TOLÉRANCE ZÉRO 2010-01-07
Opération «tolérance zéro» dans le secteur des finances publiques. C'est ce que le site de RFI nous dit à propos d'une opération d'assainissement qui se déroule ne ce moment en RDC. En effet cent dix-neuf fonctionnaires du secteur des finances publiques ont été récemment révoqués pour corruption. C'est donc le prolongement de l'opération « mains propres », appelée ici « tolérance zéro », qui avait déjà été appliquée chez les magistrats. On voit bien le sens de l'expression : la tolérance zéro c'est l'absence absolue de tolérance ; et on insiste là-dessus. Au lieu d'utiliser une formule négative, comme pas de risque, aucune tolérance, pas la moindre tolérance, on utilise une formule affirmative et même quantifiée, chiffrée. Mais le chiffre est nul : c'est donc une façon de dire les choses de façon superlative, et qui retient beaucoup plus l'attention. Seulement c'est si fréquent que c'est devenu un cliché qui traîne un peu partout. Les premières fois qu'on l'a lu ou entendu, ce tour avait un côté un peu martial, militaire. Il claquait comme un ordre ou un aboiement d'adjudant. Son côté mathématique, qui semblait échapper à la syntaxe ordinaire, lui donnait cette coloration cinglante. Mais son style évoque aussi un imaginaire scientifique. On évoque quelque graphique, avec des courbes et des unités de mesure, quelque chose comme une échelle qui pourrait rappeler des travaux de géophysique. Ainsi les tremblements de terre pour lesquels on a inventé une échelle de magnitude, c'est-à-dire une façon d'en chiffrer l'intensité. Et on dit que telle secousse se trouve à tel niveau de l'échelle de Richter : 3, 4, 5. Alors le niveau zéro évoque bien sûr la certitude que rien ne se passe.
L'astuce consiste en fait à mettre ce mot zéro sur le même plan que les autres chiffres. Ces chiffres ont deux sens distincts : ils représentent une position sur l'échelle des nombres, ou bien ce sont des adjectifs qui représentent une quantité. Or zéro en principe n'est pas un adjectif qui représente une quantité. On dit j'ai deux canards, trois francs, quatre chemises. Mais on ne dit pas « j'ai zéro voiture ». On dit, à la place : je n'ai pas de voiture. Utiliser zéro dans ce cas-là, c'est faire un effet ! Donc, si on dit « tolérance zéro », au lieu de « pas de tolérance du tout », c'est pour faire un effet de sens qui va en rajouter sur le fait que, justement, il n'y aura aucune exception tolérée. Coproduction du Centre national de Documentation Pédagogique. http://www.cndp.fr/