Les épées magiques et légendaires (Excalibur, Durendal, Narsil…) (1)
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Je vous en dis un peu plus en fin de vidéo.
Très bon visionnage.
Mes chers camarades bien le bonjour !
Quand j'étais gamin je sais pas vous, mais je voulais être ce type qui arriverait, envers
et contre tous, à retirer l'épée du rocher.
Avouez, on a tous un jour rêvé de trouver une épée légendaire, un truc bien badass
comme Excalibur, Durendal ou Narsil ! Faut dire que parmi les armes magiques qui
ont marqué les légendes épiques, les épées se distinguent nettement.
De toutes les armes de contact utilisées au combat, de la lance, à la hache en passant
par le fléau, l'épée est la seule dédiée presque exclusivement à la guerre.
La hache, par exemple, est d'abord un outil.
L'épée c'est l'arme des batailles, elle est aussi celle des duels, celles avec
laquelle on règle les querelles d'honneur.
C'est un objet fait presque entièrement de métal (à la différence de la lance,
qui comporte du bois), son coût de fabrication est donc important et en fait l'arme privilégiée
des guerriers professionnels puis, très rapidement, de la noblesse chevaleresque à partir du
XIe siècle.
A peu près au même moment, les rois se font progressivement représenter avec une épée
portée pointe vers le haut, image que l'on retrouve encore aujourd'hui dans nos cartes
à jouer classiques.
C'est aussi à cette époque que les épées deviennent un élément important du sacre
des souverains, remis généralement par de hauts membres du clergé.
On le voit très bien dans les légendes médiévales où la possession d'une épée incarne le
pouvoir de la classe dominante.
Le cas le plus connu reste sans doute le roi Arthur et Excalibur, mais il y en a eu beaucoup
d'autres, et pas seulement en Occident.
La Chanson de Roland, épopée écrite au début du XIIe siècle narrant le combat opposant
Charlemagne et Roland aux sarrasins, ne décrit pas moins de six épées merveilleuses, bien
plus que la plupart des romans arthuriens.
Et pourquoi il y en a autant ? Parce que ce récit, plus que la légende du Graal, met
en scène et en valeur les exploits guerriers de la classe chevaleresque.
La plupart des grands héros chrétiens du texte ont une épée qui possède un nom et
une particularité, voire des pouvoirs.
Et ces caractéristiques, ça permet de la distinguer des autres armes, faisant de son
porteur un être exceptionnel.
Un peu comme Keanu Reeves.
On retrouve par exemple l'archevêque Turpin qui brandie “Almace”, fait « d'acier
bruni », avec laquelle il tranche ses adversaires en deux « dans le milieu du corps ».
Olivier, le compagnon de Roland, possède lui “Hauteclaire”, lame irréelle dont
la garde est d'or et la poignée de cristal.
Charlemagne brandit quant à lui “Joyeuse”, épée composée notamment de la Sainte Lance
qui aurait percé le flanc du Christ.
L'arme fait ainsi de celui qui la porte le représentant de Dieu sur Terre.
Mais c'est le héros du texte, Roland, qui possède sans doute l'épée la plus extraordinaire
: Durendal dont la « garde dorée » contient, explique la Chanson de Roland, « Une
dent de saint Pierre, du sang de saint Basile, Des cheveux de monseigneur saint Denis, du
vêtement de la Vierge Marie. »
Il s'agit donc d'une épée fortement associée à la religion chrétienne qui,
en plus d'avoir des pouvoirs, a aussi une longue histoire à l'image de la famille
du chevalier qui la brandit.
Selon le texte de La Chanson de Roland, elle aurait ainsi été donnée à Roland par Charlemagne
sur ordre d'un ange venu du ciel.
Par la suite, d'autres textes de la matière de France, un ensemble de récits épiques
développant une vision fantasmatique des exploits de Charlemagne et de ses barons,
épaississent encore l'histoire des épées merveilleuses.
Joyeuse, d'après la chanson Mainet, aurait ainsi été forgée par un armurier célèbre,
Isaac, trempé dans le Jourdain, la faisant l'égal du Christ (lui-même baptisé dans
cette rivière) avant d'être donné au roi Clovis, qui, de génération en génération,
l'aurait transmise à Charlemagne.
Durendal, elle, aurait été, en fonction des versions, soit donnée par Dieu, soit
arrachée par Charlemagne ou Roland à un adversaire sarrasin, soit offerte par un forgeron
juif en échange de la rançon de son frère.
Durendal, comme Joyeuse, ont parfois des épées sœurs qui auraient été fabriquées par
le même personnage mythique, Galant.
Ce qui est incroyable c'est que ces épées magiques, des armes nobles, ont comme les
familles aristocratiques de ceux qui les portent, une lignée dont l'histoire remonte à la
plus haute antiquité.
Elles sont des reflets d'eux-mêmes et ne peuvent être transmises qu'à un noble
issu d'une ascendance prestigieuse.
Si t'es un pécore de père en fils, tu peux toujours te brosser pour la choper.
Dans La Chanson de Roland, l'émir de Babylone Baligant possède ainsi « Précieuse »
alors que, dans le texte Mainet, le souverain sarrasin Galafre offre à Mainet une épée
magique contenant dans son pommeau une dent de Mahomet.
Celui-ci refuse, car il est en réalité Charlemagne et a déjà à son côté Joyeuse.
Et ce qui est assez étonnant, c'est que ces récits semblent indiquer que les auteurs
chrétiens avaient conscience que le monde islamique médiéval, notamment son aristocratie,
était lui aussi fasciné par les épées et avait développé tout une mythologie autour
d'elles.
Ainsi, très rapidement, les textes arabes attribuent à Mahomet neuf épées.
L'une d'entre elles, Al-Ma'thur, aurait été donnée au prophète par des djinns
(des génies) selon le chroniqueur du XIVe siècle Al-Dhahabi.
Une autre, appelée, Zulfikar, est devenue au fil du temps bien plus célèbre.
Un hadith est un récit traditionnel en rapport avec la vie de Mahomet.
Dans un de ces hadith, compilé au IXe siècle par Al-Tirmidhî, on nous explique que le
prophète aurait récupéré à la bataille de Badr en 624 cette arme dotée d'une double
pointe.
Le chroniqueur Ibn Shahr Ashub, au XIIe siècle, cite quant à lui plusieurs versions de l'origine
de cette épée qui aurait été soit appartenu au roi Salomon, soit à Adam, et qu'elle
aurait été faite de feuille d'un myrte du jardin d'Eden.
Ibn Abbas, un exégète du Coran,c'est à dire quelqu'un qui est spécialisé dans
l'interprétation coranique, rapporte lui qu'elle a été envoyée par l'archange
Gabriel à Mahomet qui l'aurait confié à son gendre Ali.
L'arme place ici le prophète de l'Islam dans une longue lignée liée à Dieu.
La ressemblance avec Joyeuse est assez frappante, avec toutefois une dimension religieuse plus
accentuée pour Zulfikar, l'épée étant associé non pas simplement à un souverain,
même s'il est idéalisé, mais à deux figures centrales de la religion musulmane,
Mahomet et Ali.
Le second est d'ailleurs devenu, comme nous allons le voir, le symbole du chiisme, et
il est courant depuis le Moyen âge parmi cette branche de l'islam de penser qu'à
la fin des temps, le Mahdi, lointain héritier d'Ali, reviendra amener la justice divine
sur terre en brandissant Zulfikar.
Ali est un personnage idéalisé, il est l'objet dès sa mort d'une forte dévotion populaire.
On écrit ainsi des légendes qui lui attribuent des exploits extraordinaires grâce à Zulfikar.
Dans le texte épique persan Khavarannama rédigé au début du XVe siècle, Ali, entre
autres prodiges, pourfend ainsi un dragon avec elle, comme on peut le voir sur une enluminure
de cette époque où l'épée est représenté sous les traits d'un cimeterre gigantesque,
si énorme que seul un héros, semble suggérer l'image, est capable de le manier.
Il y a quelque chose de vraiment incroyable en plus de ces toutes ces histoires.
C'est que de l'Orient à l'Occident, ces légendes sur les épées auront des effets
sur le monde réel.
Le plus connu d'entre eux est d'attribuer des particularités du relief à des armes
merveilleuses manipulées par les héros, exactement comme on a attribué, durant l'antiquité,
la création du détroit de Gibraltar à Hercules.
En France, il existe ainsi plusieurs brèches de Roland, ouverture gigantesque creusée
dans les montagnes qui aurait été provoquée par un coup puissant de l'épée du héros
sur la roche.
La plus connue se situe dans le cirque de Gavarnie, dans les Hautes-Pyrénées, et fait
plus de 40 mètres de large pour 100 mètres de haut.
Une autre peut être vu dans le Cantal.
Pareillement, il existe dans le monde musulman des cols attribué à Ali qui aurait fendu
des montagnes.
Sur un terrain politique, beaucoup de souverains médiévaux ont prétendu avoir en leur possession
une épée légendaire afin de renforcer leur prestige social.
Le cas de Zulfikar mériterait d'ailleurs un long développement, tant elle est au centre
de la querelle entre le chiisme et le sunnisme.
Cette querelle, elle survient lorsque se pose la question de la succession de Mahomet : pour
les chiites, c'est Ali, proche parent du prophète, qui doit devenir calife, ce que
refusent les sunnites.
L'affaire s'envenime, finit en guerre civile (durant laquelle Ali meurt assassiné
en l'an 661) pour aboutir à un schisme, la fitna qui voit jusqu'à nos jours les
deux camps s'opposer.
Or, pour les partisans d'Ali, le don de Zulfikar par Mahomet à son gendre constitue
une preuve que celui-ci était bien destiné à régner.
Du coup, tout au long de l'histoire du monde musulman, des dynasties affirmeront avoir
en leur possession l'épée.
La bannière rouge du sultan ottoman Sélim Ier (mort en 1520), qui est aujourd'hui
conservé au musée de Topkapi à Istanbul arbore une effigie de Zulfikar, tout comme
ceux des janissaires, le corps d'élite de son infanterie composé en grande partie
de chiites.
On retrouve de telles oriflammes au moins jusqu'au XIXe siècle, comme celui-ci.
En Europe, les rois de France, peut-être depuis la fin du XIIe siècle (mais attesté
de manière certaine seulement à la fin du XIIIe siècle), affirment que l'épée qui
est utilisée lors de leur sacre ne serait autre que Joyeuse, l'épée de Charlemagne.
Cette revendication permet aux monarques capétiens, alors en compétition de prestige avec les
empereurs germaniques qui prétendent descendre des souverains carolingiens, de s'ériger
comme les seuls héritiers directs de Charlemagne, voir même, si on en croit le texte de Mainet,
de Clovis et du Christ.
Cette Joyeuse, dont l'élément le plus ancien date du Xe siècle (et donc n'a pas
pu appartenir à Charlemagne) a été utilisé dans le sacre des rois de France jusqu'au
début du XIXe siècle.
Elle est aujourd'hui conservée au musée du Louvre.
Et pour le coup, Joyeuse est loin d'être un cas isolé !
Je le disais donc ! Joyeuse n'est pas la seule arme à avoir bénéficié d'un pareil
traitement ! Une épée appelée Almace faisait par exemple
partie du trésor de l'abbaye royale de Saint Denis au moins depuis le début du XVIe
siècle.
Néanmoins, ces usages étaient réservés à l'élite.
À l'inverse, il est frappant de constater que Zulfikar est devenue l'objet d'une
véritable dévotion populaire.
Encore aujourd'hui, on nomme des garçons d'après elle (notamment l'ancien premier
ministre du Pakistan, Zulfikar Ali Bhutto, mort en 1979), alors qu'elle est utilisée
également par des groupes politico-militaires, comme la brigade Zulfikar, unité chiite qui
a combattu durant la guerre civile syrienne.
Elle est représentée dans les mains d'Ali sur des images pieuses, et il est possible
d'acheter sur internet, des bijoux imitant sa forme caractéristique.
En Occident, il n'y a qu'Excalibur pour connaître une pareille popularité, l'aspect
religieux en moins.
On va y revenir d'ailleurs sur le cas du roi Arthur, parce que dés que l'on parle
du roi Arthur, la première image qui nous vient en tête, c'est tout de suite Excalibur
! En réalité, ce souverain mythique ne possède pas une épée, mais des épées.
Excalibur et l'épée dans la pierre qui ne sont pas, comme dans Kaamelott, une seule
et même lame, mais bien deux armes différentes ! Et la perso, je sais pas vous, mais avant