CASSEROLE 2009-10-09
« Berlusconi, maître des casseroles ». C'est le titre, peu aimable, il faut en convenir, qui orne la page 7 de Libération, d' hier. Et le surtitre permet d'éclairer notre lanterne et de mieux comprendre l'allusion perfide contenue dans cette formule : « pots de vin, achats de voix, les affaires s'accumulent, pas les condamnations ».
En effet quand on dit de quelqu'un de façon allusive, « qu'il a des casseroles, qu'il traîne des casseroles », on entend par là que dans le passé il a été responsable de quelques affaires un peu louches. Que ce soit une faillite frauduleuse, des traites non payées, des accusations de corruption ou même de trous budgétaires dans des institutions dont il avait la charge.
Mais attention, il s'agit toujours d'affaires qui n'ont pas été réglées définitivement. Si quelqu'un a comparu en justice, qu'il a été condamné, et qu'il a purgé sa peine, on dira pas qu'il traîne derrière lui des casseroles. Les affaires sont classées. Par contre, si on soupçonne mille choses, mais qu'on reste plus ou moins dans le domaine du « on dit », on est bien dans le règne de la casserole.
L'image est, en effet, celle du racontar, de ce qu'on s'échange en catimini. Ou simplement de ce qui se dit, confidentiellement ou pas, tant qu'il ne s'agit pas d'accusations publiques et officielles. Les casseroles, c'est donc une affaire de bruit qui court ? On y est ! Et c'est bien comme ça qu'on peut comprendre l'image, celle de quelqu'un qui marche en traînant des casseroles qui sont attachées derrière lui.
Donc, il ne peut pas faire autrement que de faire du bruit. Et ce bruit le poursuit. Comme si c'était l'image accusatrice de tout ce qu'il a fait de condamnable dans le passé. Tout ce que tout le monde sait, murmure, mais qui n'apparaît pas au grand jour.
Enfin cette vision est calquée sur celle du chien à la queue duquel on attache une casserole ! Distraction méchante, de mauvais garnement qui martyrise la pauvre bête, mais qui fait du bruit. Et le chien qui court ne peut empêcher ce tintamarre. Et l'image de ce qu'on traîne se retrouve même si la casserole n'est plus là. On dit bien traîner une sale réputation derrière soi ; le mouvement est un peu semblable.
Mais la casserole ne se borne pas à représenter le passé coupable des hommes publics, et elle a d'autres significations figurées.
Comme dans l'expression passer à la casserole, un peu désuète, qui fait partie d'un argot en perte de vitesse. On peut quand même souligner son côté particulièrement machiste, puisqu'elle s'emploie pour dire qu'une femme sera possédée par un homme, ce qui présente l'homme en situation active, et la femme en situation de victime.
Pourquoi passer à la casserole ? Jeu de mot salace ? Probablement parce qu'on y on fait sauter des légumes, qui rissolent, qui font du bruit. De l'allumage, me direz-vous, c'est pas bien joli, mais c'est comme ça qu'on parle. Enfin, pas tout le monde.
Coproduction du Centre national de Documentation Pédagogique. http://www.cndp.fr/