Joachim du Bellay : Les Regrets LXIX [Pourquoi me grondes-tu, vieux matin...]
Pourquoi me grondes-tu, vieux matin affamé, Comme si Du Bellay n'avait point de défense ? Pourquoi m'offenses-tu, qui ne t'ai fait offense, Sinon de t'avoir trop quelquefois estimé ? Qui t'a, chien envieux, sur moi tant animé, Sur moi, qui suis absent ? crois-tu que ma vengeance Ne puisse bien d'ici darder jusques en France Un trait, plus que le tien, de rage envenimé ? Je pardonne à ton nom, pour ne souiller mon livre D'un nom qui par mes vers n'a mérité de vivre : Tu n'auras, malheureux, tant de faveur de moi. Mais si plus longuement ta fureur persévère, Je t'enverrai d'ici un fouet, une Mégère, Un serpent, un cordeau, pour me venger de toi.