Chapitre XII (2)
– Si fait, je m'y connais, et vous avez tort ; ainsi ne parlons plus de cela. Vous viendrez après le spectacle chez Prudence, et vous y resterez jusqu'à ce que je vous appelle. Entendez-vous ?
– Oui.
Est-ce que je pouvais désobéir ?
– Vous m'aimez toujours ? reprit-elle.
– Vous me le demandez !
– Vous avez pensé à moi ?
– Tout le jour.
– Savez-vous que je crains décidément de devenir amoureuse de vous ? demandez plutôt à Prudence.
– Ah ! répondit la grosse fille, c'en est assommant.
– Maintenant, vous allez retourner à votre stalle ; le comte va rentrer, et il est inutile qu'il vous trouve ici.
– Pourquoi ?
– Parce que cela vous est désagréable de le voir.
– Non ; seulement si vous m'aviez dit désirer venir au Vaudeville ce soir, j'aurais pu vous envoyer cette loge aussi bien que lui.
– Malheureusement, il me l'a apportée sans que je la lui demande, en m'offrant de m'accompagner. Vous le savez très bien, je ne pouvais pas refuser. Tout ce que je pouvais faire, c'était de vous écrire où j'allais pour que vous me vissiez, et parce que moi-même j'avais du plaisir à vous revoir plus tôt ; mais, puisque c'est ainsi que vous me remerciez, je profite de la leçon.
– J'ai tort, pardonnez-moi.
– À la bonne heure, retournez gentiment à votre place, et surtout ne faites plus le jaloux.
Elle m'embrassa de nouveau, et je sortis.
Dans le couloir, je rencontrai le comte qui revenait.
Je retournai à ma stalle.
Après tout, la présence de M. de G… dans la loge de
Marguerite était la chose la plus simple. Il avait été son amant, il lui apportait une loge, il l'accompagnait au spectacle, tout cela était fort naturel, et, du moment où j'avais pour maîtresse une fille comme Marguerite, il me fallait bien accepter ses habitudes.
Je n'en fus pas moins très malheureux le reste de la soirée, et j'étais fort triste en m'en allant, après avoir vu Prudence, le comte et Marguerite monter dans la calèche qui les attendait à la porte.
Et cependant, un quart d'heure après, j'étais chez Prudence.
Elle rentrait à peine.