PANTALON 2009-09-09
Loubna Ahmed al-Hussein est en prison au Soudan. Pourquoi ? Parce qu'elle portait un pantalon ! Elle a donc été condamnée à recevoir des coups de fouet, peine commuée ensuite en une amende que cette journaliste refuse de payer. Elle veut en effet mettre le pouvoir soudanais devant ses responsabilités, et en tout cas faire connaître l'état de la loi soudanaise et la façon dont elle est appliquée. Ce qui met en vedette, bien sûr, le mot « pantalon ». Tout le monde sait ce que c'est, inutile de s'y attarder, il s'agit d'une pièce d'habillement qui monte jusqu'à la taille, et qui enserre chacune des deux jambes. Mais l'origine du mot est amusante et originale. C'est au départ un nom propre, pas très courant, je vous l'accorde, qu'on trouve en Italie et même en Provence. On a d'ailleurs un saint Pantaleone, l'un des patrons de la ville de Venise, ce qui fait que ce nom y était à l'honneur. Et pourtant il a connu un destin peu enviable, puisqu'il a fini par s'accrocher à un personnage de la comédie italienne, cette forme de théâtre improvisée à partir d'une histoire, d'un canevas assez déterminé. Et ce personnage n'a rien de bien sympathique, ni de bien séduisant. Il s'agit d'un vieillard qui rassemble presque tous les défauts les plus déplaisants et les plus ridicules. Il est fort laid, voûté et souvent boiteux. Mais surtout il se rend odieux, il est malhonnête, il ne s'intéresse qu'à l'argent, et il est incapable de sentiment désintéressé. Et prétentieux avec ça ! Mais en même temps, comme il est très bête et assez naïf, on lui fait croire ce qu'on veut, et on rit facilement. Avec un passé aussi lourd, on peut s'émerveiller que le mot « pantalon » soit passé en français sans trop en souffrir. Au départ, il a plutôt désigné un genre de salopette, qui était traditionnellement le costume du personnage de théâtre.
Mais le mot n'est pas si ancien, au moyen-âge par exemple, on parle des « braies » pour désigner l'habit qui s'en rapproche le plus. Mais de toute façon, le pantalon est rare. A peine parlera-t-on de bas de chausses, ou de chausses.
Quant aux gens bien nés, aux aristocrates, ils portent la culotte. C'est bien pour cela qu'à la Révolution, les patriotes parisiens se feront appeler des sans-culottes, puisque justement ils n'en portent pas. Ils portent des pantalons, souvent rayés. Ca y est ! Le mot est entré dans les mœurs grâce à Marat, qui en 1790, lui donne droit de cité !
Ce pantalon a-t-il eu une longue descendance ? Pas tant que ça, mais on peut relever quand même le remarquable « pantacourt », qui apparaît il y a une quinzaine d'années à peine. Belle inventivité pour désigner un pantalon coupé plus haut que le pantalon ordinaire et qui arrive à mi-mollet.
Coproduction du Centre national de Documentation Pédagogique. http://www.cndp.fr/