Leçon 49 - Quelle horreur!
(Chez les Belleau. Il est plus de six heures, et Marie-Laure n'est pas rentrée. Mireille attend, et elle s'inquiète.)
Mireille: Mais qu'est-ce qu'elle fait? Mais ce n'est pas possible! Qu'est-ce qu'elle peut bien faire? Mon Dieu, il lui est sûrement arrivé quelque chose!
(Vers 19 heures, elle se décide à téléphoner à Robert.)
Mireille: Allô, Monsieur Taylor, s'il vous plaît. Allô, Robert, c'est toi? Est-ce que Marie-Laure est avec toi?
Robert: Marie-Laure? Mais non, pourquoi?
Mireille: Je ne sais que faire: elle a disparu. Mais qu'est-ce qui a bien pu lui arriver? Elle devait être ici à six heures. Il est sept heures et quart, et elle n'est toujours pas rentrée. Mon Dieu! Je me disais qu'elle était peut-être partie avec toi?
Robert: Non, je crois qu'elle est allée au Luxembourg.
Mireille: Mais alors, elle devrait être là!. Ah, je ne sais pas que faire!
Robert: Écoute, tu veux que je vienne? J'arrive tout de suite.
Mireille: Bon, je t'attends. Fais vite. Au revoir!
(Un quart d'heure plus tard, Robert est là.)
Mireille: Il est 7h 40! Ça fait une heure et demie qu'elle devrait être là! Je ne comprends pas.
Robert: Tu as regardé dans sa chambre?
Mireille: Son bateau n'est pas là.
Robert: Il me semble bien qu'elle est partie avec, tout à l'heure. Allons voir au Luxembourg.
(Au Luxembourg, Robert et Mireille cherchent, cherchent. Mais il n'y a plus personne. Tout à coup, Mireille aperçoit le bateau de Marie-Laure, à moitié caché derrière un palmier.)
Mireille: Regarde, son bateau! Ah, mon Dieu, le bassin! Mais c'est affreux!
(Robert et Mireille courent vers le bassin. Ils aperçoivent des cheveux blonds dans l'eau, mais ce sont ceux d'une poupée!)
Robert: C'est une poupée. Elle n'est pas à elle?
Mireille: Mon Dieu, où peut-elle bien être passée? Mais qu'est-ce qui a bien pu lui arriver? Je n'aurais jamais dû la laisser partir. Il paraît qu'il y a un drôle de type qui se promène dans le quartier. La concierge l'a vu. Tu crois?
Robert: Mais non, qu'est-ce que tu vas imaginer! Écoute, on va revenir chez toi et téléphoner à la police.
Mireille: Huit heures! Ça fait trois heures qu'elle est partie! Il lui est sûrement arrivé quelque chose.
(Mais, chez les Belleau, Marie-Laure est assise sur son lit, en train de jouer tranquillement avec son bateau.)
Mireille: Marie-Laure, mais qu'est-ce que tu fais?
Marie-Laure: J'arrange mon bateau. Les ficelles sont tout emmêlées.
Mireille: Mais où étais-tu?
Marie-Laure: Je viens de rentrer.
(Mireille n'en peut plus. Elle se met à pleurer.
Robert essaie de la calmer.)
Mireille: Mais ce n'est pas vrai! Mon Dieu ce n'est pas vrai!
Robert: Allons, allons, calme-toi! Tu vois: tout va bien. Tout est bien qui finit bien, non? Il ne lui est rien arrivé du tout!
Mireille (à Marie-Laure): Tu veux manger?
Marie-Laure: J'ai déjà mangé. Je vais me coucher.
Mireille: Bon, c'est ça. Couche-toi. Je viendrai te dire bonsoir.
(Mireille raccompagne Robert jusqu'à la porte.)
Mireille: Qu'est-ce qu'elle a bien pu faire?
Robert: L'essentiel, c'est qu'elle soit là! Ça va aller?
Mireille: Oui. C'est gentil d'être venu. J'ai eu tellement peur!
Robert: C'est fini! Je peux te laisser? Ça va aller, tu es sûre? À demain; tâche de dormir. Tu ne vas pas être trop en forme pour ton examen. C'est quand, le matin ou l'après-midi?
Mireille: L'après-midi. Je devrais avoir fini à six heures. Et on a rendez-vous avec les autres à six heures et demie.
Robert: Où ça?
Mireille: À Saint-Germain-des Prés, au petit square près de l'église, tu sais, juste en face des Deux Magots.
Robert: Des deux gâteaux?
Mireille: Des Deux Magots, idiot! Espèce d'idiot! Aux Deux Magots, le café.
Robert: Je crois que je vois où c'est. Bon, allez, à demain!
(Un peu plus tard, dans la chambre de Marie-Laure.)
Mireille: Tu es couchée? Ça va? Alors, dis-moi, maintenant. Qu'est-ce qui t'est arrivé?
Marie-Laure: C'est un secret. Alors, je ne peux pas te le dire. De toute façon, ça ne servirait à rien que je te le dise, parce que si je te le dis, tu ne me croiras pas.
Mireille: Mais si!
Marie-Laure: Mais non!
Mireille: Mais si!
Marie-Laure: Eh bien, voilà. Je suis allée jouer au Luxembourg, et là, j'ai vu le frère de la soeur, qui se promenait avec un air bizarre. Il avait l'air d'observer la maison. Alors je me suis dit: “Qu'est-ce qu'il veut, celui-là? Il n'a pas l'air net! C'est un voleur, un espion, ou quoi?" Alors, à ce moment-là, je crois qu'il m'a vue. Il m'a reconnue. Alors il a eu peur et il est parti. Alors j'ai vite caché mon bateau et j'ai commencé à le suivre, mais en me cachant, pour qu'il ne sache pas que je le suivais. Et lui, il se retournait tout le temps pour voir si je le suivais. Tu me suis? Il avait vachement peur, parce qu'il se doutait bien que je le suivais.
Il est sorti du jardin. Il a traversé, et il est entré dans le métro. Moi, je l'ai suivi, bien sûr. Il est monté dans le RER. Moi aussi, mais pas dans le même wagon. À Denfert, j'ai vu qu'il descendait. Alors je suis descendue aussi. Il est sorti, et il a commencé à marcher. Il croyait que je l'avais perdu. Mais il m'a vue. Alors, là, il a eu vachement peur! Et il est parti à toute vitesse. Et il s'est précipité dans la première porte ouverte qu'il a vue. Devant la porte, il y avait un type en uniforme qui criait: “Dépêchons-nous pour la dernière visite!” Je suis vite entrée. C'était tout noir; on ne voyait rien. Puis le type en uniforme est entré. Il a fermé la porte. Il a dit: “Par ici, messieurs-dames,” ce qui était bête, parce qu'il n'y avait que l'homme en noir, il n'y avait pas de dame. Il y avait bien moi, mais il ne m'avait pas vue. Je m'étais cachée derrière; alors il ne savait pas que j'étais là. Il a commencé à faire visiter (parce que c'était une sorte de guide, tu vois). Il y avait tout un tas de trucs bizarres, des têtes de mort, des os, des vrais! Et l'homme en noir, il avait vachement peur, parce qu'il savait que je le suivais. Puis, on est revenus à l'escalier.
Le guide: Voilà, Mesdames et Messieurs, la visite est terminée. Par ici la sortie. N'oubliez pas le guide, s'il vous plaît. . . . Merci!
Marie-Laure (enfermée à l'intérieur, tapant à la porte): Eh! . . . Ouvrez! . . . Eh!..
Le guide (ouvrant la porte): Qu'est-ce que vous faites là, vous?
Marie-Laure: Ben, j'attendais que vous m'ouvriez! Je ne vais pas passer la nuit ici!
Marie Laure: L'homme en noir en avait profité pour disparaître. Alors je suis rentrée—à pied, parce que je n'avais pas assez d'argent pour prendre le métro. Et puis, j'avais envie de prendre l'air! Et voilà! Tu es contente?
Mireille: Je me demande où tu vas chercher toutes ces histoires à dormir debout!
Marie-Laure: Parce que tu ne me crois pas? Je savais bien que tu ne me croirais pas. C'est toujours pareil. Tu ne veux jamais me croire! Bon, je suis fatiguée, moi; je dors.
Mireille: C'est ça, dors, et ne rêve pas trop à l'homme en noir. Et dis-moi, je crois qu'il vaudrait mieux ne rien dire à Papa et Maman. D'accord?
Marie-Laure: D'accord . . . mystère et boule de gomme! Tiens, passe-m'en une pour m'endormir.