« Écrire sans faute

ou écrire cent fautes,

certains ont déjà du mal à ce stade. »

(Rires)

Cruel, n'est-ce pas ?

Je ne sais pas vous,

mais moi, j'aime beaucoup ce personnage du chat.

imaginé par le dessinateur belge Philippe Geluck

qui vient nous bousculer,

nous sortir de notre torpeur,

nous faire voir le monde différemment

et surtout nous faire voir différemment ce que l'habitude nous fait oublier.

Et il se trouve qu'une fois encore,

le chat fait mouche,

si je puis dire,

avec talent.

Parce que ce qu'on constate dernièrement dans les médias

que ce soit la télévision, dans les journaux ou à la radio,

c'est que l'orthographe est devenu un véritable enjeu économique

pour les entreprises.

L'orthographe leur coûte cher,

leur fait perdre des contrats.

Et c'est vrai qu'aujourd'hui, ce qu'on constate également,

c'est que nous tous, que ce soit à titre professionnel ou à titre personnel,

eh bien, nous sommes toutes et tous amenés à écrire tous les jours,

à produire du contenu.

Que ce soit des mails, des comptes-rendus,

des textos,

ou bien également tous les jours sur les nombreux réseaux sociaux,

des posts.

J'aimerais aujourd'hui répondre à deux questions.

Première question :

Pourquoi faisons-nous tous des fautes d'orthographes ?

Et deuxième question :

Eh bien, au fond, pourquoi l'orthographe est-elle importante ?

En ce qui me concerne,

j'ai toujours eu cette curiosité gourmande pour les mots,

des plus communs aux plus rares,

et pour des formules qui, à mes oreilles, sonnaient de façon magique.

Dans « Le Petit Chaperon rouge »,

« tire la chevillette et la bobinette cherra »,

que je ne comprenais pas tout à fait.

Également d'autres formules du genre :

La mariée ira mal,

qu'en français on peut lire de gauche à droite,

mais aussi de droite à gauche.

Vous pourrez essayer après.

À un accent près,

et nous verrons que cet accent fait toute la différence.

Également un verbe que j'aime beaucoup :

le verbe rêver,

que l'on peut lire aussi de droite à gauche

et de gauche à droite.

Et aujourd'hui, depuis plus de 18 ans,

c'est dans l'édition que s'exerce ma passion pour la langue

et également comme formatrice.

Et avec mon équipe de correcteurs, nous avons accompagné de nombreux auteurs

à la recherche du mot juste, de l'expression juste -

et l'exercice, croyez-moi, est loin d'être aisé -

en restant toujours au service d'un style

et au service d'une voix.

Alors bien sûr, cela voulait dire aussi corriger l'orthographe et la typographie.

Et d'ailleurs, c'est à cette occasion,

que j'ai appris dans l'expression : un arbre sans feuilles,

eh bien, il faut un s à feuilles.

Parce que si l'arbre en avait, des feuilles, justement,

il en aurait plusieurs.

C'est également là que j'ai appris

que après-midi peut être accordé au masculin ou au féminin.

Alors bien sûr, au sein d'un même texte, au sein d'un même roman, il faut choisir

mais les deux sont possibles.

Étant originaire du sud-ouest de la France,

j'ai une nette préférence pour le féminin.

Une après-midi ensoleillée,

« ée ».

C'est là aussi que j'ai appris qu'à une certaine époque,

il existait une différence ténue mais bien présente,

entre faire de nouveau,

c'est-à-dire faire plusieurs fois

et faire à nouveau,

c'est-à-dire effacer et refaire à neuf.

Je vous rassure,

aujourd'hui, rares sont les personnes qui connaissent cette différence de sens,

tant il est vrai qu'en orthographe et en langue,

c'est l'usage qui prévaut.

Et l'usage, vaut qu'aujourd'hui,

vous puissiez employer l'une ou l'autre des expressions indifféremment.

À nouveau et de nouveau.

Je m'arrête là car je pourrais continuer pendant des heures.

Vous l'aurez compris,

la correction réclame une concentration extrême

ainsi qu'une posture de doute quasi permanente

et véritablement épuisante.

Faut-il un « e », faut-il un « s » ?

Faut-il deux « l » ?

Et je me souviens,

mes premières années, à la fin de la journée,

j'avais le cerveau qui bouillonnait

et j'en venais à douter de tout,

presque à chercher « maman » dans le dictionnaire.

M a m a n ?

Je crois que c'est bon, allez, je passe.

Donc aujourd'hui, laissez-moi être votre guide

dans cette balade au pays de la langue française.

Et restez avec moi, jusqu'au bout !

Je vous donnerai une astuce simple et directement applicable

qui vous permettra d'améliorer vos écrits.

Question numéro une :

Pourquoi faisons-nous tous des fautes d'orthographe ?

Je ne parle pas ici du défaut de connaissance que nous pouvons avoir

tous et toutes de certaines règles du français.

Le français est une langue réputée difficile, à juste titre.

Et pour ma part, j'affine tous les jours sa connaissance.

Cependant,

les principales règles, les principaux écueils sont en nombre limité

et peuvent être révisés en quelques heures d'étude.

Donc, je ne parle pas de cet aspect-là, qui est bien sûr essentiel,

mais qui n'offre pourtant pas une complète garantie

contre les coquilles.

Car dans notre jargon d'édition, on nomme les coquilles,

vous savez, ces petites fautes qui crissent sous la dent,

qui crissent, qui accrochent l'oeil.

Alors, d'abord un petit sondage.

Levez la main ceux qui parmi vous, se sont déjà retrouvés

dans la situation suivante :

imaginez,

vous êtes devant votre ordinateur et vous rédigez un message.

Vous le relisez.

Vous appuyez sur la touche « Envoi »

pour immédiatement vous rendre compte que vous y avez laissé une erreur

soit de contenu ou d'orthographe.

Levez la main, s'il vous plaît.

Je lève la main car je me suis déjà retrouvée dans cette situation

et cela m'arrive malheureusement encore aujourd'hui.

Je vois beaucoup d'entre vous.

Merci pour votre honnêteté.

En tant qu'amoureuse des mots,

quand j'ai une question, je me tourne vers mes fidèles compagnons,

mes amis de toujours : les dictionnaires.

Et pour répondre à cette question,

pourquoi faisons-nous tous des fautes d'orthographe,

je me suis emparée de mon Grand Robert de la langue française

et je l'ai posé avec fracas sur mon pupitre.

Je l'ai ouvert,

il est véritablement très gros,

et puis, je l'ai feuilleté,

feuilleté,

feuilleté jusqu'à tomber sur la définition

du verbe lire.

Et c'est là

que Robert nous apprend que le verbe lire

provient du verve latin : legere.

Qui a donc donné en français plus tard, le verbe lire.

Mais également,

au gré des caprices de l'évolution de la langue,

le verbe élire.

Lire,

élire.

Si bien qu'on peut dire que lire, c'est d'abord et avant tout : choisir.

Et cette notion de choix,

qui est inhérente à l'acte de lire,

elle m'a particulièrement intéressée

car elle illustre parfaitement

la façon dont vous et moi lisons le français de manière naturelle.

C'est ce que montre la recherche en psychologie cognitive de la lecture.

Nous ne lisons pas toutes les syllabes d'un mot

et nous ne lisons pas tous les mots dans une phrase.

À propos des mots,

eh bien, nous les reconnaissons dans leur ensemble.

À propos des phrases,

notre oeil parcourt le texte à la recherche de ce qui est le plus important,

le plus important pour la lecture,

c'est-à-dire, le plus porteur de sens :

les noms, les adjectifs et les verves en tête.

Ensuite, notre oeil et notre cerveau reconstituent la phrase

d'après la connaissance intime que nous avons de notre langue.

C'est ainsi que l'on peut dire que la lecture est une succession de fixations

et de saccades.

Je répète :

la lecture est ainsi une succession de fixations

et de saccades.

Ce qu'il faut savoir,

c'est qu'entre deux fixations,

l'oeil est aveugle.

Je ne sais pas si c'est une bonne nouvelle.

Quoi qu'il en soit,

la conséquence pour celui qui se propose de relire un texte, quel qu'il soit,

c'est que les erreurs risquent fort de lui échapper

parce que son oeil et son cerveau les auront automatiquement gommées

et automatiquement corrigées.

Par ailleurs,

celui qui relit lui-même des phrases dont il est à l'origine,

voit se dresser devant lui un deuxième écueil.

D'abord, nous l'avons vu, l'écueil de ses habitudes de lecture.

Ensuite, l'écueil tendu par son statut d'auteur,

qui fait qu'il va encore moins, dans ce cas, relire ce qui est écrit,

mais bien relire ce qu'il sait,

ou plutôt, ce qu'il croit être écrit.

Je ne sais pas si c'est également une bonne nouvelle.

Quoi qu'il en soit, j'en arrive à ma question numéro deux :

au fond, pourquoi l'orthographe est-elle importante ?

Et cette question, quand on la pose,

elle en amène immédiatement une troisième, qui est

la suivante :

quel objectif premier poursuivons-nous

lorsque nous adressons un écrit, quel qu'il soit, à un destinataire ?

Quel est notre objectif premier ?

Eh bien, l'objectif premier,

est de toucher l'autre par la pertinence d'une idée,

par le contenu d'un message,

nous cherchons à transmettre une information,

nous cherchons à plaire,

nous cherchons à convaincre.

Or, la faute d'orthographe brouille notre message,

en pollue le contenu.

Mais surtout, la faute d'orthographe distrait le destinataire

du contenu premier du message.

J'ai pour vous trois exemples où la langue nous piège.

Si je vous dis :

« J'ai acheté l'appartement de ma voisine

que j'ai tant convoité / convoitée. »

(Rires)

Ouais.

Vous voyez où je veux en venir.

Comment écrivez-vous « convoité » ?

« Convoité » : é ?

« Convoitée » : ée ?

Les avis divergent.

Bien sûr, les deux sont possibles, tout dépend du sens

et tout dépend de qui parle.

Est-ce un investisseur immobilier qui convoite l'appartement ?

Ou est-ce un amoureux qui convoite la voisine ?

Tout dépend du sens.

Vous aurez reconnu la règle de l'accord du participe passé

avec le complément d'objet direct lorsqu'il est situé avant le verbe.

Un deuxième exemple maintenant, si je vous dis :

« Et si on mangeait,

virgule,

les enfants ? »

Qui parle dans ce cas-là ?

C'est un parent qui appelle ses enfants pour le repas.

Alors, d'après mon expérience, il peut toujours attendre.

Maintenant, enlevez la virgule :

« Et si on mangeait les enfants ? »

Dans ce cas-là, ce n'est plus la même chose, n'est-ce pas ?

C'est l'ogre, qui parle à l'ogresse à propos du Petit Poucet et de ses frères.

Comme quoi, parfois, la vie tient à une virgule.

J'ai pour vous un troisième et dernier exemple :

Il y a quelques temps, un célèbre avocat que nous appellerons Monsieur V,

reprenait sur une scène de théâtre les moments marquants de sa carrière.

L'affiche était libellée en ces termes et était visible dans le métro :

« MONSIEUR V ... A LA BARRE »

(Rires)

Hélas !

Hélas !

Et je vous laisse savourer la coquille.

(Rires)

Dans les premières impressions de l'affiche,

l'accent sur le « à » avait été oublié.

(Rires)

Alors, bien sûr,

les internautes se sont emparés de l'affaire, Twitter en tête,

où ils se sont demandé

avec une certaine malice et une certaine mauvaise foi,

si le spectacle était interdit aux moins de 18 ans.

Dans les impressions suivantes de l'affiche,

l'accent sur le « à » a été rétabli.

Mais cet exemple vous montre bien

qu'en français, l'accent a une pleine valeur orthographique.

Et c'est bien là la principale réponse à la question :

pourquoi l'orthographe est-elle importante ?

l'orthographe, en tant que code commun,

partagé par tous les utilisateurs du français

et reflet des usages,

parce qu'au fond, l'orthographe est surtout ça : un reflet des usages,

porte notre sérieux et notre crédibilité.

Elle est en somme la politesse de celui qui écrit.

Et encore une fois,

je me suis tournée vers les racines des mots

tant il est vrai que l'examen des racines des mots permet

d'enrichir le sens actuel et d'enrichir aussi l'imaginaire que nous y associons.

Et il m'a toujours absolument fasciné

que les mots « texte » et « textile »

proviennent d'un même mot latin qui est « textus ».

Et il est vrai qu'un texte se tisse patiemment, fil à fil,

couleur après couleur

et que le dessin final,

d, e, deux s, i, n,

ou dessein final,

d, e, deux s, e, i, n,

ne s'apprécie vraiment qu'une fois la lecture ou l'ouvrage achevé.

Et à la manière d'une étoffe bien ajustée sur le corps,

qui sait se faire oublier

pour mieux mettre en valeur celui ou celle qui la porte,